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2 septembre 1993

Nouveau Départ, j'ai déménagé. J'ai donc changé de lycée. Ce qui devait me réjouir me stressait. L'appréhension d'un nouveau départ et l'angoisse de retomber dans le même gouffre qu'avant.

Pendant plus de deux ans, j'ai subi les moqueries, les violences physiques et morales de filles BCBG appartenant aux cheerleaders de mon ancien bahut. Elles me reprochaient d'être laide, sans style, d'être une sous merde... Elles disaient que c'était ma faute si ma mère était décédée, qu'elle avait pas le courage de se battre en voyant la merde de fille qu'elle avait engendré.
Tout ces mots durs à encaisser, comme si a chaque fois on rouvrait une plaie avec un poignard, je les entendais presque tout les jours pendant deux ans. Au final, je n'osais même plus aller en cours, j'avais peur, j'avais honte de moi, je me détestais.

C'est avec une boule au ventre que je descendis déjeuner, la peur, sûrement,l'appréhension d'une rentrée scolaire différente mélangée à l'angoisse de revivre une nouvelle fois toute l'horreur de ces deux dernières années. Décidément Je n'avais pas faim.

Mon père a remarqué que je ne touchais pas a mes céréales, pourtant mes préférées, il a du sentir mon stress. Il me dit :

<<- tu sais ma chérie, tout ira pour le mieux, c'est un très bon lycée, avec beaucoup d'options et de classes différentes je suis sur que tu vas te faire des amis. On ne peux pas plaire a tout le monde mais on ne peut pas être haïs de tous.
- Merci d'essayer de me rassurer papa... Lui répondais-je avec un semblant de sourire >>
Il se mit a rire.
<<-  arrête de te tracasser Johanna, tu es forte, tu t'es toujours battue, tu vas réussir à te sentir mieux et je suis là pour t'aider.>>

C'est vrai que depuis la Mort de maman il y a trois ans, je n'avais pas d'autre choix que de me battre, tout est passé si vite, une véritable descente aux enfers. J'ai été suivi par des psychologues pendant les vacances scolaires, je subis une vraie thérapie de reconstruction de soi, c'est très dur d'essayer d'être à nouveau comme les autres, surtout quand on était considérée comme moins que rien pendant aussi longtemps.
J'ai passé mes nuits à pleurer, souffrir, a me demander pourquoi j'existais et surtout "pourquoi moi ?" Pourquoi je devais souffrir à la place d'un ou d'une autre ? Ce n'était pas juste ! C'est grâce au psychologue de Seattle, Monsieur Harmon que j'ai pu commencer a avoir une véritable estime de moi même, commencer a me sentir vivante et me sentir importante. Je lui dois quasiment tout.

Arrachée de mes rêveries par mon petit frère, je regarde l'heure "7:10". Je suis en retard ! Je monte alors me préparer, j'ai choisi mon pull à rayures vert et noir avec mon jean gris totalement délavé et déchiré de partout. Les dernières fringues achetées avec maman pensais-je, avant de me maquiller, attraper mon sac a dos en jean, y glisser deux trois feuilles de papiers et un stylo et de partir vers mon nouvel établissement situé à seulement quelques kilomètres de la maison.

En cette belle matinée de septembre, je décidais de faire le trajet a pied. Les feuilles des arbres commençaient à prendre leur couleur rouge orangée de l'automne, les oiseaux gazouillaient a l'abri dans les branches. Je glissais alors mes écouteurs dans mes oreilles et lançait l'album "Nevermind" sur mon baladeur CD. Nirvana, mon groupe préféré, depuis mes 12 ans. Je n'ai encore jamais pu les voir en live mais cela ne va pas tarder. Mon père m'a promis des places pour mes 18 ans en février prochain. Je suis aux anges en y pensant.
Je marchais vite en fredonnant "Come as you are" quand sur le trottoir d'en face je vis un garçon. Un grand blond assez mince avec des cheveux bouclés lui tombant légèrement sur ses épaules. Son pull rouge étaient maintes fois recousu aux coudes. De plus, il marchait sur son jean déchiré sur le bas a force de frotter à même le sol.
Son style était similaire au mien, absolument négligé. Grunge. J'espérais secrètement qu'il soit dans la même classe que moi, mais rien que le même établissement me suffisait.
Je le trouvais plutôt canon de dos.
Mais je continuais ma route en regardant mes pieds de peur qu'il se retourne sur moi.

TateOù les histoires vivent. Découvrez maintenant