Quatrième étape

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J'avais juste envie de me tuer. Point. Cela faisait quatre jours que j'étais allé dans ce lieu maudit. Et franchement, je pensai que ma mère n'aurait jamais dû prendre des rendez-vous avec le psychologue. Je me sentais juste trop mal. Trop mal. Oui, j'avais réfléchi à tout ce que Sunggyu m'avait dit. Et j'avais compris. Il ne me l'avait pas dit directement, mais je n'étais pas si stupide pour ne pas comprendre. Le premier jour, je ne voulais pas le réaliser. J'étais en train d'imaginer des milliers de scénarios pour justifier que la photo la plus récente de Sungyeol soit celle de lui à treize ans. Pareil pour Sungjong et Myungsoo. Je me disais qu'ils avaient simplement pas changé de photo pour une raison ou une autre, qu'ils ne s'occupaient pas des papiers administratifs ou qu'ils vivaient carrément illégalement en Corée du Sud... Pourtant, je fus rapidement amené à cette conclusion. Rien que d'y penser, j'avais énormément mal au coeur et un sentiment de malaise se provoquait en moi. Je n'étais pas sorti de chez moi depuis des jours, séchant l'université par la même occasion. Ma mère ne s'inquiétait pas pourtant. Au contraire. Elle en parlait si joyeusement avec mon père que ça m'effrayait. Le savait-elle depuis le début ? Non, le savaient-ils depuis le début ? C'était pour ça qu'elle avait dit que je croyais avoir des amis. Je n'en avais pas, oui. Je n'en avais plus.
Finalement, j'étais sorti. Pour quoi faire ? Pour aller boire. Je voulais juste oublier. Oublier. Tout oublier. Je vis Sungyeol m'appeler, mais je ne décrochai pas. Après tout, il ne m'appelait pas. Ce n'était que mon imagination. Mon stupide imagination.

J'arrivai à un bar, et y entrai. Je vis des personnes qui étaient soit en train de danser soit en train de boire soit en train de se peloter. Cette ambiance n'était vraiment pas à mon goût, mais je voulais tout oublier. Il y a quelques jours, j'avais dit à "Sungyeol" que je n'aimais pas l'alcool. Je disais que ça ne servait à rien, et que je ne voulais rien oublier de ma vie. Pourtant, je me dis maintenant tout le contraire. Je voulais oublier que Sungyeol, Myungsoo et Sungjong... N'existaient pas.
J'allai m'asseoir à une place au bar et fis signe au barman de venir.
"- Une bière, s'il vous plaît.
- Bien reçu."
Je soupirai un bon coup. Je voulais penser que Sungyeol serait en colère contre moi parce que je ne l'avais pas invité à boire avec moi, que Sungjong m'aurait grondé parce que je ne lui avais pas dit quels problèmes j'avais pour aller boire et que Myungsoo me bouderait tout simplement parce que j'étais allé boire. Mais c'était impossible. J'eus soudainement envie de pleurer, et chassai mes larmes d'un mouvement de la tête. Je ne devais pas pleurer. Du moins, pas dans ce bar rempli de monde.
"- Voici votre bière.
- Merci."
Je commençai à boire, et le goût de la bière me dégoûtai. Pourtant, je continuai à boire, de gorgée en gorgée. Ils disaient qu'en buvant, on pouvait tout oublier. Et pour ne serait qu'un instant, je ferais tout pour tout oublier. Honnêtement, je commençai à penser que mon cerveau avait fait le bon choix en me faisant oublier tous ces événements. Si il ne l'avait pas fait, je pensai que je me serais simplement suicidé. Qui pourrait vivre avec la mort de ses trois meilleurs amis sur le dos ? Personne. Mais j'étais bien parti pour me souvenir de tout, vu que je commençai à me souvenir de beaucoup de choses...
Le seul problème encore, c'était que je ne me souvenais toujours pas de la quatrième ni de la troisième. En fait... Je ne savais même pas si Sungyeol, Myungsoo et Sungjong avaient réellement existé. Et s'ils étaient issus de ma tête ? Et si Sunggyu avait placé un puce microscopique dans ma tête et pouvait voir à quoi ressemblaient Sungyeol, Myungsoo et Sungjong pour imprimer des portraits robots d'eux à l'âge de treize ans ? Non, ça me semblait trop compliqué. Pourtant j'avais envie d'y croire. C'était bizarre, en fait. De me dire que depuis dix ans, j'étais ami avec des personnes qui n'existaient même pas. Ça me donnait envie de tout oublier et de me dire qu'ils étaient bien vivants et qu'ils existaient vraiment.

J'entendis soudain des notes de musique. Je tournai la tête et vis deux jeunes hommes chanter. Ils avaient l'air d'être de mon âge, et semblaient être appréciés. Les gens s'extasiaient devant leur musique et chantaient avec eux. Ils semblaient être populaires. Mais... Existaient-ils réellement ? Étais-je réellement dans un bar, et pas autre part ? Était-ce mon cerveau qui me jouait des tours ? Ces gens, étaient-ils vraiment en train de s'amuser ? Je ne savais pas.
J'étais toujours en train de boire, en train d'enchaîner les bières. Je commençais à voir flou. Je n'avais simplement pas l'habitude de boire de l'alcool, alors je tenais mal. La musique résonnait dans ma tête, les personnes bougeaient lentement et les murs commençaient à tanguer. Ce n'était pas très bon signe. Mais mon corps continuait à faire le même mouvement. Il enchaînait les bières, que je le veuille ou non. Tout devenait extrêmement flou autour de moi. Je ne comprenais rien. Est-ce que les gens me parlaient ? Ou parlaient-ils entre eux ? Étaient-ils au moins en train de parler coréen ? Je ne comprenais pas. Je reconnaissais parfois quelques mots, mais ça ne me suffisait pas à comprendre leur conversation. Je ne savais pas de quoi ils parlaient. Je n'arrivais pas à lire ce qu'il y avait écrit devant moi. Ce soir... Ce soir... Nous... Nous accueillons... Je n'arrivais pas à lire. Ma tête me faisait horriblement mal, et je savais que dans deux secondes j'allais sûrement tomber dans les bras de Morphée. Pourtant, j'étais toujours en train de boire. La musique tapait dans mes oreilles ; cela provoquait une douleur atroce dans ma tête. Les gens dansaient et bougeaient beaucoup trop lentement à mon goût. J'entendais tout beaucoup trop lentement. Tout me passait par dessus la tête.
Et soudain, je sentis l'horrible besoin d'aller vomir. D'aller vomir tout ce que je venais de consommer. D'aller vomir tout ce que je venais d'apprendre. Je m'apprêtai à me lever, quand je retombai lourdement sur mon siège. Je n'arrivais même plus à bouger. L'alcool m'endormait. Alors je laissai mes paupières se refermer lentement, et je sentis ma tête tomber lourdement sur la table.

J'ai l'air d'un fou, selon toi ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant