Chapitre XII : Boxe (part. 2)Rien n'a changé. Toujours les mêmes vieilles ampoules grillées qui donnent un air lugubre à l'endroit. Les mêmes posters d'anciens champions de boxe légendaires : Marco Huck, Yoan Pablo Hernández, Wladimir Klitshko...
J'admire les coupes exposées dans une vitrine au fond du long couloir. Bien qu'elles semblent ne pas avoir été nettoyées depuis des années, elles sont magnifiques.
Je reste un moment à les détailler une par une jusqu'à ce que mon regard tombe sur une photo : l'équipe féminine de boxe en l'année 1987. Ma mère se trouve sur la photo. Elle était une championne reconnue.
Je me tiens quelques instants à admirer la photo de ma génitrice et secoue la tête, me rappelant mon intention première : aller voir Charlie.
Je me dirige donc vers le bureau de celui-ci. Entendant des voix provenant de derrière la grande porte en chêne, je décide de patienter jusqu'à la sortie de son visiteur.
Ces quelques minutes se transforment rapidement en une demie heure, puis en une heure. À la suite de laquelle je me laisse glisser le long du mur.
Quelqu'un me secoue brutalement pour me réveiller. Je me suis endormie. Tant pis. J'ouvre un oeil, puis l'autre, et regarde l'homme en face de moi par dessous ma longue chevelure.
Il porte un chapeau et un imper, et n'a pas l'air particulièrement chaleureux. Une certaine angoisse se lit au fond de ses prunelles alors qu'il me parle pour la première fois, me laissant entendre sa voix rêche et agressive.
- Qui es-tu ? Es-tu là depuis longtemps ? Qu'est-ce que tu as entendu ?
Je ne lui réponds pas, ce qui semble accroître sa peur plus encore. Ses cris attirent Charlie.
- Mais qu'est-ce qu'il se passe ici ?
Son regard se pose sur moi.
- Alice ma chérie, c'est bien toi ?
Un sourire fend son visage mais il se ravise, semblant se rappeler de la présence de l'homme au dessus de moi.
- C'est bon Léon, vous pouvez la laisser. Bonne journée.
Ledit Léon s'en va, non sans m'adresser un regard suspicieux. Charlie m'aide à me relever et m'enlace étroitement contre lui.
Charlie est un grand homme dans la cinquantaine. Malgré son âge, il a une carrure très imposante qui inspire le respect. Ses seuls signes de vieillesse sont ses cheveux poivre et sel et les pattes d'oie visibles aux coins de ses yeux.
Quand il me lâche, je lève directement un regard désapprobateur vers lui. Je questionne du regard l'homme qui a tant de fois vu mes yeux, sans pour autant en dire du mal.
Il baisse le regard et je sais qu'il a honte de ce qui va suivre.
- Entre, je vais t'expliquer à l'intérieur.
Il m'ouvre la porte et je le suis dans la grande pièce qui lui sert de bureau. Il me désigne un canapé dans l'angle de la salle, éclairé par la faible lueur d'une lampe. Il s'assied en face de moi, sur l'un des gros fauteuils en velours.
Dans un premier temps, personne ne parle. Pendant qu'il - je suppose - cherche ses mots, j'admire le vieux tapis oriental sous mes pieds.
- ...Rien ne va plus, Alice.
Je redresse la tête et plonge les yeux dans les siens, l'incitant à continuer.
- Ma sœur et son mari sont morts le mois dernier. Ils venaient d'avoir une petite fille, Céleste. Du coup, Céleste se retrouve à ma charge, parce que visiblement, ils m'avaient désigné pour m'occuper d'elle s'il leur arrivait quelque chose. Évidemment, je suis heureux et même flatté qu'ils décident de me confier la fille qu'ils ont eu tant de mal à avoir. Mais j'aurai simplement aimé qu'ils m'en parlent avant. Et puis tu sais, il y a Bran, vous vous entendiez tellement bien ! Et bien il est dur, très dur en ce moment. Je pense qu'il fréquente les mauvaises personnes. J'ai même retrouvé de la drogue dans son bureau putain ! Je sais plus quoi faire Alice, je sais plus quoi faire...
Je le regarde. Son dos est voûté, ses épaules sont affaissées et il paraît avoir pris 10 ans en l'espace de quelques minutes. Comme s'il portait une charge trop lourde sur ses épaules, malgré sa carrure pourtant effrayante.
Je me lève lentement et me dirige vers lui. Je m'accroupis, et une fois à sa hauteur, j'attrape ses grandes mains dans les miennes. Je lui fais un sourire que je veux rassurant. Je vais l'aider.
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Muette
Teen FictionElle ne parlait jamais. Elle avait ses raisons. Des putains de raisons. Est-ce qu'il va tout changer ? Oui. Est-ce que ce sera simple ? Non. Alice Hagun ne parle pas. Elle le peut physiquement mais elle ne le fait pas pour ne pas répondre aux quest...