Assise à son bureau, concentrée, elle tenait sa tête entre ses mains ; « Il faut que je le retrouve » susurrait-elle entre ses dents. Elle tapait frénétiquement le bout de ses doigts sur le bois. Il ne lui restait plus que 13 heures pour réussir à situer cette pièce vide dans tout Reykjavik. Etait-ce seulement à Reykjavik ? Mais elle ne savait rien. L'heure défilait à une allure incontrôlable.
Elle enfila son blouson en daim, laça ses converses, enroula son écharpe autour de son cou en emprisonnant ses cheveux et sorti attendre le car. Il était encore tôt, elle avançait le long de l'allée et choisit un siège violet à sa gauche où était collé une multitude de chewing-gum. Elle était la seule passagère, son souffle chaud rendait floue la fenêtre casseuse, elle y écrivit « Anna » du bout du doigt qui sortait de sa mitaine. Elle descendit à l'arrêt « université » ; l'amphithéâtre était désert, la plupart des étudiants avaient la fâcheuse habitude d'arriver avec un quart d'heure de retard. Elle déposa ses affaires sur la table scarifiée ; quand l'ennui ce faisait trop important et que le cours devenait soporifique, les gravures et dessins envahissaient les rangées de la salle de classe.
Anna inséra quelques pièces de monnaie dans le distributeur, et appuya à plusieurs reprises sur un bouton. Un gobelet en carton rouge tomba pour se remplir de thé vert ; la derrière goutte chuta avec un ploc à peine audible. Elle saisit la petite tasse et la relâcha aussitôt. Le thé bouillant se rependit sur le carrelage gris de l'accueil mais Anna ne s'en rendait déjà plus compte, elle n'était plus là. Elle fut frappée par l'intensité de la chaleur étouffante; mais elle décida de l'ignorer, du moins pour le moment. Debout au milieu de la pièce, elle tournait sur elle-même pour trouver un indice, ne serait-ce qu'un seul. Elle mémorisait tout, chaque détail s'imprimait dans son esprit. Elle avançait parmi les flammes pour atteindre l'unique fenêtre, elle était petite et ronde ; Anna se pencha légèrement, elle devait être au troisième étage, il faisait nuit et les lampadaires éclairaient la rue. La devanture verte d'un fleuriste, une boutique de souvenir, des maisons blanches à plusieurs niveaux ; ses yeux bougeaient à toute vitesse. Il n'y avait personne dans la rue, à part un chat qui traversa la route et disparu à l'angle d'une petite ruelle, c'est là qu'elle aperçue la plaque incrustée dans la façade délavée d'un petit immeuble, « Valastigur ». Elle ouvrit la fenêtre, un instant elle sentit l'air froid sur sa peau mais les flammes la consumaient déjà ; elle mordit sa lèvre inférieure pour s'empêcher de crier, avec plus de force, le sang perlait au coin de sa bouche, le décor d'assombrissait.
...
Etrangement elle était encore débout ; à ses pieds la flaque de thé s'étendait progressivement et le gobelet avait roulé jusque sous une chaise. Une légère douleur pulsait dans la paume de sa main. « Valastigur » elle avait enfin quelque chose ! Elle courrait à perdre haleine, l'air glacial s'engouffrait dans sa gorge devenu sèche, le vent frappait ses yeux qui pleuraient sans qu'elle le veuille, ses ongles commençaient à devenir bleu. Elle zigzaguait entre les passants et les vélos en asseyant de les éviter, elle traversait parfois des petites nappes de brouillards qui brouillaient sa vue. Elle monta les escaliers en marbre deux à deux, jusqu'à arriver devant une immense porte en bois vernis, recouvert de fines moulures dorées. Anna fit un petit geste de la main à la jeune fille assise derrière le bureau, qui était en train de raccommoder la couverture de certains livres abimés. Elle s'assit sur le premier fauteuil et tapa rapidement sur le clavier de l'ordinateur. En plein milieu de l'écran blanc, une barre de chargement apparue ; impatiente, Anna entortillait une mèche de cheveux autour d'un crayon que quelque avait surement du oublier. La carte de la ville apparue, Anna suivait les lignes roses qui représentaient les rues de Reykjavik, il y en avait bien une du nom de « Valastigur ».
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Les yeux d'Anna
Художественная прозаLa plupart des gens aiment la compagnie, ont des amis, de la famille sur qui se reposer. Mais quand tous le monde vous tourne le dos pour se que vous êtes, il vaut mieux avoir été habitué à la solitude. Nous caractérisons nous pour ce que nous somm...