Chapitre 29-J'ai un peu froid, comme a dit l'autre (Andra)

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DEBOUT SUR LE ZINC – Les mots d'amour

Quand je la croise, je ne suis même pas surprise. Je me doutais que Zaza allait sauter sur cette occasion, puisque j'ai fait échouer son dernier plan.

Marie.

Elle semble triste, infiniment triste, et quand je vois ses cheveux roux j'ai toutes les peines du monde à me retenir de me précipiter pour l'embrasser. Je remarque que je n'ai pas cessé de penser à elle. Contrairement à la résistance que j'ai pu opposer jusque-là à Zaza, quand Violette me traîne jusque dans la bibliothèque, je me laisse faire sans résister, la laissant me rapprocher de Marie sans qu'elle en ait conscience. Je hère entre les rayonnages de romans et me perds, l'esprit ailleurs, en la cherchant sans la chercher. Je sème Violette qui s'est arrêtée pour lire un résumé et me retrouve seule au milieu des romans d'amour. Triste ironie !

Pour couronner le tout, elle arrive à ce moment hagard où je suis perdue avec moi-même, où je n'ai plus de repères. Elle s'arrête en me voyant, son regard fait écho au mien et je me sens idiote. Elle est aussi triste que moi, pourquoi suis-je partie ce jour-là ? J'ai envie de la prendre dans mes bras. Elle est à quelques mètres seulement et on reste là, le regard perdu, on ne sait pas vraiment ce qu'on fout ici, on ne sait pas vraiment non plus ce qui nous a conduites là. Qu'est-ce qu'on ressent l'une pour l'autre finalement ?

Pourtant, les questions s'effacent. Je me rapproche d'elle pas à pas, attirée par sa présence magnétique. J'ai besoin de la savoir près de moi, là, maintenant. Elle aussi vient vers moi, il n'y a pas de larmes comme la dernière fois, elle s'approche, je m'approche et tout près l'une de l'autre, nez à nez, on plonge dans une contemplation réciproque. On ne dit rien et les minutes passent, on se regarde et on se dit sans parler toute la douleur de ces derniers jours passés loin l'une de l'autre. Il aura suffi d'un baiser pour que la séparation devienne insupportable...

"Je veux toucher le ciel pendant onze mois."

Sa déclaration me surprend beaucoup, je suis plongée dans ses yeux verts qui me font un effet fou. J'ai du mal à me concentrer sur ce que je viens d'entendre. Elle passe une main sur ma joue et la caresse doucement du bout du pouce. Elle décrit la courbe de ma paumette, ne me quittant toujours pas du regard, et elle murmure avec douceur :

"Andra... je t'aime. Je veux partager tes derniers mois. Je veux faire partie de ta vie, peu importe le temps que ça durera."

Je suis toujours pétrifiée par tout ce qu'elle me dit, ça fait deux semaines que j'en rêve secrètement comme une folle, j'ai peur qu'elle le prenne mal et j'ai vaguement conscience que je devrais lui répondre. Je ne peux pas prononcer un mot. Ma bouche est pâteuse et sèche. Rien n'en sort.

Il ne me reste qu'une seule solution. Je me penche tout doucement et dépose un baiser sur ses lèvres sèches et gercées. Un baiser sucré puisqu'il n'est pas salé.

Elle y répond d'un coup avec ferveur et maladresse, elle pince mes lèvres et les mordille, sans gêne. Elle en a envie et moi aussi. Je la saisis brusquement par la taille en lâchant les sacs de courses aux couleurs des magasins que j'ai dévalisés avec Violette, Rose et Zaza. Je la prends et la serre contre moi, je la tire à moi. Mon rêve se réalise enfin, celui qui me torture depuis quasiment deux semaines.

Elle est là contre mon corps et ses lèvres appartiennent à mes lèvres.

Je suis heureuse.

Please, make me dream ♪Version éditée papier♫Où les histoires vivent. Découvrez maintenant