Chapitre 20

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Au coin du feu, une tasse de café bien chaude entre les mains, Allyson finit par arrêter de pleurer.

Bon dieu, qu'elle m'a fait peur ! La voir craquer ainsi, elle, l'un des êtres les plus forts, les plus têtus, en tout cas que je connaisse, m'a plutôt remué. J'ai l'habitude des larmes de colère, mais pas de désespoir.

Alors j'ai commencé par la faire rentrer à la maison et l'ai installée devant le feu, enveloppée dans une couverture. Puis je me suis assis près d'elle et lui ai parlé doucement.

À vrai dire, je ne suis pas doué, avec les femmes. Je n'ai jamais su les comprendre.

Comment réagir devant ses pleurs ? Les femmes ne disent jamais clairement ce qui n'allait pas. Il fallait le leur arracher ou bien de le deviner. Et alors malheur à celui qui se trompe ! Allyson par exemple. Elle répète que tout va bien, mais il suffit de la regarder pour s'apercevoir que ce n'est pas vrai. Je la vois qui fixe les flammes d'un air absent. Je ne sais plus quoi faire. Un peu plus tôt, j'ai appelé son frère Charles. Il s'est montré amical, mais pas d'un grand secours.

— Parle-lui, avait-il conseillé.

Parler... C'est justement ce qu'on faisait quand elle s'est mise a pleurer. Alors inutile de recommencer.

Non, ce que je veux, c'est la porter dans la chambre et lui faire l'amour. Et la faire rire de nouveau.

Il est trop tard. Si je tente quoi que ce soit, elle dira que j'essaie de la rendre amoureuse de moi pour éviter qu'elle change d'avis au sujet de Ben.

Je me sers une tasse de café et reviens m'asseoir à côté d'elle.

— Écoute Allyson, dis-je en essayant de bien trouver mes mots. Je... C'est moi qui ai tout gâché. Je t'ai fait souffrir, j'ai fait souffrir Ben et... voilà, j'essaie de te demander pardon. Je n'ai jamais voulu ce qui arrive. Je me serais plutôt coupé un bras que de te blesser.

Elle reste silencieuse un moment puis dit :

— Tu n'as rien à te faire pardonner, Alex. Sans toi, je n'aurais jamais su que j'avais un fils. Il vivrait avec des étrangers et je ne l'aurais jamais connu.

— Mais si j'avais eu le choix, tu ne l'aurais pas su non plus. Tu avais raison, l'autre jour, dis-je honteux. Je ne comptais rien te dire. J'estimais que cela n'avait pas d'importance, que tu finirais par rentrer à New York et que tout serait réglé.

— Peut-être ça aurait mieux valu. Peut-être aurait-il été préférable que Ben continue de croire que Suzanne était sa mère. D'ailleurs, pour toutes les choses essentielles, elle a été sa vraie mère.

— Non, il aurait été malhonnête de lui cacher la vérité. Dis-je en lui prenant la main. Je n'ai jamais connu ma mère, et...

— Je ne savais pas.

Elle me sourit et dégage doucement ses doigts.

— Je croyais que tu avais grandi dans une réserve jusqu'à ce que tu viennes vivre ici avec tes grands-parents. Ta mère était la fille du chef...

J'éclate de rire.

— Bon Dieu ! J'avais oublié cette histoire. Tu y as vraiment cru ? dis-je.

— Bien sûr su, j'y ai cru. Pourquoi ? Tu veux dire, que tu as tout inventé ?

— Évidemment, riant de plus belle la tête renversée en arrière. En réalité, ma mère était une fille quelconque avec laquelle mon père a passé la nuit. Je ne sais même pas si elle lui a dit son nom. En tout cas, il était trop saoule sur le moment pour s'en souvenir. Elle, en revanche, en savait assez pour retrouver mes grands-parents et me déposer devant la porte, à deux mois.

Hate & LoveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant