6. Les villes fantômes

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« Monsieur, laissez-moi vous présenter le prototype.

Arthur transpirait abondamment, aidé par la chaleur estivale et les ordinateurs ronronnants qui faisaient grimper la température de la pièce. Il se laissait croire que ce n'était pas tout simplement le stress.

Il alluma un des écrans, se connecta et accéda à l'interface.

– Il est actuellement en phase de test. Mais d'ici un mois, il pourra être lancé. C'est un système intelligent, adaptatif, il apprend progressivement. Il enquête, pour ainsi dire. C'est pourquoi ce n'est pas simplement un logiciel d'analyse des métadonnées. Ce n'est pas simplement de la surveillance supervisée par l'être humain, c'est la nouvelle ère.

– Le sénateur, dit l'homme, a été grandement intéressé par la présentation que vous en avez faite à la dernière réunion.

Quelqu'un frappa contre la porte vitrée, et celle-ci s'ouvrit.

– Arthur, est-ce que je pourrais te voir une minute ?

– Je suis en réunion, se défendit-il par réflexe.

Ophélie faisait dix ans de moins que son âge. Les cheveux bruns coupés comme ceux d'une gamine, le visage non maquillé ne laissaient pas s'imaginer qu'elle était titulaire d'un doctorat en neurosciences.

– Eh bien, quand ce sera terminé, dit-elle. Bonjour, monsieur.

– Bonjour, mademoiselle. Vous êtes sur le projet ?

– Je dirige la partie modélisation des intelligences.

Elle referma la porte, et Arthur rassembla ses esprits.

Accès à l'interface.

Bonjour, écrivit Omni sur son écran.

– Bonjour, dit Arthur.

Bonjour, Alcide Carmin, dit Omni.

– Comment connaît-il mon nom ? S'exclama le conseiller sénatorial.

Reconnaissance faciale. Recherche par similarité avec des photos d'Internet. Accès à vos pages publiques, vos profils sur les cinq réseaux sociaux dont vous êtes membre. Durée des calculs : trente millisecondes.

– Intéressant, dit le conseiller Carmin.

Vous êtes ici pour assister à une démonstration de capacités supplémentaire. Vous comptez ensuite faire un rapport non pas au sénateur, mais au général Perlton, le conseiller du président.

– Comment avez-vous deviné ça ? S'exclama Carmin en jetant un regard glacial à Arthur, à qui la chaleur montait à la tête.

Simple supposition. Le sénateur a déjà formé son opinion lors de la dernière réunion, et il travaille en ce moment sur d'autres sujets. Vous avez travaillé à plusieurs reprises avec le général Perlton. Les données de localisation de votre téléphone portable indiquent que vous avez rencontré le général une fois depuis la réunion. La supposition est que vous avez communiqué votre intérêt au général et qu'il vous a envoyé quérir de nouvelles informations.

Carmin sourit à pleines dents.

– Intéressant, répéta-t-il. Intéressant. »

Arthur s'efforça de sourire. Mais une boule s'était formée dans sa gorge et ne voulait pas s'en échapper ; le malaise grandissait en lui, et ce n'était pas la chaleur.

Rendez-vous à la fin des tempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant