TROIS

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- PLUS COURT.

Jean passa sa main dans ses cheveux bruns, qui n'étaient à présent pas plus longs que son pouce. Assise sur un tabouret, Becky se tenait derrière elle, une paire de ciseaux à la main. Sur le sol de carrelage blanc, des mèches brunes cachait la couleur claire. D'épaisses boucles sombres, longues, qui n'avaient plus leur place sur sa tête. La femme ne lui répondit pas, et obéit à la demande de Jean. Celle-ci se redressa sur sa chaise, la tête haute. Même si elle semblait déterminée à se débarrasser de sa chevelure, elle avait tout de même un pincement au cœur au fur et à mesure que ses cheveux s'effondraient par masses sur le sol. Elle ne les avait pas coupé depuis ses onze ans. Un dimanche, elle et George s'était enfoncés dans les bois après la messe du matin, et par mégarde, ils avaient déchiré et tâchés leurs beaux vêtements. Lorsqu'ils étaient revenus couverts de haillons et qu'ils s'étaient présentés comme ça devant leur mère, celle-ci ne l'avait pas du tout bien pris. Après trois claques chacun, elle alla chercher les ciseaux de la cuisine, et les débarrassa de leurs cheveux, pour les punir. Elle les coupa extrêmement courts, et il faut savoir que leur génitrice n'était pas une coiffeuse très douée. Ce fut la honte à l'école, et les huées et les moqueries des autres faisaient gueuler les deux jumeaux qui n'avaient que leurs mots pour se défendre. Mais les cheveux repoussent, et trois mois plus tard, il n'y avait plus de quoi rire. Jean souffla, les souvenirs pleins la tête, et pris à nouveau la parole.

- Je n'ai jamais compris pourquoi seulement les hommes étaient envoyés à la guerre.

- Car nous sommes incapables de faire ce qu'ils font.

- C'est vraiment ce que tu crois ?

Les ciseaux de métal frôlaient la nuque de la jeune. Ils étaient froids, et le son qu'ils faisaient lorsqu'ils se refermaient sur les mèches de Jean ressemblait au bruit que les tasses de porcelaines faisaient lorsqu'elles se brisent sur le sol. La coiffeuse ne répondit pas à l'interrogation de Jean, et celle-ci pensait être en train de parler à un mur lorsqu'elle lui demanda :

- Tu sais pourquoi ils n'envoient que les hommes à la guerre ?

Becky grimaça. Décidément, ce n'était pas un sujet qui lui plaisait à cœur, la guerre. Elle devait s'occuper de centaines de jeunes soldats chaque jour. Ils semblaient tous si fiers de s'engager, sans savoir ce qui les attendait là-bas. Pourtant, Becky non plus n'était pas certaine des horreurs qui se déroulaient au front, mais elle avait vu de ses propres yeux les dégâts que la guerre commettait sur l'homme. Elle le détruisait. Elle le rendait à l'état d'un animal, sauvage et grotesque. Elle le dévorait de l'intérieur, le poussant à voir et à commettre des actes inhumains. Cette période de violence ne faisait que débuter, et les blessés étaient rares pour l'instant. Mais certains hommes, les plus malchanceux, devaient être ramenés à Londres pour recevoir des soins de meilleure qualité. Becky avait déjà traité plusieurs corps, et à chaque fois, elle finissait avec le tablier couvert de sang.

Saving Private RyanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant