Lacey
Cela faisait deux heures que l'objet de mon tourment me narguait à la terrasse de mon bar. Mon cerveau était en ébullition, et ce n'était pas le seul, vu mes nerfs en pelote. Mon corps n'était qu'un traitre. Je posais rageusement la tasse que j'allais finir par casser à force de la frotter comme une démente. Trop, c'était trop ! Il m'avait brisé le cœur et voila qu'il revenait tout sourire. Comme une conne, je me prenais à baver devant lui. J'étais bonne pour l'asile !
D'un pas décidé, je m'approchais de sa table en repensant à toute la souffrance qu'il avait causée. Je le haïssais et cela n'était pas prêt de changer. Je m'arrêtais devant lui et posais mes poings sur mes hanches.
Tu vas me faire le plaisir de dégager ! Ca suffit maintenant ! Je ne veux pas te voir ! Les bars, ce n'est pas ce qui manque sur l'île !
Je sais que tu es contente de me voir, me nargua-t-il avec son sourire de star planétaire.
J'en perdis mon aplomb. Il était gonflé. Monsieur j'ai un égo en béton armé. N'empêche, il n'avait pas vraiment tort, mais plutôt crever que de l'avouer. Je ravalais mes larmes et me concentrais pour éviter que ma voix ne tremble.
- Jason, s'il te plait, va-t'en.
Ces yeux s'agrandirent dans une expression que je refusais d'analyser. Il hocha la tête sérieusement et se leva.
-Bonne journée, Lacey.
Mon nom dans sa bouche m'anéanti encore un peu plus. J'avais l'impression de suffoquer. Je le vis poser un billet sur la table et s'éloigner d'un pas tranquille. Dès qu'il disparu, je m'appuyer sur la table et cherchais mon souffle. Lila accourut, inquiète. Elle me fit signe de respirer calmement et m'installa à une table à l'ombre. Moi qui croyais m'en sortir, je m'étais menti. Je ne l'avais pas oublié, loin de là.
*****
Il me fallut le reste de la matinée pour retrouver mes esprits. J'étais capable de gérer Jason. J'étais ma propre patronne, mon affaire roulait malgré la concurrence rude, ce n'était pas un acteur de pacotille qui allait faire la loi chez moi ! Je levais les yeux machinalement pour inspecter la salle quand j'accrochais une démarche familière. Jerry arrivait d'un pas assuré et ignora sa table habituelle. Il fonçait droit sur moi. Ce traitre ne manquait pas de culot.
-Je ne savais pas qu'il était là, annonça-t-il d'une voix égale avant même que je n'ai pu l'insulter à loisir. Ces yeux me suppliaient de le croire.
-C'est ça, je vais te croire ! râlais-je, peu sure de moi.
-Je l'ai appris hier soir en rentrant. Je t'aurais prévenue si je l'avais vu.
Je baissais les yeux, incapable de soutenir son regard où perçait la sincérité. Je ne m'étais pas préparée à ce que son arrivée soit une simple coïncidence.
-Va t'installer, je t'amène ton café, dis-je pour avoir le temps de réfléchir au calme.
-Hey ?
-Oui.
-Merci de me faire confiance.
Je me détournais pour pas qu'il ne me voit rougir. Je préparais consciencieusement un petit-déjeuner de champion, retardant le moment où je me retrouverais face à lui. J'espérais qu'il verrait cela comme un geste d'excuse pour avoir douté de lui. Me tortillant sur place, je déposais le plateau devant lui.
-Tu m'as pris pour Gargantua ? demanda-t-il amusé par la quantité de nourriture devant lui.
-Euh...Je...
-Tu n'as pas à t'excuser, me coupa-t-il.
Génial, il avait compris mais il n'était pas obligé de le dire tout haut.
-C'est juste que... tu coures tout le temps, tu dois avoir faim.
-Pas à ce point, rigola-t-il la gorge déployée.
Plusieurs clientes se tournèrent vers lui, visiblement sous le charme du jeune homme.
-Mange avec moi, proposa-t-il en désignant du menton la chaise en face de lui.
- Je travaille, m'entendis-je répondre automatiquement.
-Tu es la patronne, me contra-t-il les yeux pétillants.
-C'est vrai.
Je m'installai comme une gamine prise en faute. Il poussa une assiette vers moi et me regarda commencer à manger.
-Tu ne manges pas ? l'interrogeais-je étonnée.
-J'attends de voir si tu n'as pas empoissonné mon repas, tu semblais furax quand je suis arrivé, me taquina-t-il avec un clin d'œil.
-Ahah, hilarant.
-Je sais, me sourit-il.
Nous mangions dans un silence complice, ne parlant qu'à de rares occasions. J'avais toujours la tête un peu ailleurs et partager ce moment avec Jerry me permettait d'oublier Jason pour quelques instants. Après le départ de Jerry qui s'attarda plus que d'habitude pour vérifier que tout allait bien, je donnais quelques directives à Lila et remontait chez moi. Je n'avais qu'une envie, m'enfouir sous mon drap et ne me réveille qu'une fois, Jason partit loin d'ici.
*****
Le soir venu, je redescendis pour faire la fermeture à leur place. Ils avaient déjà assurés l'après-midi seuls, ils méritaient bien de se reposer. Je traînais un peu et allais me balader au bord de l'eau avant de remonter. Mon petit appartement me paraissait immensément vide et peu accueillant. Je l'avais aménagé avec soin, mai stout ce que je voyais maintenant était une prison dorée. J'étais partie lâchement, pour fuir Jason, et me voila de retour à la case départ.
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Un moment d'affolement
RomanceLacey a tout quitté pour refaire sa vie loin des souvenirs douloureux de Los Angeles. Pensant pouvoir guérir son coeur brisé loin de tout et surtout loin de lui, elle a refait sa vie sur l'île de Grenade, jusqu'à ce qu'un certain regard noisette cr...