Le convoi transportant les enfants roulait doucement dans les plaines irrégulières de Colibri. Le chariot qui amenait les trois jeunes filles se composait de deux bancs se faisant face. Sur le sol, de la paille avait été disposée. Ora observa les six inconnus avec qui elle partagerait sans doute plusieurs journées de voyage. Au fond se tenait un garçon brun d'une dizaine d'années, aux joues roses. Il dormait paisiblement contre la paroi sans surveiller son sac qui roulait au rythme des chevaux. A côté se tenait un garçon aux cheveux bruns, le visage taché de suie. Il se tenait le bras dont s'écoulait un léger filet de sang. A y regarder de plus près, il avait plusieurs ecchymoses sur le corps. Sans doute venait-il de Faho. Les quatre autres membres de la carriole semblaient faire partie d'une même fratrie. Les familles nombreuses étaient communes dans les campagnes. L'aînée s'occupait de sa toilette. Elle coiffait tantôt ses cheveux bruns en arrière, tantôt en avant. Elle portait une robe simple mais y prêtait attention comme si ce fut une robe de bal. Elle sortit de son sac une substance entre le rouge et l'argile. Elle s'en passa sur les lèvres, prête à séduire au premier regard. Cette femme en herbe voulait faire bonne impression à sa majesté la reine. Ses taches de rousseur se retrouvaient sur les joues de ses deux frères et de la benjamine. Les frangins jouaient aux dés poussant des cris victorieux ou insultant l'autre de tricheur. La petite dernière était livrée à elle-même malgré la présence d'une partie de sa famille. Elle regardait le petit garçon endormi avec curiosité. Pauline fixait rêveuse le bleu nuit du ciel étoilé. Lanïane se reposait, la tête sur les genoux de sa sœur qui la berçait tendrement. Ora lui fredonnait la berceuse que leur mère leur avait si souvent chantée. La petite fille brune s'approcha pour écouter avec curiosité.
« Bonjour, dit avec douceur Ora. Je m'appelle Ora.
- Bonjour. Moi c'est Camille. Tu chantes quoi ?
- Une berceuse pour nous endormir. Tu peux rester écouter si tu veux.
- Je veux bien.
- Ce sont tes frères et sœurs ?
- Eux deux oui. Désigna Camille. Mais elle non c'est ma cousine. J'ai six autres cousins dans d'autres charrettes. Normalement. Je sais plus. A dire vrai je me sens pas très bien.
- Qu'est-ce que tu as ? Tu es malade ? L'interrogea Ora.
- Non, non. J'ai un petit peu peur...
- Carrément un petit peu. J'ai l'impression d'étouffer. Intervint Lanïane.
- Il n'y aucune raison d'avoir peur. Fermez les yeux et concentrez vous sur ma voix. Le voyage sera moins pénible endormies. »
Pauline fit de la place à côté d'elle pour Camille et chanta avec Ora leur douce berceuse. Au bout de quelques minutes Lanïane et Camille s'endormirent. Les plus grandes ne tardèrent pas à rejoindre les bras de Morphée. Ce fut un garde qui les réveilla en ouvrant la grille. Quand elles descendirent, elles virent une centaine d'enfants manger, boire, se laver ou courir. Les hommes de la reine leur proposaient des galettes de maïs et leur précisèrent qu'ils s'arrêtaient une heure. Ora alla chercher trois galettes et se posa avec Pauline et Lanïane. A peine le déjeuner entamé qu'une bagarre éclata un peu plus loin. Les gardes séparèrent les garnements. Elles apprirent qu'il s'agissait d'une histoire de vol de sac. A part cet incident, le reste du camp ressemblait à un grand rassemblement familial avec des cousins éloignés dont on ne se souvient pas bien la place sur l'arbre généalogique.
« Hum ... ça fait du bien de pouvoir se dégourdir les jambes. S'enjoua Lanïane.
- Et de manger, j'avais une faim d'ogre. Rajouta Pauline.
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Reliées - Face à la couronne arrachée
AdventureLa vie paisible de Tertrefeu s'acheva ce soir-là. Par ces quelques mots tracés sur ce papier froissé. Tous regardaient le messager, dubitatifs, puis finalement ahuris, abasourdis. A peine la nouvelle du renversement du précédant monarque propagée, q...