8. Un réveil douloureux - Part 2

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Comme pour chaque débat, Mme Maarit leur demanda de disposer les tables en cercle. Les élèves s'affalèrent sur leur siège, fatigués par la journée et la chaleur. Lorsqu'ils apprirent le thème du débat, la plupart soupira à l'idée du débat houleux qui allait se tenir. Ce thème divisait la population quel que soit son niveau de vie ou sa contrée. Déjà Pauline sortait une feuille qu'elle divisait en deux colonnes, pour et contre, les pour servant à alimenter les contre. Ora répétait mentalement quelques arguments tandis que Julie s'énervait déjà contre ses voisins qui pourtant opinaient du chef.

« Je sais que c'est un sujet sensible mais vous êtes en huitième année. Si je n'aborde pas la peine de mort avec vous, avec qui le puis-je ? Introduisit la professeure en s'asseyant en tailleur sur son bureau. Comme d'habitude, je ne vous dirai pas quoi penser mais, si vous le désirez, je partagerai mon avis personnel pour clôturer la séance. Je vous en prie, débattez. »

Julie se leva et fit face à ses camarades. Elle les regarda un à un avant de commencer comme pour capter l'attention de chacun.

« Je suis contre la peine de mort et je trouve ça honteux d'avoir toujours la peine de mort à notre époque, dans notre beau royaume bien-pensant, soi-disant civilisé, clama-t-elle haut et fort. Et je n'ai pas peur de le dire car je sais mes propos justes. Oui, vous qui me jugez, s'emporta Julie, vous qui m'observez, je vous le dis, la peine de mort sera la honte de notre décennie. Ce que vous pouvez, peut-être, considérer comme normal aujourd'hui, sera perçu comme monstrueux par vos enfants, comme barbare par vos petits-enfants.

- Joli discours Julie, applaudit François en se levant à son tour. Très émouvant mais pas du tout réaliste ma pauvre petite.

- J'éviterai de m'appeler ma petite, répliqua Julie.

- Pauvre fillette, rectifia François. Ce n'est pas aussi simple. A part dire que tu es contre la peine de mort, tu n'as pas avancé un seul argument. Pourquoi ? C'est très simple, il n'y en a pas. Alors qu'en faveur, il y en a une myriade. Nous parlons de condamner une personne ayant commis un crime et jugé par un tribunal impartial selon les lois du pays. Reconnus coupable de meurtre, de viol, d'enlèvement, d'agression, d'avoir nui à la société et d'être toujours un potentiel danger pour nous, nos voisins, notre famille ; que faire de tels individus ? Il y a deux éléments à prendre en compte : nous devons nous protéger, c'est légitime vous en conviendrez, et nous devons également punir pour le mal commis et au nom de la ou des victimes. La meilleure réponse est la mort. On aura beau dire que les gens peuvent changer, le risque zéro n'existe pas. Je ne suis pas prêt à mourir innocemment parce que, oups, on pensait que le criminel était devenu gentil et en fait non. De plus, à un moment, les gens ne méritent plus d'avoir une seconde chance. Je vous rappelle que nous ne parlons pas de petits larcins mais de crimes aux retombées irrévocables. Le rôle de la justice n'est pas de pardonner mais de veiller à l'application des lois et à la sécurité du plus grand nombre.

- Ridicule, s'insurgea Julie alors que certains applaudissait ce discours. Ce n'est pas vrai ! T'es idiot ou quoi ! Pardon madame. Mais c'est ...

- Je suis en désaccord avec toi, dit Pauline en prenant le relais. Je suis contre la peine de mort car elle présente un illogisme. On ne peut pas dire qu'il ne faut pas tuer, et tuer au nom de la justice. Les hommes n'ont pas droit de vie ou de mort sur les autres, et partant du principe que chaque vie a une même valeur, la peine de mort doit cesser.

- La vie d'un meurtrier n'a pas la même valeur que celle d'une innocente petite fille jouant dans un champ de fleurs, intervint Karl.

- Non... Mais... Pauline n'arrivait pas à formuler ce qu'elle pensait.

Reliées - Face à la couronne arrachéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant