Chapitre 50

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À la mi-juin, le vol de Louis pour Paris fut retardé. Il n'aurait pas dû partir encore à Los Angeles pour trois jours seulement, mais voir Rose le comblait. Il culpabilisa affreusement de ne pas avoir été là pour réconforter Gabriel lorsque l'odieux article avait paru.

Quand l'avion atterrit enfin à Paris, son chauffeur dépassa les limitations de vitesse pour rejoindre le stade en urgence, car le concert commençait dans moins de deux heures. Il était exténué, son corps à peine capable de bouger, et son cerveau noyé dans un brouillard constant. Gabriel avait raison à propos d'Andrew : ils étaient dans l'incapacité de trouver un nouveau label, ils n'avaient pas le temps ni la force de prospecter ailleurs.

Après avoir croisé les garçons dans les couloirs, il pénétra rapidement dans sa loge pour retrouver Gabriel. Là, il entendit un reniflement, et la pensée que Gabriel reprenne de la cocaïne le tétanisa. Il n'arrivait pas à voir où il se trouvait dans le large espace encombré par des décors prévus pour un autre show deux jours après, et il entendit une nouvelle fois le bruit. Il se précipita vers la porte du fond et l'ouvrit violemment. Gabriel était assis sur le sol des toilettes, ses jambes repliées contre son torse et la tête posée sur ses genoux. « Gabriel ! » s'affola-t-il, et il s'assit près de lui pour le prendre dans ses bras. Il regarda le téléphone par terre à côté de Gabriel et le saisit. Une page Twitter occupait l'écran, le nom de Gabriel tapé dans le moteur de recherche. Il lut les premiers tweets, la rage montant en lui, avant de reposer le téléphone. « Gabriel, tu n'aurais pas dû faire ça, » dit-il doucement.

« Je n'ai pas pu m'en empêcher, » parvint-il à hoqueter. « Tout le monde me déteste. »

« Tout le monde me déteste aussi, » rétorqua Louis, « mais je m'en moque et tu devrais aussi. »

« C'est de ma faute toutes les choses horribles que l'on dit sur toi et moi. Et je n'ai pas ton aisance à ne pas me laisser atteindre par les jugements des autres. » Il leva la tête, ses yeux étaient rouges et bouffis.

« Je sais. » Louis caressa ses cheveux. « Tu es le plus sensible du couple, c'est pour ça que je t'aime tant. » Il resserra son étreinte autour de Gabriel. Quand auraient-ils la chance d'être de nouveau heureux, sans personne pour interférer dans leurs vies ? 

« J'ai besoin d'un joint, tu peux m'en rouler un ? » demanda Gabriel.

« C'est ton jour de chance, j'en ai déjà un tout prêt, » il tapota la poche de sa chemise, « grâce à Alex. » Il alluma le joint, tira une longue bouffée et le passa à Gabriel. « Ça va passer, nous devons être patients. Et toutes les fans ne pensent pas ça, tu es juste tombé sur les pires. Promets-moi que tu ne regarderas plus sur Internet les commentaires te concernant, d'accord ? »

« Je... Je te le promets. » Gabriel recracha la fumée par ses narines d'un air pensif. « Ou je pourrais dire 'oui' à Andrew pour ma carrière solo et il nous foutra la paix. »

Le cœur de Louis chavira dans sa poitrine. « Qu'est-ce que tu viens de dire ? »

« Que je pense signer avec Andrew. »

Louis explosa. « Tu n'as pas intérêt ! C'est hors de question que tu te sacrifies une fois de plus ! Je ne te laisserai pas faire ! » Il agrippa Gabriel par les épaules, essayant de rencontrer son regard, mais celui-ci garda la tête baissée.

« Mais on ne peut pas l'arrêter ! » cria-t-il. « On ne peut même pas l'attaquer pour diffamation ! On n'a aucune preuve que c'est lui qui dit de la merde aux magazines et bousille notre réputation dans l'industrie ! »

Louis le regarda avec horreur. « Notre réputation... De quoi tu parles ? »

Gabriel soupira, dépité. « J'ai rappelé les labels que j'intéressais afin de discuter de l'avenir du groupe, mais personne n'a pris mon appel. Personne, alors qu'ils me déroulaient tous le tapis rouge il y a quelques mois. Et puis, à force de les harceler, un patron de label a accepté de me parler, et encore seulement parce que je l'avais déjà rencontré plusieurs fois lors de soirées. Il m'a révélé que notre réputation au sein de l'industrie était catastrophique. Le bruit a couru que nous ne sommes qu'une bande de drogués, que nous faisons n'importe quoi. À leurs yeux, nous ne sommes plus du tout une valeur sûre. Et même avec notre armée de fans, ils ne veulent pas prendre le risque de nous signer, car aucune compagnie d'assurance n'acceptera de couvrir des garçons instables et dangereux comme nous et, sans assurances, on ne peut pas se produire. Il m'a donné cette excuse mais je suis certain que tout le monde a peur de contrarier Andrew. Nous avons oublié de prendre en compte qu'Andrew est un homme puissant. On est foutus, » conclut-il en s'étranglant.

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