Chapitre 32

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Tammy et moi marchions côte à côte dans un sentier rocailleux bordé d'arbres aussi feuillus que gigantesques. Je sentais chaque petit caillou sous les minces semelles de mes chaussures et chacun de mes pas était un véritable calvaire pour mes épaules. J'avais gagné à un tirage au sort (auquel je doute encore de sa crédibilité) du lourd sac à dos contenant tous nos vivres. Liam et Cadfaël cheminaient devant nous.

Petits points noirs à l'horizon, notre destination finale approchait à grand pas. J'avais hâte d'enfin arrivé, nous avions eu une semaine difficile.

Après avoir traversé à gué la rivière nous avions retrouvé la trace des elfes. Cela avait été d'une facilité déconcertante. S'ensuit une traque d'environ quarante-huit heures où il ne se passa rien d'extraordinaire. Nous ne faisions que suivre les pistes laisser par ses êtres des bois. Ils étaient tout sauf discret, laissant branches cassées et détritus jonché le sol.

Ce fut seulement rendu tout près de Cardiffel que cela se corsa. Ils avaient disparu. Il n'avait plus aucune trace de leur présence. C'était comme si nous avions poursuivi que de vile chimère, mais nous n'étions pas dupes. Nous sommes vite arrivés à la conclusion qu'on nous avait mené en bateau. Ses elfes n'avaient servi qu'à nous faire perdre notre temps.

Depuis ce moment, donc il a trois jours de cela, c'était silence radio. Nous épluchions les différentes fréquences des Holocommunicateurs, dans l'espoir d'y trouver des indices, mais aucune communication ne mentionnait des elfes, une guerre ou des trahisons.

C'était comme si nous avions tout inventé. Comme si le village de North Wiu n'avait jamais été saccagé par les elfes... comme si aucune Étoile n'avait jamais trahi sa patrie.

J'ai même tenté d'appeler ma mère, parce qu'après tout nous étions encore supposées suivre son plan, mais rien, elle ne répondait pas. Tous les autres membres du conseil faisaient pareillement. C'était comme s'ils avaient coupé toute transmission.

La seule que nous avions réussie à rejoindre c'était Alésanne. Néanmoins, elle avait été très brève, nous prévenant seulement de son arrivée dans la campagne adjacente de Cardifell le deuxième jour du mois. Et c'était aujourd'hui.

Ma fébrilité rivalisait avec ma nervosité. J'avais hâte de la revoir, mais en même temps j'avais peur de ce qu'elle allait nous annoncer. Ce silence ne présageait rien de bon.

-Alors, dicta Tammy me faisant revenir à la réalité. Si tu te trouves sans arme, face à un adversaire également désarmé et que celui-ci est en position de force quelle option s'offre devant toi ?

Cela faisait des jours qu'elle tentait de m'apprendre la théorie. Mais, honnêtement, il n'avait rien de plus ennuyant que ça. J'avais découvert grâce à toutes ses questions que j'étais davantage quelqu'un de visuel, la théorie, c'était trop vague pour moi.

-Prendre la fuite, dis-je sarcastiquement.

-Ce n'est pas drôle Emmanuel !

Cette phrase. Il ne se passait pas une heure sans que je l'entende sortir de sa bouche. Pour elle, rien n'était drôle. Toutefois, je devais avouer qu'elle était la meilleure professeure de notre petit groupe. Liam a tenté de m'apprendre quelques trucs, mais il a bien vite compris qu'il n'avait pas la patience pour le faire.

-Allez Tammy, quand est-ce qu'on va vraiment apprendre ? Ça fait des jours que nous sommes sur la théorie. C'est plutôt ennuyant.

Dans un ballet harmonisé, elle se déplaça d'à mes côtés pour se placer face à moi. Ses yeux noirs me scrutèrent des pieds à la tête en l'espace d'une seconde. Dans un mouvement tant vif que brutal elle plaça ses fins doigts autour de mon cou et à l'aide de son pied elle me fit un crochet, fauchant mes genoux. Résultat, je sombrais au sol, la rouquine dessus moi, une jambe de chaque côté de mon corps.

-Alors ? C'est toujours ennuyant ?

Je sentis son souffle chaud me chatouiller les joues tellement son visage était près du mien. Un sourire cruel étira ses lèvres charnues.

Ses mains appuyaient fortement sur ma gorge rendant ma respiration impossible. Mon cœur battait à tout rompre, tellement que je ne serais même pas surpris de le voir sortir de ma poitrine.

Je tentai d'examiner la situation. En une demi-seconde je compris que tenté de la frapper avec mes pieds me serais inutile, je ne ferais que battre de l'air sans jamais pouvoir l'atteindre.

-Tammy, gronda Liam alerté par le bruit, lâche-le nom d'une Étoile.

-Il veut apprendre, qu'il apprenne.

Le soldat roula des yeux, mais ne fit rien, à mon grand désarroi. Je voulais m'écrier qu'elle me lâche, que j'avais compris la leçon, mais aucun son ne voulait sortir, elle me serrait tellement fort.

-Donc, Emmanuel, si tu te trouves sans arme, face à un adversaire également désarmé et que celui-ci est en position de force, quelle option s'offre devant toi ? Tu as une, peut-être deux minutes avant que le manque d'air devienne vraiment insupportable, alors pense vite.

La théorie se mit à défiler dans mon esprit, mais rien n'avait de sens, ce n'était que des mots épars, du charabia. Je n'arrivais pas à focaliser assez longtemps pour en retirer quelque chose.

-Pense au point faible, s'acclama Cadfaël.

-Silence! Cria Tammy. Je veux qu'il y arrive seul. Il sera seul sur le champ de bataille.

''Les points faibles... Les côtes, les... les ... RAaah je n'y arriverai pas!''

Ses yeux me fixaient toujours avec la même intensité lorsqu'une idée s'infiltra dans mon esprit.

''Son visage, pensais-je, il pourrait m'être accessible si je réussissais à dégager au moins un de mes bras de son emprise.''

Je tentais le tout pour le tout et attirai brusquement mon bras droit à moi. Je réussis à me le libérer et aussitôt je frappais de toutes mes forces sous le menton de Tammy l'obligeant à reculer. La distance et, au vu du gémissement qui sortit de ses lèvres, la douleur, eu raison d'elle et ses mains me délivrèrent.

-AAaaah, hurlais-je en reprenant mon souffle.

Ma gorge, elle aussi, criait de souffrance. C'était comme si je sentais encore l'étau des doigts glacés de Tammy m'enlacer le cou.

Liam arriva rapidement à mes côtés et m'offrit sa gourde d'eau que j'acceptai volontiers. J'envalai une grosse goulée, faisant taire ainsi le feu dans ma trachée.

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Alors? L'auriez-vous prise comme professeure? :P

Merci d'avoir lu! (et merci pour les plus de 1800 vues!!!)

La nostalgie des ÉtoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant