Chapitre 17

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-Je peux y aller, croassa une voix dans le silence.

Aussitôt que j'entendis cette voix familière, je desserrai l'étreinte qui me reliait encore à ma mère et cherchai des yeux d'où elle pouvait venir. Mes pupilles captèrent bientôt un mouvement dans un des lits disposés au fond de la pièce.

C'est bien parce que la couverture avait glissé de son visage que je la reconnus. Je parcourrai les quelques mètres qui me séparait d'elle en volant presque.

Alésanne était allongée dans l'une des couches. On ne voyait que sa frimousse dépassée des draps. Elle avait mauvaise mine. Vraiment. Sa peau auparavant basanée était désormais pâle comme la mort. D'énormes cernes noirs lui déformaient le visage et ses lèvres violacées n'étaient qu'à peine entrouvertes. Ses yeux habituellement si brillants, étaient rendus étrangement ternes. Ce poison avait dû être très puissant pour la rendre si fragile.

-Il n'en ai pas question Alésanne, répliqua ma mère lorsqu'elle vint se placer à mes côtés, vous êtes beaucoup trop faible.

Sur ce point, elle avait raison, Ally ne pouvait pas faire décemment le voyage. C'était trop dangereux. Mais à la seule pensée de partir sans elle, mon cœur se serra. Même si nous ne nous entendions pas toujours très bien, elle avait toujours été là pour me sauver la mise depuis notre départ. L'abandonner comme ça, c'était injuste.

-Je pourrais toujours les rattraper alors, s'il vous plaît ne me mettez pas hors de cette mission, s'il vous plaît, répétât-elle.

-Vous les rattraperez une fois sur pied, concéda ma mère. Maintenant rendormez-vous, il vous faudra beaucoup de sommeil pour revenir sur pied rapidement.

Alésanne fit un faible sourire en réponse à Abigaël. Elle détourna rapidement son regard pour croiser le mien et une fugace étincelle apparue dans ses pupilles. Elle me fit un rapide clin d'œil. Pas deux secondes passèrent avant qu'elle ne se s'assoupisse, à bout de forces.

Heureusement qu'elle s'était rendormie avant de voir mes joues devenues rouges par la gêne.

-Emmanuel, commença ma mère en m'éloignant d'un geste vers la sortie. Maintenant que tout est clair entre nous, il va falloir partir.

-M-mais...

-Ne te fait surtout pas voir, c'est très important, continua-t-elle en ignorant mon intervention d'un signe de la main. Et suit bien Tammy, je ne voudrais pas d'un autre enlèvement à gérer.

Nous étions maintenant arrivés au seuil de la porte. Elle avait toujours sa menotte sur la poignée lorsqu'elle se rapprocha de mon oreille.

-Va accomplir la mission. On se reverra bien assez vite.

-M-mais...

Je n'ai même pas eu le temps de lui parler qu'elle ouvrit la porte et me poussa à l'extérieur.

J'atterris lourdement sur un Cadfaël complètement déstabilisé. Ce dernier sombra au sol sous le poids de mon corps.

-Oulà! Ça ne se fait pas d'atterrir sur les gens comme ça, me dit-il en tentant en vain de ce relevé du sol.

Normal qu'il n'y arrivait pas, j'étais encore affalé dessus. Je me dégageai rapidement et me remis sur mes deux pieds.

-Désolé, m'excusais-je tout en lui tendant la main, on m'a poussé assez brusquement.

D'un simple geste il fut de retour à nos côtés.

-Y'a pas de soucis. Ça été avec ta mè...

-Fini le blabla, écourta Tammy. Il nous faut vite filer jusqu'au portail.

Cette dernière avait le visage fermé et ses yeux me fuyaient sans cesse. Elle ne voulait pas me regarder en face, ce qui était très étrange. Elle devait avoir quelque chose à cacher, mais ce n'était de toute évidence pas le moment propice pour la questionner.

Ce qu'elle disait était vrai, il nous faut partir et rapidement. Parce qu'avec ce qui s'est passé tout à l'heure, il risquait d'avoir beaucoup de gardes en patrouille. Nos corps toujours couvert de sang coagulé ne passait pas inaperçu.

-D'ailleurs, lui demandais-je en commençant à marcher à ses côtés, j'espère que nous ne t'avons pas mis dans le trouble avec le chef ?

-Oh ça, dit-elle en faisant un signe de la main. Ta mère va s'arranger pour le tranquilliser. Monsieur Stein est habitué à se faire couper l'herbe sous les pieds par Abigaël.

Ça j'avais de la facilité à le comprendre, ma mère semblait être une experte en persuasion.

Nos pas commencèrent à s'accélérer jusqu'à ce que nous soyons en pleine course. Tout le long de celle-ci, nous avons heureusement rencontré personne. Le couloir était étrangement vide.

Bientôt la vieille porte en bois nous fit face. Plus que cette barrière boisée et nous serions dans le portail. Tammy prit la poignée en main et nous pénétrâmes à l'intérieur. Enfin pas tous, avant d'entrer Cadfaël m'attrapas l'avant-bras de sa poigne vigoureuse.

-Emmanuel, me dit-il en me regardant droit dans les yeux. Il faut que je te parle. Je crois...Je crois qu'il me serait préférable de continuer la route sans vous. Je ne veux pas vous ralentir, ni vous causer d'autres problèmes. Je sais que les elfes ne sont pas la bienvenue sur la plupart des mondes. Je serais plus un fardeau qu'autre chose.

J'étais sidéré face à ses paroles. Comment pouvait-il déjà nous quitter alors que nos chemins venaient à peine de se croiser ?

-Non tu ne peux pas faire ça, tu dois rester, répondis-je encore sous le choc de ses paroles.

Il me regarda tout en louchant ouvertement sur Tammy qui se trouvait à présent à l'intérieur.

C'est à ce moment-là que ça la fait tilt! Tammy lui avait dit de partir, ça j'en étais maintenant sûr. C'est pour ça qu'elle ne voulait pas me regarder en face tout à l'heure.

J'entrai vivement dans le portail. La colère grondait en moi.

-Non mais ça va pas ?! C'est grâce à lui si je suis encore en vie et si Ally l'est aussi. On ne peut pas l'abandonner comme ça ! Il est mon ami.

Tammy m'ignorait complètement et cela me mettait hors de moi. J'allais lui dire d'aller se faire voir lorsque je les ai sentis. Les picotements.

Je me retournai. Cadfaël avait refermé la porte derrière nous.

J'entendais des cris de l'autre côté de celle-ci. Les beuglements de monsieur Stein.

Nous étions en train de quitter le Conseil Universel sans Cadfaël et pire que ça, il s'était fait prendre.

Et je ne pouvais rien y faire.

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Voilà pour le chapitre 17!

J'espère qu'il vous a plus! N'hésitez pas à commenter si c'est le cas, je ne mord pas, hein!

Allez, à la semaine prochaine pour de nouvelles aventures ; P

La nostalgie des ÉtoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant