CHAPITRE 22

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Chapitre 22

Ils s'étaient tous réfugiés au Bad Joke après ce pitoyable échec. Lucy grognait depuis une heure, en râlant contre Priscilla, prétextant qu'elle aurait dû la laisser tirer sur le fameux Zsasz. Leurs mines dépitées tiraient une tronche jusque par terre. Mais ils ne comptaient pas s'arrêter là pour autant.

<<-Je pense qu'on devrait aller à la fête de nouvel an du théâtre. Tout le monde y va, ce serait l'appât parfait pour le tueur. Et au moins, on pourrait connaitre son identité.>>

Après avoir jugé l'idée quelques secondes, tout le monde doit avouer que la proposition de Priscilla est d'une logique infaillible. Ainsi tous acquiescent, prêts à poursuivre leur enquête. Finalement, Lucy se releva, dépoussiérant les pans noirs de la jupe de sa robe. Là, elle se tourna vers les autres, une moue déçue sur le visage.

<<-Bon. On se retrouve demain, de toute façon. Vous n'oubliez pas, le réveillon, chez moi, hein ?>>

Sur ces mots, son regard s'attarda sur Lylle qui avait la fâcheuse tendance d'oublier le lieu du réveillon. Sans un mot de plus, elle adressa un signe de main en guise de salutation, et s'en alla. En la voyant partir, Damian se leva. Un réflexe, il avait pris l'habitude de la raccompagner. Mais il se retint, car le froid entre eux était encore bien présent. Et alors qu'il restait planté là, elle avait déjà disparu derrière la porte. Il ne la verrait que le lendemain soir.

<<-Alors, lorsque ce matin, elle a vu la neige sur le rebord de la fenêtre, elle s'est mise à sauter partout et est venue me secouer ce matin à sept heures !!! Je vous jure, Lucy et la neige, c'est une grande histoire !>>

Et tandis qu'Edward comptait les petites anecdotes des fêtes, tout le monde riait, même Lucy se moquait d'elle-même et de ses manières enfantines. Quand on toqua à la porte.

<<-Je vais ouvrir.>>

Et sur ce, la blonde se lève, abandonnant le groupe amusé. Ses pieds chaussés de chaussettes cotonneuses et épaisses parcourent le parquet vers la porte d'entrée, s'éloignant de la lueur tangerine. Devant la porte, une légère appréhension se fait ressentir. La main tremblante, elle actionne la poignée. Elle sait parfaitement qui se trouvera derrière la porte. Ses cheveux noirs ainsi que le col de sa chemise volaient dans le vent. Elle s'écarta alors du chambranle de la porte et le laissa entrer, un faible sourire sur les lèvres. Il retira alors lentement sa veste en observant le hall décoré de gui, de houx et de guirlandes qui éclairaient la maison de petits points dorés. Tandis qu'il tenait sa veste en bout de bras, Lucy passa devant lui pour rejoindre le salon. Et la voir ainsi lui tourner le dos, le regard froid, une terrible impression de remord et de solitude lui pesait sur le poitrail. Il la retint alors par le bras, ses doigts enlaçant son poignet. A son contact, elle s'arrêta net. Lorsqu'un silence pesant s'abattit sur la pièce, elle se tourna lentement vers lui, le regard toujours aussi dur.

<<-Lucy, j'en peux plus. Je m'excuse de ce qu'il s'est passé, mais comprend moi. Je te promets que j'aurai pu le tuer, le salaud, si je n'avais pas déjà tout fait foirer entre nous. Mais j'ai besoin de toi Lucy. Merde, j'aimerai bien qu'un jour on m'explique comment j'suis devenu si dépendant ! Mais je sais, que si je te laisse te construire sans moi, c'est ma fin. Et c'est égoïste, je le sais, mais maintenant je m'en fous de ce qui est bien ou pas j'ai juste besoin de toi et...>>

Il ne put finir sa longue tirade qu'il avait prononcé d'une traite, sans reprendre son souffle, qu'elle écrasa ses lèvres sur les siennes. Très vite, ses mains pâles se mêlèrent à sa tignasse ébène, tandis que les siennes se posèrent sur ses hanches. Et d'un chaste bisous il passèrent à un baiser passionné, leurs corps tant attirés par l'autre. Lui avait besoin d'elle, comme elle avait besoin de lui, ils étaient devenus l'essence vitale de l'autre.

Quand ils se relâchèrent, à bout de souffle. Leurs corps étaient encore agités par la fougue intense de leur rapport, et, leurs fronts suintant coller à l'autre, le souffle haletant, leurs regards se soudèrent, lui transporter par l'émeraude de ses prunelles, elle se noyant dans ses iris charbonneuses. Quand soudain les rires du salon les interpellèrent. Ils se quittèrent alors, elle rajustant son rouge à lèvres et lui passant une main dans ses cheveux, avant que tout deux fasse irruption dans la salle chaleureuse.

Aussi étrange que cela puisse paraître, Damian se sentait comme chez lui. Il trouvait cette pièce particulièrement accueillante et chaleureuse, il aimait le feu qui dansait dans l'âtre, ainsi que le beau sapin joliment décoré et illuminé de guirlandes dorés ainsi que de cette étoile scintillante. Et, plus loin, la longue table décorée elle aussi. Il déposa alors sa veste sur le portemanteau qui ornait un coin, et s'assit devant le beau sapin. Sans même une seule explication, mais à voir les sourires et regards complices que partageaient Damian et Lucy, ils avaient compris que tout était redevenu comme avant. Edward, lui, se releva, et disparu derrière une porte. Pendant ce temps, les rires continuaient de résonner près du feu. Ils se remémoraient quelques souvenirs tout en se racontant des potins croustillants, mettant de cotés leurs nouvelles responsabilités d'enquêteurs.

Lorsque Edward revint, ses bras étaient chargés d'un énorme plat qu'il posa sur le centre de la table. Désormais trônait sur la longue nappe banche une belle dinde dorée et rôtie encerclée d'une couronne de pommes de terre. Un plat qui mettait l'eau à la bouche aussitôt.

<<-Vu que vous aviez loupé Thanksgiving, explique Edward, j'ai fait une dinde.>>

Et, sur ces mots, tous se précipitent pour s'asseoir autour de la table, un couvert dans chaque main. Tandis que les flocons continuaient d'emplir l'horizon sombre de la nuit, ils buvaient une coupe d'alcool, et se rassasiaient d'un plat succulent. Edward, lui, était heureux de recevoir du monde pour le réveillon. Et il aimait particulièrement le groupe de jeunes gens qu'il connaissait depuis longtemps. Il les trouvait complémentaires et un esprit de courage et de justice semblait les unir. Le repas était baigné de bonne humeur et de cette jovialité que l'on disait classique pour Noël, un des meilleurs qu'ils passèrent.

<<-Vous comptez retourner à la soirée du théâtre cette année, demande Edward entre deux lampées de champagne. 

    -Oui, répond Karen. On y ira. 

    -Je vais réserver un balcon, comme la dernière fois, précise Damian.>>

Tous acquiescent. Et alors qu'ils finissaient lentement leurs assiettes, Lylle reprit. 

<<-Dit nous, Edward. Que penses-tu de nos activités ?>>

La question étonne d'abord l'homme, qui finit sa bouchée, les yeux ronds. Il dépose soigneusement ses couverts sur les bords de son assiette, avant de croiser les mains. 

<<-Je vais être franc, c'est dangereux. Et je mets un point d'honneur à vous apprendre à différencier courage et bêtise. Mais, je pense aussi que vous êtes ne nouvel espoir de Gotham.>>

Les enfants de Gotham -Tome 1 : La Relève-Où les histoires vivent. Découvrez maintenant