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Je lance un coup d'œil à Axel qui me regarde avec tristesse, comme pour me dire "pardon", mais je me fiche de ses excuses à deux balles.
J'ai simplement envie de hurler tout en désirant pleurer jusqu'à me dessécher.

Toujours sur le pas de la porte, je déglutis péniblement en laissant mon regard se déposer sur Luka qui, je constate, a les poings serrés de colère et d'incompréhension.
On doit se poser autant de questions l'un que l'autre en percevant notre père chez les voisins alors qu'en trois mois il a prétexté avoir -trop- de boulot.
Alors qu'en vrai, il est à deux pas de chez nous. C'est littéralement du foutage de gueule.

— PUTAIN DE BORDEL DE MERDE.

C'est moi qui vient de sortir autant d'injures en si peu de temps.
Je suis dans tous mes états et pourtant personne ne semble vouloir prendre la parole alors je continue :

— QUEL GENRE DE PÈRE ES-TU ? UN GROS CONNARD DE MERDE !

— Jeanne ! gronda-t-il. Je ne te permet pas ! Parle-moi sur un autre t-

— Tu n'as aucune leçon à lui donner, me défend Luka autant en colère que moi.

Il expire bruyamment puis regarde ses pieds dans un silence trop pesant.

— Tu as raison de regarder le sol, moi aussi j'aurais honte à ta place ! je continue de brailler.

Son regard finit par croiser le mien et son expression lassé  s'évanouit rapidement laissant place à la tristesse.

— Entrez que je vous explique tout. C'est un malentendu, les enfants.

Il s'avance et s'arrête à l'embrasure de la porte, le regard désormais froncé.

— Ouh, mais c'est qu'il fait un froid de poule.

Axel se racle soudainement la gorge, celui-ci ayant préféré rester en retrait et lui souffle.

— C'est un froid de canard.

Avec Luka on se regarde en se demandant à quoi est-ce qu'ils jouent. On est en plein cauchemar éveillé.

— Hein ? demanda-t-il perdu.

Axel lui répète tandis que mon sang ne fait qu'un tour.
Je vais exploser de rage, mais Luka me prend la main et dit : "Tu as 10 minutes, pas plus."

Ses sourcils se relèvent. Il cherche ses mots, mais parvient tout de même à rester maître de ses émotions.

— Très bien, faisons vite alors.

— Oh ! Mais c'est la petite voisine et Luka, c'est ça ? annonça Karen comme si tout roulait comme sur des roulettes.

— Bonsoir Karen. Désolé mais on a pas le temps de rire.

— Qu'est-ce qu'il se p... Oh, merde, lança–t–elle le regard perdu. Tu ne leur avait rien dit ? elle s'adresse à mon père tandis qu'il lui demande de nous laisser.

On s'assoit rapidement, j'ai les jambes qui tremblent et cette fois-ci ce n'est pas de plaisir, mais de rage.
Oui, d'une rage profonde, très profonde.
Une colère qui me donne envie de dire un tas de gros mots que je n'ai jamais osé dire à haute voix.

— Alors par où commencer..., dit-il en réfléchissant à haute voix.

— Peut-être par, pourquoi tu es là ?

— Je vois Karen depuis quelque temps, avoua-t-il sans perdre une seconde.

Mon cœur se renverse dans ma poitrine et mon regard vient s'abattre sur Axel qui est toujours en retrait.

— Tu veux dire que tu te la tapes, rectifia Luka.

— Parles autrement déjà, s'énerva Axel en faisant un pas en avant.

— Et si j'ai pas envie ?

Luka hausse le ton et se positionne sur ses deux pieds avant de poursuivre à nouveau :

— Si j'ai envie de dire que ta mère se fait défoncer par mon père, ça te pose un problème ?

Axel hurle quelque chose que je ne comprends pas tout de suite et traverse le salon d'un bond en apportant son poing contre la mâchoire de Luka qui tombe à terre.
Mon père vient les séparer tandis que mon corps se braque à chaque fois que je dois assister à des scènes violentes.

Je suis une âme fragile, oui.

Il est impossible pour nous de discuter alors je prends mes jambes à mon cou et me dirige à l'extérieur en laissant toute ma colère s'évaporer.

— ALLEZ TOUS VOUS FAIRE FOUTRE BANDE DE PÉDALES DE MERDE !

Je hurle cela dans le vent et respirant affreusement fort.
Ma bouche est sèche, j'ai du mal à avaler et cela ne s'arrange pas lorsque j'entends des pas provenir dans mon dos.

Je me retourne et prie mentalement pour que ce ne soit pas mon père.

— Axel.

Sa mâchoire se contracte et grâce au lampadaire, j'arrive à déceler une expression qu'il mérite d'avoir plaqué sur le visage.
Une profonde tristesse dans ses yeux m'attaque quand je le fixe d'un regard rempli d'amertume.
C'est alors que je lui pose la question sans même réfléchir.

— Tu étais au courant pas vrai ?

— Non.

Sa réponse est rapide. Trop rapide.
Je fronce alors des sourcils, certaine qu'il me ment.

— Si. Je le savais.

Ma peine et ma colère refont aussitôt surface ce qui m'ordonne de baisser les yeux, n'arrivant plus à soutenir son regard plus longtemps.

— Mais ça ne change en rien, s'empressa–t–il de dire.

— Ça ne change rien ? Tu te fiches de moi. Ça change tout !

Son regard devient encore plus sombre qu'il y a quelques secondes auparavant.

— Alors pour toi, parce que nos parents s'envoient seulement en l'air, tu veux tout arrêter ?

Je me crispe à l'entente de ses mots, mais soutiens de nouveau son regard.

— Ils sortent ensemble, Axel. Et tu risques d'être mon-

Il fait un grand pas vers moi et me pointe du doigt méchamment.

— Si tu oses dire que je risque d'être ton demi–frère je te jure que...

— Que quoi ? Tu me jures que quoi ? Tu vas pénétrer chez moi pour me faire peur encore plus que tu ne le fais déjà avec tes foutus cadeaux à la noix !

Ce n'est pas ce que je voulais dire.
Ma colère à parler pour moi et je m'en veux d'avoir ouvert la bouche trop rapidement. Lorsque j'examine l'expression sur son visage : il est affligé par mes paroles.
Je sais que je viens de lui faire mal et j'avance d'un pas pour m'excuser, mais il en recule de deux.

— Axel, excuse-moi je ne...

— C'est bon, Jeanne. Rentre chez toi, il se fait tard, dit–il durement.

Je ravale alors mes émotions et fais demi–tour, direction la maison.

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Merci pour vos votes, ça me fait si plaisir !✨

N'hésitez pas à aller voir mes autres histoires, celle-ci étant bientôt (bientôt bientôt) fini ❤️

Gros bisous !

Ma première foisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant