Ne me laisse pas tomber

20. Mélina

Média: poster de Robert Pattinson.

Quatrième semaine en enfer.

Maman,

J'ai bien reçu ton dernier mail, et je sais que j'ai mis un peu de temps à te répondre, mais tu ne peux pas me demander de revenir sous prétexte que je te manque. Il fallait y penser avant.
Néanmoins, je ne veux plus me disputer avec toi. Tu m'as laissée partir, mais tu n'avais pas le choix et je te comprends sur ce point. Je ne considèrerai plus jamais ton mari comme mon père, et ça je sais que tu es capable de l'accepter.
Je veux que tu saches que tu me manques beaucoup, et j'aimerais sincèrement que l'on se revoit Maman car je n'arrive plus à tenir le choc.

J'efface cette dernière phrase en sentant une larme rouler sur ma joues. J'écris à la place:

Tout va bien, ici, je suis entourée par beaucoup de monde et je m'en sors parfaitement bien en ce qui concerne mes études.
Cordialement,
Mélina.

J'envoie tout en reniflant un bon coup. Je regarde mon fond d'écran qui se trouve être Robert Pattinson, et je lui demande d'une voix désespérée:
- Qu'est ce que tu aurais fait, toi, à ma place ? Tu y serais allé où tu aurais tout simplement menti, comme moi ?
Ses yeux me regardent, mais j'ai vraiment l'impression de parler à un mur. Soudain, comme par magie, toujours présent lorsque j'ai besoin de lui, un message d'Adrien apparait. J'ai le mauvais pressentiment qu'il adopte la magie noire ou que ce soit un devin pour être là dans les moments les plus intimes de ma vie. Il est bien plus doué que moi pour percer les secrets des autres. Je n'ai toujours pas commencé mon enquête...
Ils étaient comment tes parents ?
Pourquoi cette question maintenant ?
J'ai un petit doute sur sa vraie identité. Serait-ce un vampire ? Comme dans Twilight ?!
Parce que j'ai relu ton blog de lundi dernier, re pourquoi cette question ?
Je suis très surperstitieuse.
Et si je te disais que j'étais un vampire tu réagirais comment ?
NAAAAAAAAAAN, JURE !!!!
C'est bien ce que je pensais, t'es plus décalée que moi.
Je rigole toute seule au lieu de m'énerver comme à mon habitude. Il reprend:
Du coup tu n'as pas répondu à ma question.
Jamais.
Et pourquoi pas ?
Et pourquoi je te le dirais à toi ? Tu es spécial, c'est ça ?
Tu avais remarqué ? On est trop spéciaux, toi et moi, on devrait faire des bébés spéciaux...
Je commence à prendre cette discussion un peu trop au sérieux, ce qui n'est pas rassurant du tout.
Mais dans tes rêves ! Je vais me coucher.
Il est 18 heures.
Et alors, je fais ce que je veux, je suis seule chez moi.
Et pourquoi ?
Bon sang, il est très fort... et je décide même d'abandonner juste parce que pour une fois dans ma vie, j'ai terriblement envie de me confier. Et peut-être qu'il fera la même chose avec moi.
Si je te raconte tout, tu promets de me laisser tranquille après ?
Mieux vaut ne pas trop lui forcer la main, il risquerait de s'en apercevoir...
Marché conclu, Moulinet.
Ok... par message, tu es sûr ?
Tu devrais te réjouir.
Tu as raison. En faite, j'ai vécu avec ma famille pendant 16 longues années dans l'ignorance. Parce que tu vois, un jour comme ça sans prévenir, j'ai su que j'avais été adoptée. Et c'est très dur de l'apprendre en tombant sur une lettre de sa véritable mère...
Il met un peu plus longtemps que prévu à me répondre.
Merde.
Quand je l'ai appris, j'ai littéralement piqué une crise. Et puis j'ai commencé à hurler sur ma mère qui essayait de me raisonner, mais mon père est intervenu. J'ai reçu la plus grosse gifle de toute ma vie, et j'en ai encore la joue douloureuse rien que d'y penser. Enfin, j'ai pris quelques affaires et je me suis tirée d'ici en cassant le verrou de la porte.
J'ai l'impression d'avoir déjà raconté cette histoire un milliard de fois, mais avec Adrien, c'est différent. Tout m'a l'air plus différent avec lui.
C'est vrai ? Tu as cassé le verrou ??!
C'est bien ce que je disais... il voit tout sous un autre angle.
Oui.
Et là ta mère t'a recontactée ?
Je m'écarte le plus vite possible de mon ordinateur, la main plaquée sur la bouche. Comment fait-il pour deviner tout ce qui se passe dans ma vie ? Il écrit:
C'était marqué sur ton ancien blog...
Ah, j'ai eu peur.
Tu devrais lui répondre.
J'émets un petit temps de réaction.
Répondre à ma mère ??! Mais pourquoi ?
Parce que la famille, c'est important. Du jour au lendemain, elle peut partir. Et c'est là que toi tu auras des regrets. Les regrets, il faut les avoir avant que ce ne soit trop tard sinon ça ne sert à rien.
Je ne réponds plus. À la place, je retourne dans mes mails et je renvoie un message à ma mère:

Tu me manques, Maman. J'aimerais beaucoup que l'on se revoit. Dis-moi une heure au hasard et je m'arrangerai pour être libre. Je t'aime.
Ta fille, Mélina.

Je ne peux pas dire ce qu'il se passe dans ma tête. Je ne peux pas décrire ce qui me serre la poitrine dans une douleur presque sourde, qui se transforme en un plaisir infini. Tout ce que je pourrais dire, lire, ou écrire ne seront plus de simples mots, mais une réalité. Ce qui m'inspire: la vie, et rien d'autre. Ce qui me permettra de m'évader enfin sera le bienvenu, sauf s'il s'agit de la mort. Car périr n'est pas la meilleure façon de mettre fin à ses souffrances... les contrer et leur faire face pour enfin les anéantir, oui. Mourir n'est rien d'autre qu'un cri d'agonie qui se répète indéfiniment en nous. Mais je souhaiterais disparaître tout simplement, alors que ce que je veux réellement, c'est être retrouvée...
Ah oui, et Adrien est le meilleur professeur du monde.