21. Adrien

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Fin du mois de Septembre.

J'ai été chez Mr Millet, aujourd'hui. Il a tout de suite deviné que j'avais recommencé à fumer, mais j'ai nié la vérité jusqu'au bout sans relâche. Je suis ce qu'on appelle communément un survivant. Il m'a encore demandé si Mélina et moi, nous sortions ensemble, et je lui ai dit d'arrêter d'espérer. Tout comme moi, en faite... une fille de ce genre ne pourra jamais être la petite copine d'Adrien Anderson. C'est une autre classe sociale que la mienne. Et ça a donné une conversation du genre: "vous avez revu votre père, ces derniers temps ?", et j'ai répondu:
- Oui, mais il m'a encore tabassé...
Il avait l'air confu, mais je ne suis pas totalement dupe généralement. Il fait surement semblant d'avoir pitié de moi juste pour garder sa place. C'est ce qu'on appelle un faux cul.
- Savez-vous, Anderson, que vous pourriez porter plainte ?
- Pff, c'est déjà fait. Quand ma mère avait eu la mâchoire défoncée. Ça n'a servi à rien, je vous dis.
Il a fait mine de réfléchir d'un air très grave, puis il a enchainé sur un autre sujet. Il devait sans aucun doute être à court d'idée... un peu comme la dernière fois et l'avant dernière fois. Après ce petit rendez-vous qui n'a servi à rien, je me suis rendu compte que les seuls cours ou je peux voir Mélina sont le français et l'histoire, mais hélas le mardi fait parti des jours qui ne compte pas ces matières dans mon emploi dû temps s. Alors, à chaque fin d'heure, je cours à toute vitesse dans les couloirs en m'aidant de mes grandes jambes pour arriver à la sortie de son cour. Personne ne semble me voir alors j'en profite. C'est facile d'être là à temps lorsque l'on a discrètement photographié son emploi du temps... oui, je suis un vrai psychopathe. À chaque fois que je me pointe devant elle, il y a un mélange de surprise et, je l'espère, de joie sur son visage. Elle s'écrit:
- Adrien ! Qu'est ce que tu fais là ? Tu vas être en retard à ton prochain cours !
Et je rétorque en lui répondant avec ce pitoyable accent écossais:
- Tu me prends pour qui ? Je ne peux pas suivre tout un cours sans t'avoir vue avant !
Et a chaque fois encore, elle rigole en rougissant à vu de nez. Enfin, de moins au moins au fur et à mesure que je fais cette blague. Mais lors de la cinquième sonnerie, je me remets à courir encore plus vite sans avoir eu le temps de noter la fin de mon cours, me faufilant entre tous les lycéens aussi agilement qu'un chat. Malheureusement, je percute Valentin de plein fouet, qui fait tomber Léonie par terre. Elle pousse un grand cri, et je détale à vive allure avant qu'ils ne s'aperçoivent que c'était moi le fautif. J'arrive finalement devant Mélina sans plus d'encombre, haletant de fatigue. Elle me regarde d'un oeil noir en train de m'étouffer sur place.
- Je peux savoir pourquoi tu fais ça ?
Rien qu'au ton de sa voix, je sens que ça va être ma fête... je décide de la joue admirateur:
- C'est juste parce que je voulais te voir au moins une fois aujourd'hui...
- Ah oui ? Une fois, t'es sûr ? Parce que j'ai plutôt l'impression d'avoir un psychopathe en face de moi, là !
Mes doutes ont donc été confirmés. Je passe à l'offensive en m'approchant d'elle de plus en plus, si bien que son dos se retrouve collé au mur grisâtre du couloir. Je me mets à murmurer d'une voix extraordinairement sexy, un peu comme Robert Pattinson dans Twilight ( oui, j'ai revu ce film hier soir... ). Je me mets dans la peau de Justin Bieber draguant Selena Gomez.
- Il va falloir t'y habituer, Moulinet, parce que je ne vais pas te lâcher...
Je constate avec dépit qu'elle regarde aux alentours, comme si quelqu'un qu'elle connaissait se trouvait dans les parages. Je me sens très offensé.
- Je te fais honte, c'est ça ?
Mon visage est très, très près du sien. Elle doit chercher une sortie de secours à l'heure qu'il est.
- Euh... non... enfin je crois...
- Il vaudrait mieux pour toi que tu ne crois rien du tout...
Je m'attends à ce qu'elle me repousse, ou même qu'elle me crache dessus, mais rien. J'observe ses merveilleux traits de visages avec des yeux complètement hypnotisés. Elle ferme les yeux comme si la fin du monde était proche, sa tête est enfoncée dans le mur au maximum. Mes mains sont de chaque côté de son visage, et je décide de tendre les lèvres d'une façon pas franchement très professionnelle. Mais c'est la première fois que je tente d'embrasser quelqu'un qui me plait réellement, il faut me comprendre... mais, alors que nos lèvres étaient prêtes à se toucher, mon professeur de sport me tire par le T-shirt en hurlant:
- Hé vous deux, au lieu de vous bécoter vous feriez p'tête mieux d'aller en cours, non ? Ça vous f'ra une heure de colle chacun. Maintenant. Allez allez, j'ai pas qu'ça à faire !
Le visage de Mélina se décompose, et elle me fusille du regard que j'imite sans aucune hésitation. Nous entrons tous deux dans la salle d'étude, et la surveillante n'a rien d'autre de mieux à faire que de nous demander d'une voix sévère:
- Alors, qu'est ce qui vous amène ici, hein ?
- Demandez à Anderson, maugrée Mélina.
Je lui tire la langue.

Ne me laisse pas tomberOù les histoires vivent. Découvrez maintenant