Chanyeol, lui ne pleurait jamais, on aurait dit que ça ne lui faisait ni chaud ni froid cette histoire mais moi, je savais que ça l'affectait beaucoup aussi. Seulement, lui a toujours su prendre du recul et trouver des solutions, pour lui, rien n'était sans issue.
C'était la fin de la troisième, après les examens du brevet que Chanyeol et moi avions obtenu sans problème. Les choses n'avaient pas changé, à peine passés le portail en métal grisonnant, nous avions déjà sauté sur notre skate et zigzaguions agilement entre la foule d'élèves s'amassant sur le trottoir qui ne se souciaient pas de gêner notre passage.
Le village voisin était plus grand que le notre, alors c'est là qu'ils ont construit le collège. On pouvait rentrer chez nous en autobus parce que c'était assez loin mais pas une seconde on avait hésité à rayer cette possibilité. Il allait de soi que l'on préférait de multiples fois filer comme le vent, celui-ci nous frappant le visage et faisant prendre son pli à notre short et tshirt. Alors, sur la piste cyclable, il y avait deux grands, qui filaient à toute allure et ne faisaient qu'accélérer vers cette liberté, quittant ce petit collège d'à peine cent élèves, sachant qu'ils ne le reverraient plus jamais, ou peut-être pendant leurs années de lycée, pour se rappeler des souvenirs. Ces deux grands là, c'était nous, Chanyeol qui avait encore beaucoup grandi et presque atteint sa taille d'adulte, le médecin disait entre un mètre quatre-vingt-cinq et un mètre quatre-vingt-dix et moi, qui ai eu la chance d'avoir en quatrième, une explosion soudaine de croissance, qui m'a fait atteindre en à peine un an ma taille adulte, d'un mètre quatre-vingt-quatre. Nous étions les deux adorables petits casse-cou du collège et maintenant, nous étions les deux grands maîtres du skateboard selon les autres collégiennes surtout.
Durant ces années de collège, beaucoup de filles du même genre que la copine de Jongin ont voulu se rapprocher de nous et, c'était drôle, mais on l'acceptait, puis on passait notre temps à faire du skate et à parler en l'ignorant totalement si bien que les plus patientes de ces potiches partaient en faisant ridiculement voler leurs cheveux pour donner l'impression aux autres d'avoir un semblant de dignité. Il fallait les remettre à leur place ces filles qui se prenaient pour des reines et qui pensaient que tout leur était dû. Alors ça nous faisait beaucoup rire. On voulait pas de filles, on était mieux tous les deux, entre frères de skateboard. Je me souvenais de cette fille qui avait un petit béguin pour Chanyeol et dès qu'elle l'approchait, je l'écartais de lui en sentant une pointe de colère s'immiscer en moi. Je ne me suis même pas posé de question, dans mon esprit, la réponse était évidente "C'est mon meilleur ami, point. Vire tes mains crasseuses de lui" . Et cette conne a osé me faire des réflexions du genre "Vous seriez pas pédés vous? " alors j'ai regardé Chanyeol, sans comprendre, il m'a juste dit "Comme le prof d'histoire" et nous avons littéralement explosé de rire. En plein fou rire, Chanyeol lui lâcha le plus naturellement possible de sa voix extraordinairement grave "Allez, casse toi va". C'était en troisième, et la fille avait l'air plutôt sincère et gentille, mais lorsque j'ai vu comment elle regardait mon meilleur ami, elle aurait beau avoir toute la sincérité du monde, c'était niet. On touche pas à mon Chanyeol.
De toute façon, les filles aussi sympathiques soient-elles, ça ne m'intéressait pas. Tout ce que je voulais garder pour toujours, c'était mon skate, ma passion pour le skate, et mon meilleur ami.
Dès que nous étions arrivés au pied de la rampe, nous avons calé nos skates contre le bois et pris tous deux d'une chaleur accablante, nous avons quasiment arraché nos vêtements et avons sauté en sous-vêtements sans hésitation dans l'étang. Nous faisions des allées et venues d'une berge à l'autre de l'étang qui n'était pas très vaste, quatre-vingt mètres entre deux berges tout au plus, ça se faisait facilement. Et puis, Chanyeol était un nageur, sa mère l'a obligé à nager dès son plus jeune âge; il avait d'abord appris à ne pas se noyer, puis à souffler dans l'eau, les petites nages comme la brasse. Il a ensuite appris les autres nages et quand il a maîtrisé ces nages, il a commencé à apprendre à nager vite, de plus en plus vite puis contre le chronomètre. Depuis trois ans, il fait des compétitions auxquelles j'assiste encourageant rageusement mon meilleur ami, il gagnait, il faisait des temps de sélection, un vrai dauphin. Il m'a appris à bien nager moi aussi, même si je ne saurai jamais nager aussi vite que lui, je pouvais sans problème faire plusieurs allers-retours dans l'étang parce que j'étais endurant, du moins c'est ce que Chanyeol m'a dit. Exténués et rafraîchis, on sortit de l'eau détrempés et en caleçon, étendus sur le dos dans l'herbe douce sur la berge, séchant au soleil qui tape fort sur nos poitrines. Nous nous sommes endormis, à deux mètres l'un de l'autre, les bras en croix. Pendant une fraction de seconde, je manquai de me relever en sursaut, de peur d'arriver en retard quelque part où l'on nous attendait, puis je me souvins que nous étions en dernier jour de collège, que tout était fini, que pour une certaine durée personne ne serait en droit de vérifier notre assiduité, de nous sanctionner, de nous reprocher quoi que ce soit. Mon coeur se calma rapidement alors que je clos les yeux une nouvelle fois, les protégeant du feu.
-Sehun? ce fut Chanyeol qui brisa le silence de sa voix grave.
-Mmh... répondis-je
-Tu crois qu'on ira en internat? Comme Jongin?
J'ouvre grand les yeux et me redresse sur un coude en me tournant vers ce grand bêta qui fixait encore le ciel dénudé, ignorant le soleil susceptible de lui détruire la rétine.
-Ça voudra dire plus de skate la nuit, plus de skate la journée, parqués dans des petites chambres où des piafs vont nous regarder travailler et nous serrer au moindre craquement. Pour moi, c'est hors de question.
Je refuserai toujours d'aller dans un internat, j'ignorais pourquoi mais j'associais ça à ce qu'est devenu Jongin parce que j'étais certain que s'il n'y avait pas été et qu'il revenait tous les soirs faire du skate, il n'aurait pas arrêté d'aimer ça.
-Moi non plus je n'ai vraiment pas envie mais je sais pas si on aura le choix.
Rien à faire, et puis de toute façon il n'y avait aucune raison d'y penser maintenant.
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No One Will Know || chanhun
Fanfiction"J'avais à peine quatre ans, à l'école des mioches comme tout le monde, à me dépatouiller pour empiler ces blocs aux couleurs de l'arc-en-ciel. J'étais insouciant, à ce moment là. Je jouais, dessinais, courais, criais, mangeais mon goûter puis faisa...