Léon regardait autour de lui dans la chambre d'hôtel, gêné, tandis qu'Adja installait une caméra sur un trépied pour filmer ce qui allait suivre.
« Je ne pense pas avoir été buvable une seule seconde dans cette pièce avec toi, marmonna-t-il.
— Je t'ai déjà dit que je comprenais très bien pourquoi tu trouvais de nouveaux moyens de me faire du chantage pour rester dans la Maison Dormeaux, pas la peine de t'excuser toute la semaine ! On va faire une belle enquête, et par la même occasion une très bonne vidéo. Ça pourra aussi intéresser mes abonnés de nous voir nous disputer et repartir de zéro, pas vrai ?
— Peut-être... J'ai été un peu méchant en parlant de ta relation avec Sylvana, par contre, et ce n'était pas indispensable. Je trouve ça bizarre, c'est tout. »
Moi aussi, Léon, moi aussi. Adja lança l'enregistrement.
« De retour dans la chambre d'hôtel... Nous allons regarder ce que l'armoire d'Elisa Dormeaux contenait. J'avais caché ces objets à Léon, mais vous avez bien compris que la situation a totalement changé. On va commencer par l'album... »
Adja ouvrit le livre et poussa une exclamation de joie. L'album contenait des dizaines de photographies, à une époque où elles n'étaient pas spécialement bon marché. La majorité d'entre elles montraient la Maison Dormeaux sous différents angles à plusieurs stades de construction.
« Il y a des informations derrière, dit Adja. J'ai l'impression que des architectes photographiaient la maison au fur et à mesure et envoyaient les clichés aux Dormeaux pour leur montrer où ils en étaient. Je vais les filmer de près, au cas où ça intéresserait certains d'entre vous. »
Léon participa à la vidéo en approchant de l'objectif chaque photographie. Ses mains tremblaient légèrement. Je crois que les spectateurs vont devoir mettre la vidéo sur Pause pour y voir quelque chose, mais bon... Ils étudièrent en détail toutes les autres photos, qui montraient exclusivement les six mêmes membres de la famille Dormeaux. Adja aligna quatre clichés d'Alphonse Dormeaux et de son épouse dont le prénom était enfin indiqué : Aimée.
« Alphonse Dormeaux, Aimée Dormeaux, répéta Adja.
— Elle était très belle, dit Léon en retournant l'une des photographies. Elle est décédée en 1882, regarde...
— Mon Amour, 6 juillet 1882, vous partez, lut Adja en faisant la moue. C'est triste... Mais elle n'a pas eu le temps de voir toute sa descendance mourir, ceci dit. C'est peut-être mieux comme ça. »
Ils comprirent que les trois quinquagénaires étaient les enfants d'Alphonse et Aimée, et qu'ils se nommaient Elisa, Georges et Jules. Georges était le père de Sylvana, d'après deux photographies montrant la petite fille sur ses genoux.
« Elle fait moins peur que ce que tu avais trouvé dans la chambre des grands-parents, commenta Léon. On dirait une petite fille normale, pas une apparition étrange...
— Ne le pense pas devant elle, elle le prendra très mal. »
Adja sentit alors son estomac se tordre.
« Je ne sais pas comment cacher à Sylvana que son grand-père n'est pas parti... Elle lit dans les pensées et elle comprendra tout ! »
C'est cruel, quand même. Elle n'a discuté avec personne depuis des siècles, elle ne sait même pas que son propre grand-père vit avec elle depuis tout ce temps, et je vais devoir l'inonder de paroles pour ne pas lui permettre de me comprendre. Léon lui posa une main sur l'épaule.

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« Dors. »
ParanormalAdja est une chasseuse de fantômes... mais ses vues et commentaires sont dus à son excellent montage dynamique, pas à ses talents de chasseuse. Adja n'a en effet jamais immortalisé de phénomènes paranormaux et n'hésite pas à extrapoler le moindre br...