Devil of liberty

Chapitre 3 : La forêt sacrée

Le lendemain, Shô m'a réveillée de bonne heure. Il a prétexté qu'il ne veut pas me laisser seule à la maison. Ce qui bien évidemment est une excuse bidon puisque la veille, je suis restée alitée toute la journée et je ne pense pas qu'il soit resté sagement assis à regarder les mouches voler. Je me suis habillée en vitesse lorsque je l'ai entendu rouspéter en bas des escaliers et qu'il me menace de m'abandonner sur place. Sans attendre, j'ai bondi de mon couchage et l'ai rejoint en quatrième vitesse. Si bien que j'en ai oublié ma cape, ce qui a provoqué chez lui un râle de désespoir. Je ne suis clairement pas habituée à me préparer aussi rapidement, au manoir, j'avais Printium qui m'aidait à me coiffer et Aurianne pour me vêtir, mais ici, je suis seule. Shô a récupéré les chevaux et paye un homme avec une pièce d'or. Nous nous sommes mis en selle et avons repris notre périple en direction du Sud cette fois-ci. Comme monsieur est grincheux, il n'a pas décroché un mot de la matinée. Et ce n'est que vers midi lorsque nous nous sommes installées sur le rebord d'un muret pour manger qu'il a daigné me parler. Une chevelure rouge que je reconnais aussitôt s'est immiscée dans notre duo.

— Alors comme ça, tu comptais partir sans dire au revoir, mon vieux Shô.— Hmm...— Monsieur est grincheux à ce que je constate, et toi ma petite, tu ne voulais pas me revoir ?— Je ne savais même pas où nous allions jusqu'à maintenant.— Ce n'est pas vrai, il ne t'a rien indiqué ?— Hivernelle, il faudra qu'on parle de l'incident d'hier à la boutique. Eva, je suis désolé, mais les conditions actuelles me presse. Tu sais bien que tu es la bienvenue chez moi si tu en as besoin. Cependant, je n'ai pas beaucoup de temps devant moi. Nous devons disparaître au plus vite hier soir, j'ai vu des vampires rôder auprès de l'auberge, je pense qu'ils ont senti la présence de la petite.— Hé bien, ils n'ont pas traîné ses fumiers. Bon, comme convenu, tu vas pouvoir monter sur l'Esperanza en direction de l'île de la brume.— Merci Eva.— De rien mon vieux, je te dois bien ça. L'embarcation se fait vers quinze heures, cette fois.

Sur ces mots, la jeune femme est partie en direction de la ville. Moi, je suis restée silencieuse. Shô semble très anxieux de la découverte qu'il a faite ce matin. De plus, le ton qu'il a employé pour me rappeler les derniers événements me fit taire pour le reste de la journée au moins. Nous grimpons à cheval et allons vers le port où se trouve notre embarcation.

Un vieil homme tenant une plume à la main et une pile de feuilles dans l'autre contrôle tout ce qui monte sur le navire. Shô s'avance près de lui et lui explique qu'il vient de la part de la jeune femme aux cheveux rouges. Ni une ni deux, nous sommes à bord du bateau. Une cabine nous a été réservée. Deux couchages, qui ont l'air plus confortables que ceux de la veille, s'offrent à nous. Je n'ai pas hésité une seconde à me jeter sur celui le plus proche de la vitre et à me rouler dans les draps pour en savourer la fraîcheur. Shô quant à lui est plus lent, il défait ses bagages, retire ses chaussures et son blouson avant de s'asseoir au bord du lit.

— La traversée se fait de nuit, ne sort de la cabine sous aucun prétexte, est-ce clair ?— O.K. promis, de toute façon, je suis trop fatiguée, je veux juste dormir.— Je suis sur le pont si tu as besoin de quoi que ce soit, il faudra que tu attendes que je revienne.

Que dire de plus que oui, en tous les cas je n'aie plus aucune force pour protester ? D'instinct, j'ai su que les prochains jours allaient être tout aussi épuisants pour moi. Je suis allongée sur le dos en étoile de mer, mais Morphée a visiblement du mal à se montrer. Alors comme toutes les fois où je n'arrive pas à dormir, je me mis à fredonner une mélodie que je connais bien, le tout en jouant avec mon collier. Finalement, ce n'est que deux heures plus tard au moment où le bateau a quitté le port que mes yeux ont bien voulu se fermer.