30. Retrouvailles

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Marine ne semble pas du tout avoir été blessée.  Elle a réussi à grimper plus facilement que moi, alors même que l'endroit où elle se trouve est bien plus périlleux que le mien. La tôle d'acier se tord sous son poids, formant un creux sur toute la largeur du toit. 

Nos poursuivants ne sont qu'à une ou deux minutes de nous. Il ne nous reste que très peu de temps pour sauter, mais la voiture va encore trop vite pour nous précipiter à terre. 

Nell est la première à bondir, et se réceptionne avec une roulade parfaitement réalisée.  Elle s'élance ensuite à nos côtés,  suivant la bande d'arrêt d'urgence.  Il est vrai que sa vitesse est très impressionnante,  et je suis sûre qu'elle se déplace aussi rapidement qu'un guépard.  Feii la suit de près, et atterri de la même manière.  Le véhicule ralenti encore, il ne reste que quelques secondes avant d'être attrapés par les autorités. Marine saute à son tour,  et se redresse avec un peu plus de difficultés.

Je ferme les yeux et fait le vide dans ma tête.  

C'est mon tour. Mes pieds quittent leur support, et je redoute la collision avec le bitume. Pourtant, mon corps sait parfaitement comment réagir, encore une fois. Je me cogne néanmoins le bras, et une légère douleur vibre dans tout mon corps,  comme pour me rappeler que ce n'est pas totalement guéri.  

Je me redresse et rejoins les autres, passant derrière la Mustang qui ne s'est pas encore arrêté. Marine ferme la course, et je prends place à sa droite.
Un sourire se dessine sur mes lèvres.  Je ne sais pas vraiment pourquoi,  mais je ne peux pas m'en empêcher.  Peut-être que maintenant,  je suis fière d'être qui je suis.

Veenyr et Eniel nous rejoignent, et nous continuons jusqu'à être à l'entrée du bouchon.
Il nous est impossible de nous enfuir de la route pour le moment,  puisque derrière l'accotement,  la terre s'écroule dans le vide, formant une falaise haute d'une bonne dizaine de mètres.  La seule solution reste donc de slalomer entre les voitures à l'arrêt.  

Soudain, une douce voix, que je connais bien attire mon attention. 

- Ninah ! 

Je fais volte face, découvrant une douzaine personnes avec des fusils pointés dans notre direction.  Leur aspect me rappelle immédiatement celui des documentaires animalier. Ceux qu'on utilise pour endormir les animaux,  pour les empêcher de bouger. 

Mais ce qui attire mon attention est la femme brune au milieu de ce vacarme. Vêtue d'un Jean et d'un simple T-shirt jaune, cette couleur qui lui va si bien, elle pleure. Les larmes dévalent ses joues à toute vitesse,  et elle se met à trembler. Les mêmes bras qui m'ont enlacés, quand j'étais tombée,  quand j'avais réussi quelque chose d'important,  les mêmes lèvres qui m'avaient souri pour m'encourager,  me montrer à quel point elle était fière de moi. La voir ainsi me donne un affreux pincement au cœur. Ses magnifiques yeux sont affreusement cernés,  comme lorsque j'étais à l'hôpital.  Elle paraît si petite, en portant ses baskets, elle, qui d'habitude adore les escarpins. 

J'ai envie de faire demi - tour,  de lui dire que tout va bien, que je vais revenir à la maison. Je veux la prendre dans mes bras comme elle le faisait quand j'étais petite,  je veux que ses larmes disparaissent.  

Je ne pensais pas que ça ferait si mal, de la voir dans cet état.  Elle, qui est venue en sachant que je suis différente.  Elle m'aime toujours,  malgré le fait que je vienne d'un autre monde, je le constate aujourd'hui.
Le vent emmêle ses cheveux,  et elle met ses mains sur ses épaules comme si elle avait froid.
Nous nous regardons un long instant, et elle fait un pas, puis deux. 

Un objet rouge rebondit sur le sol, devant mes pieds. Quelqu'un a tiré sur moi. Je jette un regard noir à l'assemblée d'humains qui me fait face. Ils ont brisé un instant de confiance qui aurait pu les faire gagner. On m'attrape le bras, et je rejoins les autres, alors que ma mère s'écrie :

Sul'Een T1: Les Sanglots De L' ÂmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant