18. Denitsa

962 55 23
                                    

Ses bras recouvraient encore mon frêle corps tremblant. Son souffle volait dans mes cheveux au rythme frénétique de son torse qui se soulevait de manière incontrôlable. Je ne sais pas ce que j'étais censée faire. Alors je ne faisais rien. Rien du tout. Mes bras pendaient contre mes flancs sans vie.
'' - Denitsa il faut vraiment qu'on parle.
- Et si je n'en ai pas envie ?
- Je sais être convainquant. '' je me détachais de lui et le regardais dans les yeux. Bon concrètement je ne savais pas quoi faire. Bien sûr que j'avais envie de parler avec lui. Bien sûr il faudrait que je sois complètement conne pour pas vouloir ça. Mais je n'avais pas pour autant envie de lui parler là tout de suite. Non actuellement j'avais envie de prendre mes jambes à mon cou et plus me retourner. Parce que je savais parfaitement que je devais oublier ce type qui n'était et ne sera jamais capable de me rendre ce que je voudrais. Pourtant, quelque part je savais que ce besoin exclusif d'amour pouvait être déjoué. J'avais plus besoin de lui que de me sentir aimée. Je savais que je pouvais me contenter de ce qu'il voulait bien me donner. Je jouais juste l'égoïste de service.
'' - Déni pourquoi tout est devenu si compliqué entre tout d'un coup ? Putain moi j'ai pas compris quand j'ai trouvé ce mot. Pourquoi t'es partie ? Pourquoi tu fuis encore ? Denitsa ! '' Je n'avais même pas attendu la fin de sa phrase que j'avais déjà tourné le dos.

Devant moi les bâtiments se ressemblaient. J'avançais sans même faire attention où je voulais vraiment aller. Je me dirigeais donc tout naturellement vers mon studio, ravie que Rayane ne m'ait pas suivi. J'avais clairement envie d'être toute seule pour les prochaines heures. Il était tôt vu que j'avais quitté les répétitions comme une furie. Je savais d'avance que Maxime serait furieux mais concrètement j'en avais rien à carrer de ça, de tout en fait. J'avais l'impression que plus rien n'avait d'importance dans ma vie. Tout sauf lui. C'était moche, très moche. Mais quoi ? Je pouvais rien y faire.

La porte s'ouvrait puis se fermait derrière moi. Mon salon aurait dû m'accueillir à bras ouverts, mais non. Non j'étais chez moi sans vraiment l'être. Ça pesait pas vraiment sur mon moral d'me sentir hors de mon propre corps. J'avais juste cette putain de désagréable sensation que la vie me filait entre les doigts et que je pouvais rien y faire. Rayane avait le droit de faire tout ce qu'il voulait. Il n'était pas à moi. Il n'était à personne d'ailleurs. Mais je savais parfaitement ce qui me troquait - sans que j'y fasse vraiment attention dans ma foutue tête. Je supportais pas l'idée qu'il ait embrassé quelqu'un d'autre. Même regardé une autre femme. Ça me mettait dans des états seconds. Alors que ça n'avait pas lieu d'être. En fait je crois que j'avais besoin de savoir qu'il était toujours seul. C'est égoïste. Très. Mais j'men fou c'est lui qui m'rend comme ça. J'étais pas pareil avant d'le connaître. Personne n'est pareil avant de croiser le chemin de Bensetti. Un mec pareil ne s'oublie pas. S'il n'existait pas faudrait vraiment l'inventer. Je dis vraiment n'importe quoi.

Les pas s'enchaînent vite, trop vite. Ma tête tourne et je m'arrête en plein milieu de la chorégraphie. Laissant Christian en plan par la même occasion. L'eau dégouline dans mon dos et contre mes tempes.
J'en ai marre.
Mon reflet me fait mal. J'ai perdu du poids. J'ai arrêté de manger je ne sais même plus quand. Pire, mon dernier vrai repas n'est qu'un vague souvenir. Tout le monde me regarde surpris. Je savais d'avance qu'on allait m'en foutre plein la gueule et j'étais prête à répliquer. J'entrais presque dans une colère noire. Mon corps tout entier tremblait sous la pression de la retenue. Je devais me contenir, me retenir d'exploser devant eux. Je devais prendre la décision de sortir de cette pièce pour garder encore le peu de fierté qu'il me reste au sein de cette équipe. Tout le monde sait que je suis cette roue de secours et que pendant une tournée entière ils n'ont pas eu besoin de moi. Tout tournait autour de moi sans que je sache faire quoi que ce soit. Une main saisissait vivement la mienne. Je n'avais même plus la force de résister à qui que ce soit. Je suivais le mouvement qu'on m'imposait et me retrouvais dans le couloir.

LejosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant