3. Rayane

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J'avalais de travers mon café. Qu'est ce que j'étais en train de voir ? Elle n'avait pas osé ? Non, elle n'avait pas fait ça ? Si pourtant si. La vérité était telle et je pouvais que me rendre à l'évidence : mon ex est une connasse. Si je l'avais quitté c'était que je ne l'appréciais plus. Je ne voyais pas tellement ce que je voulais encore avoir à faire avec elle. Alors au lieu de la tromper et la faire souffrir j'avais pris la décision de m'en aller. C'était honnête de ma part non ? J'étais clair je pensais même qu'elle l'avait bien accepté vu sous l'angle qu'elle avait vécu cette histoire. Elle avait eu peur que je la trompe ou je ne sais pas. Je ne l'avais jamais fait. Jamais. Et là, maintenant que je commençais tout juste à être connu, à avoir un peu d'argent pour survivre chaque mois, elle fait quoi dans mon dos ? Elle soulève le problème et remous la poussière de notre vieille histoire. Pour se faire un nom quelque part elle a donc besoin d'utiliser le mien ? C'est pathétique. Je n'ai même pas pris la peine de lui répondre quoi que ce soit. Lui accorder de l'intérêt c'était exactement ce qu'elle cherchait. J'avais ma conscience tranquille. Remettre sur le tapis qu'on a été ensemble pendant près de deux ans c'était totalement con. Et j'avais pas envie de rentrer dans son jeu. J'avais pas plus envie que ça d'avoir ma tête associée à la sienne partout sur les premières pages alors je fermais ma gueule. L'ignorance. Alors je regardais mon appartement et me rendais à l'évidence, être seul ici ne m'allait pas tellement bien. Je n'avais aucun frère et sœur, ma mère ne vivait même plus ici, elle s'était cassé à Strasbourg avec son.. ouais son nouveau mec quoi. Et mon papa. Mon papa n'avait pas eu cette chance. Il était en surveillance permanente d'un institut spécialisé de Marseille. Il était gravement malade. Et il n'y avait plus que moi qui lui apportais les soins dont il avait douloureusement besoin. Il n'avait plus que moi. Mais avec mon emplois du temps qui commençait à être rempli et mon petit boulot dans un petit bar de Lyon ce n'était pas facile de lui rendre visite. Je m'en voulais souvent. Je devais certainement soulager ma conscience en envoyant cet argent. C'était moche. Mais c'était pas facile de se mettre à l'évidence que votre père était déjà perdu. Et que payer ces frais d'hospitalisation c'était juste retarder au maximum l'échéance fatidique. C'était retarder de regarder la vérité indéniable du ravage de la maladie. Le cancer ne l'avait pas épargné. Il n'avait qu'un fils. Son ex femme, donc ma mère ne prenait plus de nouvelles depuis que j'avais l'âge de comprendre qu'entre eux c'était la panique totale. Ils ne pouvaient plus se voir même en peinture. Et ça me faisait mal quand j'étais petit. Me dire que mes parents ne seraient jamais plus amoureux comme avant, ça fait mal. Et puis oui j'ai fini par comprendre. Et j'ai tout fait pour contenir l'amour que mes parents s'était déchus en se séparant. J'étais le centre de leur univers, ils gravitaient autour de moi. Et puis elle a refait sa vie et lui est tombé malade. Sa maladie elle gagnait du terrain en lui depuis sept ans déjà. La phase terminale était son état actuel et les infirmières avaient réduit tous mes espoirs en cendre en me disant qu'il y avait plus rien à faire de tout évidence qu'il ne fallait plus qu'attendre. Il souffrait. Mais je ne pouvais pas me réserver à le voir partir. J'avais trop besoin de mon père dans ma vie. Même s'il n'était plus vraiment là à cause de la douleur. J'adore l'appeler et lui raconter ma petite vie qui se met en place.
Mon agent essayait d'attirer mon attention en faisant de grands gestes. Mon attachée de presse était là également. Elles me regardaient avec des yeux noirs. Qu'est ce que j'avais fait encore ?
'' - Pourquoi vous me regardez comme ça toutes les deux ?
- Quand est ce que t'envisageais de nous dire que t'avais une ex dans les parages qui voulait faire de la télé réalité ?
- Mais comment voulez vous que j'le sache ? C'est mon '' ex '' ce n'est pas pour rien si je n'ai plus de nouvelles vous ne croyez pas ? Et ces torchons en profitent bien. Il faut les ignorer.
- C'est pas aussi simple et tu le sais très bien.
- Et qu'est ce que je suis censé faire au juste ? J'suis pas dans sa putain de tête. Si elle a pas assez de talents pour se faire remarquer naturellement c'est son problème pas le mien.
- Justement c'est aussi ton problème. Faut mettre les choses au clair.
- Non faut rien faire du tout.
- Écoute moi Rayane, je suis ton attachée de presse et c'est moi qui sait comment ça fonctionne. Il faut que tu montres que t'as rien à te reprocher, que tu fasses éclater la vérité.
- Justement non ? Si j'ai rien à me reprocher pourquoi je répondrais au juste ?
- Tu ne comprends pas.
- Non c'est vrai, je comprend pas pourquoi vous tenez autant à ce que je réplique quoi que ce soit à cette grognasse. '' la sonnerie de mon téléphone rettentissait. Je n'aimais pas répondre au téléphone mais fort de dire que je n'avais pas le choix parfois. Je regardais qui m'appelais, mes yeux sortaient de mes orbites. C'était l'institut de Marseille, c'était pour mon père. Je quittais le bureau des deux femmes et arrivais dans le couloir. Je décrochais. De toute évidence j'étais angoissé. Un mauvais pressentiment montait en moi. Et habituellement ce n'était jamais bon.
'' - Monsieur Bensetti ?
- Oui ?
- C'est l'infirmière Lincoln à l'appareil, celle qui s'occupe de votre père. Je suis désolée de vous apprendre ça mais son état s'est encore aggravé. Il ne va plus survivre très longtemps. Il ne lui reste que quelques jours à vivre. Je voulais vous prévenir au cas où vous vouliez être là pour ses derniers moments.. '' ma respiration se bloquait dans mes poumons. Mon cerveau ne semblait plus du tout irrigué pour subvenir à mes capacités pensantes. Elle venait de m'apprendre que pour mon père tout était fini. J'étais censé le prendre bien et sauter de joie ? Les médicaments ne servaient plus à rien. L'argent non plus. La patiente ne remplaçait plus l'espoir. Mes mots sortaient tout seul, mes larmes coulaient presque. Mon papa. Mon papa allait me quitter.
'' - Je serais là.. je promet que je serais là. Je me débrouillerais. '' c'était dit, c'était sellé. Je rentrais de nouveau dans le bureau, mes joues étaient inondées de larmes. Elles coulaient sans que je puisse les arrêter, sans que je veuille les contrôler. Mon agent, Maëlle se redressa d'un coup certainement prise d'un coup de panique plus que soudain. Mon attachée de presse, Julie ne disait rien, se contentait de m'observer, ne sachant sûrement pas bien ce qu'elle devait faire. Elles ne pouvaient rien faire. Personne ne pouvait plus rien faire. J'allais perdre mon père, et j'étais totalement impuissant.

LejosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant