Par amour pour la mort

Peur d'aimer

Ma douleur est si intense. Si c'est ce sentiment qu'on appelle l'amour, si c'est ce genre de douleur qu'il procure alors je déteste ça. Pourquoi est-ce que je devrais souffrir pour aimer quelqu'un ? Ma proximité avec Undertaker m'a fait développer des sentiments que je n'imaginais pas. Cet homme est simplement mon hôte depuis bientôt un mois et je me suis déjà attachée à lui. Je repense à la tendresse et à la passion que j'ai vu dans ses yeux quand on a découvert le tableau. En voyant ce regard, j'ai eu l'impression qu'on m'enfonçait un poignard en plein cœur. J'ai fuis par peur de le regarder à nouveau dans les yeux et de voir l'amour qu'il éprouve pour cette Claudia.

Ça fait plusieurs heures que je pleure dans la clairière. Lorsque j'ai quitté la maison, le soleil n'était toujours pas levé. Je lève les yeux humides vers le ciel et voit que le soleil et à son sommet. Déjà midi... Je me lève en m'appuyant sur Jōnetsu qui est toujours enfoncé dans le sol et regarde autour de moi, perdue. Peut être que je devrais à nouveau vivre ici, dans cette forêt qui a veillé sur moi la plupart de mon enfance. Je baisse les yeux sur moi-même et me rends compte que je suis toujours en chemise de nuit.
- Manquait plus que ça... soupirais-je.
Je retire ma faux du sol, nettoie la lame pleine de terre et la rengaine. Je prends ensuite ma clé et l'enfonce dans la serrure invisible. Mais je ne sais pas où aller. Je retire la clé et m'assieds dans l'herbe. Je passe une bonne heure à réfléchir. Je n'ai nulle part où me réfugier. Bien sûr, je quitte la boutique. Mais maintenant, il faut trouver où me loger. Je repasse l'idée de rester ici plusieurs fois dans ma tête. C'est pas si mal après tout. J'irai piquer des vêtements en ville. Tout d'un coup, je me frappe le front avec la paume de ma main. Mon carnet ! Je ne peux tout de même pas déserter mon rôle de Shinigami. Rage je me déteste ! Pas le choix, je dois retourner là-bas.

Après un long débat avec moi-même, je prends mon courage à deux mains, enfonce la clé, la tourne et ouvre la porte. Je vérifie qu'il n'y a personne dans les environs et me précipite vers mon carnet. Je le prends sur la commode en regardant tristement le portrait de la jeune femme, qui n'a pas bougé. J'en profite pour me changer rapidement. Le tissus de ma chemise est un peu plus souple. Lorsque je reprends la clé pour retourner dans la forêt, je vois Undertaker dans l'encadrement de la porte. Sa frange est en bataille et ses yeux sont visibles. Il me fixe bouche bée.
- Laina...
- Undertaker ne dis rien s'il te plaît, le suppliais-je en reculant, une main tendue pour lui intimer de rester où il est
- Laina ne part pas, pitié.
Il s'avance doucement et je continue de reculer au même rythme. Je me cogne dans le mur. Je suis paralysée. Il continue d'avancer. D'un coup d'œil rapide à ma gauche, je repère la fenêtre. Il s'approche de plus en plus. Je ne tiens plus.
- Undertaker arrête ! hurlais-je.
Il se stoppe net, me regardant d'un air incertain.
- Laisse-moi t'expliquer, je t'en supplie.
Il tombe à genou et tend une main vers moi. Je sens les larmes monter mais je refuse qu'il me voit comme ça. D'un geste vif, j'ouvre la fenêtre et saute.

    Tout se passe très vite. Il se jette vers la fenêtre pour me rattraper mais trop tard. J'ai déployé mes ailes et fuis dans le ciel. On est en pleine journée et sous moi, je vois les gens regarder en l'air en me montrant du doigt. Qu'importe qu'on me remarque, ça n'a plus d'importance vu que je vais quitter la ville. Les larmes m'aveuglent et je ne vois pas le clocher de Big Ben. Je heurte le sommet de la tour et quelques ardoises du toit sautent pour aller s'écraser tout en bas. Je suis sonnée mais j'arrive à m'aggriper à la pointe du clocher. Malgré moi, je visionne mes ailes, actuellement blanche, se noircir et devenir plus sombres que la nuit. Mon chagrin est si grand que les gens qui se sont agglutinés sous Big Ben pour m'observer ne m'inquiète pas. Je vois des femmes hurler de terreur en m'apercevant. La population crie au monstre et des officiers de polices décident d'intervenir. Je les vois qui entre dans la tour pour monter jusqu'à moi. Je m'en fiche. Je reste assise ici à regarder une dernière fois Londres.

Il n'y a toujours pas de policiers et j'en ai ma claque d'attendre. Alors que je me lève, les ailes déployées, provoquant du remous en bas, j'entends quelqu'un derrière moi. Je me retourne et vois Undertaker. Je recule et en le voyant, je ne peux m'empêcher de rentrer mes ailes. Je ne vois pas le bord. Tout s'enchaîne sans que je m'en aperçoive. Je tombe en arrière. Il se précipite vers moi, la main tendue. Dans un geste désespéré, je tends moi aussi le bras. Il m'attrape et je reste suspendue dans le vide en le regardant droit dans les yeux.
- Pourquoi tu fais tout ça ? demandais-je, la gorge nouée. Je n'en vaux pas la peine. Laisse-moi je t'en supplie.
- C'est toi qui me demandes pourquoi j'agis de la sorte ?! s'exclame-t-il avec un petit sourire réconfortant. Ce n'est pas moi qui me suis enfuis sans aucun raison à ce que je sache.
- J-je...
- Tu ?
- Je vais lâcher !
Ma main glisse de la sienne et je chute. Je me tourne pour regarder vers le bas et visualise d'immenses ailes comparables à la lame de mon katana. Les mêmes ailes que la dernière fois, mais en beaucoup plus grandes, sortent de mon dos. Je plane au-dessus de la foule londonnienne qui hurle de terreur et repart vers les airs. Je retourne vers le clocher où se tient toujours Undertaker, ses longs cheveux argentés flottant au vent. Je me tiens face à lui en restant dans les airs.
- Laina, commence-t-il, rentre et laisse-moi tout t'expliquer.
- M'expliquer quoi ? Que tu aimes une autre femme ? Qu'est-ce que ça peut me faire après tout, je te le demande.
Je regrette mes dernières paroles. Un voile de tristesse recouvre son visage et il baisse la tête. Sans rien ajouter de plus, il prends sa clé et quitte le toit de la tour. Je fais de même et me retrouve à la bibliothèque. En me voyant arriver ainsi, furieuse et mes ailes dans le dos, Grell, Will et Ron me fixe d'un air ahuri. C'est Grell qui brise le silence après plusieurs minutes de tension.
- Euh... On peut m'expliquer ?
Je fonds en larmes et ils se précipite ment vers moi en me serrant dans leurs bras. Will reste un peu en retrait mais je sais qu'il me soutient moralement. Ce câlin collectif me redonne de la force et je le remercie.
- Aller la miss, tu vas tout nous raconter, dit Ronald en souriant.