Un hôte plutôt spécial

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    Je me tiens au milieu de la boutique, légèrement stupéfaite, en faisant face aux deux hommes. Je vais devoir cohabiter avec un Shinigami à moitié fou à la retraite... Je veux revivre ! Grell se précipite vers Undertaker avec un air de chien battu.
- Senpai, tu ne vas tout de même pas accepter cette simplette chez toi ! Par contre j'ai quelques problèmes chez moi donc si tu n'y vois pas d'inconvénient...
Il prends une voix suave et se colle à Undertaker de façon plutôt gênante. Je ne peux m'empêcher d'éclater de rire devant la scène. Grell me lance un regard accusateur alors que mon hôte sourit à nouveau avec un air de timbré de première. Mon rire redouble devant l'air perdu de mon ami aux cheveux rouges. Je tombe par terre, pliée en deux. À mon grand désespoir, Undertaker se met aussi à rire et on finit tous les deux hilares sur le parquet du magasin. Grell nous regarde, les bras ballants, plus paumé que personne.

    Après un bon quart d'heure passés dans cet état, on tente de se calmer. Je reprends vite contenance mais c'est une autre histoire pour Undertaker. Il rit encore cinq minutes pour Grell décide de le calmer à l'aide d'un grand coup de pied. Undertaker continue de rire mais moins et il réussit à se relever. Je récupère mes affaires qui se sont éparpillées partout sur le sol. Je me redresse puis nous saluons Grell qui s'en va par la porte des morts. Ensuite, le grand rigolo se tourne vers moi, toujours son sourire de clown psychopathe peint sur le visage.
- Bien. Ma petite Laina, laisse-moi te faire visiter les lieux et te montrer où tu vas vivre.
- Je vous suis, répondis-je, un peu anxieuse.
Je ne sais pas à quel genre d'endroit je dois m'attendre. Nous passons la porte, au fond de la boutique, qui ouvre sur un couloir long, sombre et étroit. Au bout de se couloir... Je ne pensais plus la revoir : la lumière. Certe, la bibliothèque est lumineuse, mais ce n'est pas la même lumière. Là, je peux voir la lumière du jour. On monte un escalier et nous commençons la visite ; la cuisine, la salle de bain, le débarras, la chambre d'Undertaker et enfin, la mienne. Je n'ose pas tourner la poignée. Je tente de regarder l'homme qui héberge mais celui-ci et en train de rêver, la bouche ouverte, en fixant une toile d'araignée. Ça promet... Je pose enfin ma main sur la poignée et la tourne. J'ouvre la porte et ce que je vois me laisse de marbre. J'ai devant moi ce qui ressemble à tout sauf à une chambre. Je me retourne vers Undertaker, furieuse. Il vient se placer derrière moi pour connaître la cause de ma colère. Il repart d'un fou rire.
- AHAHAH ! Je suis vraiment désolé... J'ai confondu avec le grenier. Ta chambre est en face de la mienne, ahah.
- C'est une blague, rétorquais-je en fulminant et en revenant sur mes pas.
J'ouvre la porte désignée et je lâche un soupir de soulagement. Ça ressemble plus à une chambre. Une chambre qui a besoin d'un, voir plusieurs coups de balais mais c'est une chambre quand même. J'entre et fais le tour des lieux d'un regard. Un lit à baldaquin aux rideaux usés, un mannequin en fer forgé pour mes vêtements et une coiffeuse avec plusieurs tiroirs et un tabouret. Je m'approche de la commode à miroir et fais glisser mes doigts dessus. C'est sans doute le seul objet entretenu ici. Pas un grain de poussière. Je me retiens de poser des questions par peur d'être indiscrète et de plomber l'ambiance. Je me tourne donc seulement vers Undertaker qui se tient sur le pas de la porte.
- Alors ?
- Alors je trouve que c'est mieux que le grenier, répondis-je simplement en souriant.
- Ah je vois que mademoiselle à le sens de l'humour ! C'est sans doute la seule fois où je vais être sérieux mais je tiens à dire que la joie de vivre est nécessaire ici.
Je ne peux m'empêcher de grimacer lorsqu'il parle de joie de vivre. Il a dû le remarquer parce que je l'entends rire en se cachant dans les manches de son manteau qui sont d'ailleurs dix fois trop grandes.
- Même si le jeu de mots est plutôt recherché, je suis désolée de vous annoncer que ça n'est pas très drôle.
- Navré de l'apprendre ! Mais en même temps tu es nouvelle, tu t'habitueras.
C'est alors qu'on entend appeler depuis la boutique. Undertaker tape dans ses mains comme un enfant, tout excité et se rue dans les escaliers.
- Voici donc le jeune comte. Je reviens Laina !
Il claque la porte menant à la boutique et le calme revient. Je m'approche du lit et tape les draps. Un petit nuage de poussière s'élève. Je prends les draps puis ouvre la fenêtre et secoue le tout dehors. Je refait ensuite de lit. C'est presque comme si la pièce s'était éclairée. Les draps sont un peu plus blanc mais il y a encore du travail. Je pose mon katana sur le matelas, prends mes habits et vais me changer à la salle de bain. Je retourne ensuite dans ma chambre, enfile ma vieille robe sur le mannequin métallique et me regarde dans la glace. Tout est parfaitement taillé pour moi. Comment ont-ils fait en si peu de temps ? Peu importe, au moins je suis changée. Je m'assois sur mon lit et contemple ma faux. Je devrais lui donner un nom... Pourquoi pas Jōnetsu ? J'ai entendu dire que ça signifie "passion" en japonais. Oui, Jōnetsu, ça sonne bien. Après une petite demi-heure, Undertaker remonte, hilare.
- Ce Sebastian a vraiment un humour hors du commun, dit-il en passant une main sous sa frange pour essuyer une larme de rire. Bon, maintenant il va falloir t'initier au métier. Prête ?
- Oui monsieur ! Lançais-je en prenant une pose militaire exagérée.
Il sourit à nouveau puis me fait signe de le suivre. Je le vois prendre un charriot puis la clé menant à la bibliothèque et il ouvre la grande porte de la mort. Nous entrons ensemble. J'apercoit Grell qui se languit sur un des bancs. Il joue avec une tronçonneuse rouge. Sans doute sa faux. Il aime vraiment le rouge lui ; ses cheveux, ses lunettes, la plupart de ses vêtements et sa faux sont rouge. Je tourne la tête et voit Ronald qui cherche je ne sais quoi dans un des rayons. Il me repère, me salue de la main et vient à notre rencontre.
- Alors ma Lady, bien installée ? Je suis désolé d'être parti sans prévenir mais le devoir n'attend pas ! Oh, monsieur, fait-il à Undertaker en s'inclinant. Si ça ne gêne personne, je reprends la demoiselle pour sa formation.
- Sers-toi Ronald !
Je veux répliquer que je ne suis pas un simple objet qu'on trimballe où on en a envie ma Undertaker est déjà parti, son charriot devant lui. Résignée, je me retourne vers Ronald qui a un nouveau sourire dessiné sur les lèvres.
- Prête pour commencer ta formation de Shinigami la miss ?
- Je suis toujours prête, répondis-je en souriant, Jōnetsu sur mon épaule.
- Alors c'est parti !

Par amour pour la mortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant