LUNA
J'avais froid.
Étrange chose que d'avoir froid en été.
Le vent tourbillonnait autour de moi, me mordant de son étreinte glacée et morbide.
Les pans de ma tunique, bien trop légère pour cette température, claquaient avec violence dans la bise.
Je n'essayai même pas de fermer ma veste pour me réchauffer. C'était inutile. La glace qui me gèle le cœur était autrement plus cruelle que les aléas des saisons.
Je levai les yeux et observai ciel d'un air las. Il était gris, morose, le genre qui ne donne pas envie de se lever le matin.
Parfait.
Je pensai que je n'aurais pas supporté un bleu éclatant le jour d'un enterrement.
Le jour de l'enterrement de Mim.
Enfin, je posai mon regard vide sur le cadavre.
Oh, bien sûr, c'était un joli cadavre. Pomponné, couvert de bijoux ornementaux, vêtu de ses plus beaux habits. Mais la vie avait déserté ce corps, qui n'était plus qu'une masse de chair inanimée.
Le visage de la défunte semblait blême sous le maquillage. Les joues commençaient déjà à se creuser, et les pommettes saillaient, sur le point de percer la peau parcheminée.
Mon cœur se serra.
Ce n'était pas Mim que je regardais, mais son masque mortuaire.
J'étais seule. Seule avec un cadavre, au pied de l'Arbre Père.
Avec douceur, je pris Mim -ou plutôt son souvenir- dans mes bras. Elle ne pesait pas plus que le petit oiseau que j'avais retrouvé mort un matin de janvier. Il y avait quelque chose de semblable dans les deux corps raidis et vides de toute âme.
J'allongeai la dépouille de mon amie sur les racines de l'Arbre et déposai son fidèle poignard sur sa poitrine osseuse.
Le cœur serré, je déposai un dernier baiser sur sa joue livide, froide comme du marbre.
Aussitôt, les énormes racines s'enroulèrent autour d'elle en un cocon protecteur et s'enfoncèrent lentement dans le sol meuble.
Ce qui naissait de l'Arbre reviendrait toujours à l'Arbre.
***
ARK
Je fermai mon sac de voyage en soupirant.
C'est l'heure du grand départ.
Je balayai une dernière fois la chambre du regard pour vérifier de n'avoir rien oublié.
N'ayant rien trouvé, je m'affalai sur mon lit, épuisé.
Je saisis mon épée d'or et jouais avec ses reflets lumineux, en attendant l'annonce du départ à Aarmeer.
Pensivement, je passai la lame sous les rayons du soleil pour observer les runes qui y étaient gravées.
- Obsidienne... murmurai-je en passant un doigt sur les glyphes scintillants.
Étrange nom pour une épée aussi brillante...
Je me tirai brusquement de mes pensées.
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Chroniques du Crépuscule
FantasyQue se passerait-t-il si les hommes étaient séparés des femmes? Pire, s'ils se haïssaient? Impossible, n'est-ce pas? Et pourtant, dans un monde étrange où les esprits totem se mêlent à la magie, c'est la réalité. Tout les oppose. Les femmes ont créé...