18. Venin

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LUNA

Les pans de velours m'effleurèrent le visage et un instant après , je fus projetée dans l'obscurité.

Je plissai les yeux, m'habituant à la pénombre de la pièce.

Les objets étaient flous, pâles fantômes informes. Un unique rayon de soleil caressait le sol poussiéreux, illuminant les particules dorées flottant dans l'air. Un environnement étranger.

J'inspirai profondément.

L'air avait une étrange odeur de métal, de sang, de mélancolie. Un arôme venu de la nuit des temps.

Soudain, un contact glacial et caressant au niveau de ma cheville me figea. Une chose s'enroulait avec lenteur autour de moi.

Un sifflement cruel se fit entendre et je croise des pupilles fendues couleur saphir.

Le cobra glissa autour de ma cheville, secouant un peu la tête, ne me lâchant pas du regard. Je ne pouvais détourner le mien des ondulations hypnotiques, presque lascives du reptile. Peu à peu, il remonta le long de ma jambe, laissant sa langue fourchue effleurer ma peau hâlée. Chacun de mes muscles est paralysé par la lente et terrible avancée du serpent, figé par la beauté de cette danse de mort.

Un bras s'enroula autour de ma taille, me sortant de ma torpeur.

- Calme-toi...

Le souffle chaud d'Ark m'apaisa pendant un instant, puis j'écarquille les yeux.

Qu'est-ce que je fais là ?

Je me retins de pousser un hurlement de terreur. Le courage ne me manquait pas, mais les serpents...

Je frissonnai.

Les serpents... Je voudrais les oublier.

Mon sang se changea en glace lorsque la tête couleur émeraude glissa au-dessus de mon genou. Le cobra siffla, découvrant ses crocs empoisonnés.

L'étreinte du jeune homme se resserra sur moi, m'enveloppant dans son odeur. Cuir, menthe sauvage et... quelque chose de métallique se mêlaient, formant un arôme puissant et entêtant.

Mais cela ne me faisait pas oublier le serpent mortel remontant le long de mon mollet.

- Shiro... Si tu veux sortir vivant de ma tente, je conseille de rappeler ton vermisseau. Tout de suite.

Le grognement quasi animal du général me fit presque sursauter, ce qui était une très mauvaise idée lorsqu'on avait un cobra sur la jambe.

Soudain, une deuxième paire d'yeux d'un saphir ténébreux s'allumèrent dans la pénombre.

Le mage au yeux bridés sortit de l'ombre en ricanant. Encore.

Si je n'avais pas été terrorisée, j'aurais sûrement levé les yeux au ciel. Mais voilà, j'étais aussi faible et tremblante qu'un nouveau né. J'étais si tétanisée que j'avais laissé ce mâle me protéger.

Moi. Dans les bras du plus grand imbécile que la terre aie porté.

Je levai les yeux vers le mage et lui lance un regard à faire pâlir les plus braves. Evidemment, il n'eut aucune réaction.

Je commençais sérieusement à me demander si ce type était humain.

- Libère-moi immédiatement, magicien d'opérette. Où sont les autres ?

Ses yeux bleus me fixaient avec intensité, brûlant d'une lueur malsaine.

- Oh, j'ai demandé à Herran de leur faire visiter le camp. Je comptais m'amuser un peu avec toi, mais le Maître te suit comme un petit chien... Quel dommage.

Chroniques du CrépusculeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant