Chroniques du Crépuscule

15. Faible

LUNA

Le vent glacial fouettait mon visage, engourdissant ma peau. Chaque muscle de mon corps brûlait, mais je ne m'en souciais pas.

J'étais libre.

Mon tigre continuait sa course, infatigable. Ses mouvements respiraient la grâce et la puissance.

Je sentis les bras de Diane se resserrer sur ma taille et je souris. L'artisane de génie était terrifiée par la vitesse!  La vulnérabilité de mon aînée me toucha et je lui murmurai quelques mots d'encouragement. Je la sentis se pelotonner contre moi, cherchant un peu de réconfort.

Des heures s'étaient écoulées depuis notre départ de Crépuscule, des heures que le loup, la panthère et le tigre galopaient dans l'immensité des plaines de Falathar. Je scrutai le paysage : un sol aride et grisâtre agrémenté de quelques touffes d'herbe jaunâtre.

A la tête de notre petit groupe, le loup et le mâle nous guidaient, semblant se repérer avec facilité dans l'étendue désolée. J'observai les cheveux sombres décoiffés par le vent avec rancœur. Ses traits étaient de nouveau durs et hautains. Comment avais-je pu penser qu'il n'était pas mauvais?

Je repensai à son visage détendu par le sommeil, puis je secouai la tête pour chasser ces pensées de mon esprit. Ce mâle était malfaisant.

Comme s'il avait lu dans mes pensées, il se retourna et plongea ses yeux noirs dans les miens. Il esquissa un sourire cruel, un peu méprisant. Je lui rendis son regard noir à travers ma masse capillaire tourmentée par la bise.

Soudain, une envie enfantine me saisit. Enfantine, mais tellement amusante.

Je me penchai à l'oreille du tigre et lui murmurai quelques mots.

Dans un rugissement, le félin bondit, se lançant à la poursuite du loup. J'éclatai de rire, tandis que Diane hurla, terrifiée.

***

ARK

Picotement à la nuque.

Un autre.

Sensation désagréable d'être observé.

Je me retournai brusquement, exaspéré.

Des prunelles de feu me fixaient avec intensité. Quelle surprise.

Cette fille passait sa vie à espionner les gens ou quoi? Agacé, je lui lançai un regard noir qu'elle me renvoya aussitôt. Nous nous foudroyâmes donc mutuellement, des éclairs dans les yeux.

J'ai comme une sensation de déjà vu...

Soudain, une étincelle malicieuse enflamma le regard de la guerrière. Je déglutis avec difficulté.

Oh oh.

Un rugissement puissant me déchira les tympans.

Son tigre s'élança, accompagné par le beuglement de l'artisane. Le félin s'approchait dangereusement de mon loup. Un sourire en coin se posa sur mes lèvres.

Elle voulait la guerre?

Elle allait l'avoir.

Avec un hurlement aigu, mon loup se jeta dans la course. Ses pattes effleuraient à peine le sol desséché. Le tigre et le loup galopaient flanc contre flanc, à une vitesse folle, ignorant le danger. Je me penchai encore plus sur ma monture, faisant corps avec elle. Les deux fauves semblaient voler dans l'immensité de la toundra.

Je ne m'étais jamais senti aussi vivant.

Je pouvais sentir la respiration saccadée de la guerrière, à quelques centimètres de moi. Et pour la première fois, je la regardai.