Rebellion

9.Déception

Je sais qu'il y a Ismaël et que je l'aime, mais Célestin est quand même mon futur mari alors si, par pur hasard, il se trouvait qu'on s'aimait, disons...bien, ça pourrait rendre les choses plus agréable non? Alors, je l'avoue, je lui fait un peu de charme : sourire en coin, regards, battements de cils et j'en passe... Au dessert, les adultes nous proposent de faire connaissance tout les deux dans ma chambre. Je sais qu'il n'a pas le droit de trop m'approcher avant notre mariage mais je ne peux m'empêcher de m'angoisser à l'idée que Célestin puisse être mal intentionné. Bien sûr, il n'en n'est rien, et nous nous asseyons à bonne distance l'un de l'autre pour discuter. J'essaye de trouver un sujet de discussion quand il annonce brutalement :
"- Écoute, je sais que pour les filles de ton âge, le mariage se passe avec un prince charmant ridicule. Mais tu es trop jeune et immature pour que j'éprouve des sentiments pour toi. Du moins, pour le moment. Donc je te prierai de remballer tes techniques de drague à deux balles ! Le mariage n'a rien à voir avec l'amour.

Pendant un instant, je reste la bouche ouverte, pleine d'une désillusion amère. Puis je me redresse, me compose une expression d'immense dédain et rétorque :
"-Je tiens à te préciser que je sais de quoi il s'agit, et que non je ne crois pas au prince charmant. Je sais très bien qu'on ne s'aimera pas, je ne suis plus une gamine de deux ans, merci bien! Et toutes façons, je ne pourrai jamais aimer quelqu'un comme toi..."

Et toc! Dans ta face le crâneur ! Je souris légèrement, amusée par ma répartie. Le silence s'installe, gênant. Je le regarde discrètement : je n'avais pas remarqué sa fossette toute à l'heure, ni son adorable façon de froncer les sourcils... Je me reprends, et essaye de l'analyser d'une façon que j'espère être objective: il a l'air solide, avec ses épaules carrées, mais n'est rien par rapport à un SUP. Ses cheveux blonds sont un peu décoiffé. Mince, je crois qu'il m'a vu le mat... Euh le regarder! Je baisse les yeux, honteuse. Je sens ses yeux chercher les miens, puis parcourir mon visage. Un instant après, il fixe mon décolleté. Rouge jusqu'à la racine des cheveux, je hurle presque:

"-Eh oh! Tu m'dis si je te dérange!
-Mais... De quoi tu parles?"

Il me fixe innocemment, avec un grand sourire naïf. Sa fossette s'accentue en même temps que son rire. Il ressemble à un ange... Seuls ses yeux, brillants et moqueurs, révèlent qu'il se fiche bel et bien de moi. Grrr... Celui-là, je vais le détester...

"-Tu sais très bien à quoi je fais allusion! Je ne suis pas totalement stupide ! Il me toise d'un air las, comme ennuyé d'un jeux qui n'a jamais commencé.
-Te fais pas d'idées la gamine, je ne salivais pas sur ton "corps de rêve", je me demandais juste comment tu fais pour te tâcher avec la sauce de la viande... Il savoure un instant ma mine déconfite, puis il se lève et s'étire, comme un tigre fatigué.
-Bon j'y vais moi. C'est pas que je m'ennuis mais presque..."

Ouïe... Ça fait mal ça... J'essaye, sans résultats, de faire partir la fameuse tâche qui m'a faite passer pour une imbécile de première. Ce garçon me rendra dingue... Dire que je vais passer le restant de mes jours à le supporter... Je ne sais pas comment annoncer tout cela à Ismaël. Ça sent le drame à plein nez...

★★★★★★★★★★★★★★★★★

Je regarde avec désespoir ma tasse de café. Je n'aime pas du tout cette boisson mais l'avouer me ferait perdre le peu d'estime que Célestin a en moi. Je retiens ma respiration et avale d'un coup le contenu du récipient... Berk... Je ne peux me retenir de faire une grimace. L'amertume qui reste dans ma bouche me fait froncer le nez. Sérieusement ? Qui a inventer ça ? Et qui a décidé un beau matin que pour être un adulte respecté il fallait s'infliger cette torture continuelle ? Non seulement, à la base ce...truc est mauvais, mais en plus, nous, les Infs, nous avions le droit à un mauvais café qui avait le goût de...de...de jus d'endives macérées. Horrible donc! Après avoir fais semblant d'apprécier, je me sers un grand verre d'eau. Discrètement. Célestin m'accorde un sourire dédaigneux, et ma mère détourne habilement l'attention du couple. La mère de mon futur mari, faussement distinguée et plutôt désagréable, parle avec ma mère de robes de mariage. Déjà que celle que je porte doit être hors de prix, je ne veux pas savoir ce que nous coûtera celle de mariée. Le mari n'est pas mieux: critique et sarcastique, je me demande pourquoi j'ai cru qu'il serait sympathique. La voix stridente de Mme. Goarne me coupe dans ma pensée :

"-Vous comprenez très chère, nous ne pouvons pas nous permettre de gaspiller un si précieux argent, et de plus, il me semble que nous avions convenu..."

Célestin m'empêche dans savoir plus: il s'est approché nonchalamment, et remarque:

"-J'ai bien l'impression que ma mère essaye de vous arnaquer...
- Bravo ! Quelle perspicacité ! Mais, Mon cher, il me semble que vous m'empêchez d'écouter...
- Très drôle, vraiment hilarant, quelle imitation!rétorque-t-il, vexé, je voulais te dire de ne pas t'embêter pour le mariage: même avec une magnifique robe, tu resteras terne à mes yeux...J'espère que tu fais bien la cuisine...
- Non mais j'y crois pas!je commence à m'énerver, tu te prends pour qui là ? Qui te dis que je ne me ferai pas belle pour quelqu'un d'autre?
- Pff trop marrant, il rit aux éclats comme si je venais de dire une bonne blague, Toi? Plaire à quelqu'un ? J'adooore ton humour, petite... Attends, tu rigolais pas?
-Alors là, tu me connaît très très mal! Tu crois que t'es beau toi? Avec des yeux rose barbie et tes cheveux jaunes pisse?
- Celestin! On y va !crient ses parents.Au revoir!"