CHAPITRE DIX-HUIT

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Galerie d'Art

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D'après Violet, le trajet en voiture jusqu'à San Francisco ne devrait pas être très long. Une bonne vingtaine de minutes s'il y a des embouteillages mais pas plus. Cette nouvelle me rassure un peu parce que je ne suis pas très à l'aise dans la petite voiture noire aux vitres teintées. De dehors, elle me paraissait immense. Cependant une fois que le professeur et les camarades de l'option art de ma colocataire sont entrés à l'intérieur, la Ford semble avoir rétréci de moitié, ce qui n'est pas la meilleure sensation lorsque l'on est claustrophobe.

Mais pour Violet, je suis prête à prendre sur moi afin de pouvoir la soutenir dans son épreuve du jour : participer à la toute première exposition de ses dessins dans une célèbre galerie d'Art aux portes de San Francisco. Quand elle a reçu une lettre lui demandant de s'y présenter à onze heures précises, elle a sauté de joie dans notre chambre et m'a proposé de l'accompagner. N'ayant rien de prévu de particulier et voulant être à ses côtés, j'ai de suite accepté. Ce qui l'a rendue encore plus heureuse. J'ai vraiment hâte de découvrir ses œuvres. Jusqu'à présent, elle a seulement voulu m'en montrer des esquisses, trouvant son travail trop brouillon, mais aujourd'hui elle ne pourra plus me les cacher.

C'est la première fois que je sors de Barrows avec une autorisation, les autres fois étant de nuit, en escaladant le grillage et rompant une dizaine de règles de l'établissement. J'ai du mal à me repérer et reconnaître le trajet jusqu'à la ville. De jour, tout paraît plus long, plus vivant. Les arbres qui bordent la route que nous empruntons contrastent énormément avec les bâtiments et les buildings qui bientôt s'élèvent devant nous. Comme les amis de la classe de Violet parlent avec elle pour la détendre et la motiver, j'ai tout le loisir de regarder les paysages défiler par la fenêtre, ce qui est loin de me déplaire.

Au fur et à mesure que nous approchons de notre destination, je sens Violet se tendre à côté de moi. Elle respire fort et elle triture ses doigts avec anxiété. Ayant déjà été dans le même cas à de nombreuses reprises, je sais que c'est signe qu'elle appréhende.

— Pas trop stressée ? je lui demande en souriant pour essayer de la détendre.

— Oh que si, tu ne peux même pas savoir à quel point ! s'exclame-t-elle en ouvrant grand ses yeux noisette. Imagine si je ne suis pas à la hauteur ? Je ne peux pas décevoir la confiance du lycée, c'est inimaginable !

— Je suis sûre que tout va bien se passer, la rassuré-je en souriant. Franchement Violet, si toi tu ne gagnes pas l'exposition, qui va pouvoir le faire ? Talentueuse comme tu es, il n'y a pas trente-six mille solutions : soit tu gagnes ou soit tu gagnes.

Les joues de mon amie s'empourprent sous mes compliments et je vois à son visage qu'elle est touchée par ce que je lui dis. Violet a tendance à ne pas avoir confiance en elle, elle est continuellement prise de doutes et c'est dommage parce qu'elle a tout pour réussir : l'intelligence, l'habilité, la technique, les émotions et l'ouverture d'esprit. Elle fera une parfaite artiste, j'en suis certaine.

— Espérant que j'y arrive oui ! Mais je ne me fais pas d'illusions, il y aura d'autres personnes bien plus douées que moi.

— Oh arrête, pense positivement ! la grondé-je. Comme dirait Apolline : vise la lune comme ça même si tu tombes, ce sera dans les étoiles.

— Qui a dit ça ? s'étonne une fille rousse devant nous dans la voiture, interrompant ma discussion avec Violet.

— Mon amie Apolline. Mais je crois que la citation vient d'Oscar Wilde, avoué-je avant de reporter mon attention sur la fenêtre à ma gauche.

DES NUITS PLUS CLAIRES QUE TOUS VOS JOURS [IS HE A BAD BOY ?]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant