CHAPITRE ONZE

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Quand l'ombre surgit

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PDV DE CARTER

C'est mieux qu'on reste ami.

J'ai reçu les mots de Cassandra de plein fouet. Ils m'ont fait l'effet d'un coup de poignard dans le dos. Parce que ce n'est pas les personnes que vous n'appréciez pas qui vous déchirent le cœur, non, ce sont vos proches qui ont le pouvoir de vous détruire. Et en une phrase, j'ai l'impression que Cassandra m'a achevé. A-t-elle entendu mon cœur éclater lorsque la porte a claqué derrière elle, emportant les derniers vestiges de sa présence ? Car moi, l'explosion s'est répercutée dans mon corps tout entier.

Ce qui me fait le plus mal c'est que je sais qu'elle pensait vraiment ces mots. Peut-être que demain elle regrettera – et qu'elle se morfonde, ça n'arrivera jamais à la hauteur de la déflagration qui s'est emparée de mon corps ! –, mais ça ne changera rien à la lueur de sincérité qui brillait dans ses yeux quand elle m'a recalé dans la catégorie d'amis. Oui, je suis celui à l'origine de ce pacte. Je suis mon propre bourreau en quelque sorte. Cependant, elle comme moi nous étions conscients que ce n'était qu'un statut idiot et qu'au fond, nos sentiments restaient les mêmes.

Ce soir, c'est comme si une nouvelle cassure avait eu lieu entre nous. Certes, je peux cautionner le fait qu'elle soit en colère, triste, perdue, qui ne l'aurait pas été ? Mais me reprocher les informations qu'ont laissé filtrer mes parents, ça ça m'a fait vraiment mal. Je me suis senti blessé, trahi. Elle-même a vécu dans une famille qui n'a pas le quart de la morale de mes parents, et pourtant elle a pris leur défense. Et ce, après tout ce qu'ils lui ont fait subir. Je crois qu'au fond c'est ça le pire. Elle déteste qu'on l'identifie au nom qu'elle porte et c'est ce qu'elle vient de faire avec moi. Pas un seul instant elle n'a cherché à connaître ma version des faits. Elle m'a classée dans la catégorie des coupables, au même titre que mes parents avant même d'arriver au restaurant.

Je suis resté planté dans la salle de pause un long moment après que Cassandra soit partie, seul avec mes pensées toxiques. Je les ruminais, tournant et retournant cette discussion dans tous les sens. En y repensant, j'aurais pu apaiser les choses entre nous un nombre incalculable de fois. Si ça se trouve, j'aurais pu simplement la prendre dans mes bras et lui murmurer des mots réconfortants à l'oreille. Peut-être que ça aurait mieux marché que le dialogue, sachant dans quel état de choc elle était.

Je ne crois pas que j'aurais bougé avant encore longtemps si mon patron n'était pas arrivé, sans doute pour vérifier pourquoi je n'étais pas revenu pour clôturer le service. Je lui ai expliqué que je n'avais pas la tête à faire la fermeture et dans sa compassion habituelle, il m'a libéré plus tôt, ne me tenant ni rigueur de mon retard, ni de ma dispute avec Cassandra et encore moins de mon inaptitude à travailler.

— Va te changer les idées, Evans, m'a-t-il alors conseillé. Prends deux jours de congés si tu en as besoin mais reviens-moi en forme pour mercredi.

Il me laissait mon lundi et mon mardi de libres ? Après ma pause dans son restaurant à cause de la période d'examens ? Soit cet homme est fou, soit il a un sens nul du commerce. Mais je n'ai rien dit, me contentant d'opiner d'un mouvement de tête. J'ai ensuite ôté mes vêtements de service et j'ai envoyé un SMS à Andrew pour qu'il me rejoigne à San Francisco, dans notre bar habituel. Je lui précise bien que j'ai besoin d'un bon remontant pour qu'il ne cherche pas à se défiler.

Il est donc un peu plus de vingt-trois heures lorsque je franchis les portes du bar en question. Je n'ai pas reçu de confirmation de la part de mon colocataire, alors je ne cherche même pas son visage parmi les clients assis au bar. A la place de quoi je sors ma fausse carte d'identité qui me sert depuis Barrows et je me commande un Whisky. Je ne suis pas quelqu'un qui raffole de l'alcool, mais en petite dose dans des moments propices – en l'occurrence quand tu as l'impression que le monde s'écroule autour de toi –, ça peut faire des miracles. Sur le court terme, certes, mais c'est déjà ça. Ce soir je ne me sens pas prêt à faire face à ma conscience.

DES NUITS PLUS CLAIRES QUE TOUS VOS JOURS [IS HE A BAD BOY ?]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant