Il ouvrit ses ailes décharnées dans la pénombre, et se posa sur un toit, observant de ses yeux inabusés les alentours.
Il repéra sa proie.
Il vint à sa fenêtre, et la regarda intensément. Une âme pure, même si maculée de souillures. Elle dormait, paisible, dans les bras d'un homme aimant, qui ne la toucherait jamais. Il n'en aurait pas le temps.
Déjà, dans la rue, sous les pieds du chasseur invisible, une escouade encapuchonnée, à couteau tiré, poussait la porte du troquet. Tout le monde dormait à point fermé.
Ce soir, Ankou apporterait à sa Reine une offrande radieuse, assassinée avec furie. Il s'installa confortablement pour profiter du spectacle. Ça n'allait plus être long.
Les assassins ouvrirent les chambres une à une dans un grand fracas, et ne tardèrent pas à trouver la bonne.
Le faucheur posa ses mains sur la fenêtre minuscule, et s'approcha un peu plus pour ne rien rater.
L'homme allongé sur le lit se leva précipitamment, les mains en avant. Seul contre tous, que pouvait-il faire ?
Ils frappèrent le jeune arcanien au poing, et continuèrent quand il tomba, à le rouer de coup de pied. Ils voulaient garder le privilège des lames pour la femme. Ils la saisirent par les cheveux, l'entrainèrent au sol. Tandis que son amant était tenu à genou à présent par trois des assaillants, les autres s'amusèrent à l'entailler, déchirant sa tenue, lui arrachant des cris rauques. Puis l'un d'eux attrapa sa tête, et la frappa frénétiquement sur le mur.
La gérante de l'établissement, en robe de chambre, s'arrêta dans l'embrasure de la porte. Elle poussa un hurlement d'effroi.
Un autre arrivant à la barbe et aux cheveux bleu roi, prit vivement la tavernière dans ses bras un instant, pour lui éviter de tomber au sol. Il ne portait que son pantalon mal agrafé, et dans sa main droite une longue dague effilée. Les autres menacèrent de tuer le garçon s'il bougeait.
Prit dans une situation confuse, tous s'immobilisèrent. Ankou ricana, brulant d'impatience que le sang coule jusqu'à la dernière goutte. Qu'elle fasse un geste qui lui couterait cher.
Elle empoigna un couteau qu'elle cachait toujours sur elle, et le planta avec force dans le bras qui la tenait par les cheveux.
Rugissement de douleur, vocifération, et mêlée chaotique.
« Arul ! »
Elle criait à l'aide alors que son agresseur récupérait son propre couteau et le plantait dans son ventre.
Arul se leva en mordant un avant-bras, frappa, griffa, se débâtit comme un démon. Derrière lui, l'homme torse nu se jeta dague en avant. Il égorgea un des assassins grâce à l'effet de surprise.
Ils combattirent tous deux, mais se firent déborder.
Quant à elle... Elle ne se débattait même plus. Etendue à terre comme une poupée de chiffon, celui qu'elle avait blessé se vengeait à coup de botte.
Le faucheur frémit. Une aura puissante approchait.
Il n'aimait pas ça.
Il baissa les yeux et se rendit compte avec déplaisir qu'un petit filin arcanique avait été placé dans la rue en contrebas...
Il reporta son attention sur la chambre, avec un mauvais pressentiment.
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On l'appelle L'Embrumeuse
FantasíaElle danse, la petite mendiante. Elle tourne, elle saute, elle vibre. Sur le son de ses bracelets de grelots, elle virevolte devant les yeux des badauds. Mais ceux-là ne sont pas plus attirés par la symphonie métallique que par les entrechats légers...