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Assis sur un banc dans un parc, on mange nos kebabs en silence.
Jaden n'a pas l'air d'être ravi d'être ici. Je sens son agacement à travers ses bouchées fermes et sèches. Je bois une gorgée de mon coca, avant de briser ce silence oppressant.

—Qui est ton pote ?

—Ne poses pas de questions, Moon. S'il te plaît.

—Ok...Alors c'est quoi la suite ? On va faire quoi ici ?

—Je dois m'absenter ce soir, mais je serais là ce weekend.

Je croque un bout de mon sandwich, en fixant le magnifique platane qui brille sous le soleil hivernal.

—Tu sais que je dois retourner bosser lundi ? je lance d'une petite voix.

—Ouais moi aussi.

—Donc...ici...c'est provisoire...Je veux dire, on ne fait que repousser le problème...?

Il finit de manger son kebab, et se lève brusquement du banc.

—On va se trouver des fringues, et ce dont on a besoin pour le weekend.

Une fois ma canette vide, je me redresse pour le rejoindre le coeur troublé.
Cette distance froide qu'il met entre nous depuis qu'on est arrivé me perturbe.
S'il tient vraiment à moi, pourquoi il ne me le montre plus ?
Pourtant j'évite de lui poser des questions, et me contente de le suivre dans un centre commercial.

On s'arrête d'abord dans un magasin de vêtements dans lequel je choisis un jean, un jogging noir, une chemise marron crème trop belle et un sweat gris basique, pendant que Jad se prend un jean avec un polo bleu foncé.
On se rend ensuite dans un supermarché, pour acheter les nécessaires de toilettes.
Mais au detour d'un rayon de pâtes, quelqu'un interpelle Jaden.

Un homme d'une cinquantaine d'années aux cheveux grisonnants et avec des yeux bleus très pâles, portant un costard noir. Il nous fixe avec deux autres hommes plus petits que lui.

—Hey mais qui voilà ?

Alors qu'ils se serrent la main, Jad parait plus stressé qu'avant.

—Tu me la présente ? lui fait l'homme aux yeux translucides.

Sans m'adresser un regard, Jad répond :

—Ma cousine.

L'homme lache un éclat de rire.

—Encore une ? Mais t'as combien de cousines, batard ?

Batard ?
Merde, ce gars est aussi louche que son coloc asiatique.

—Cherche pas, réplique Jad en fronçant les sourcils. Elle ne reste pas longtemps ici.

L'homme pose son regard sur moi avec un sourire sadique.
Il m'examine avec des yeux pervers, avant de reporter son attention sur Jad.

—Ramènes-la ce soir. J'aimerai faire sa connaissance avant qu'elle parte.

Jaden contracte tellement sa mâchoire que j'entends ses dents grincer d'ici.
Alors qu'il acquiesce avec un regard, l'homme lui donne une petite tape sur l'épaule avec un sourire satisfait.

—Sois pas en retard, ajoute-t-il en partant.

Jad saisi ma main pour m'entraîner d'un pas rapide vers le rayon d'hygiène.

—Magne-toi, m'ordonne-t-il. On ne doit pas traîner ici.

Encore sous le choc de cette rencontre, j'obtempère en m'activant en silence.

Mais dans quelle histoire je me suis encore fourrée ?

***

Moins d'une heure plus tard, on est de retour dans cette tour vétuste qui me crie de m'échapper d'ici.

Bien que j'ai réussi à garder mon self-control pour ne poser aucune question à Jad, je sens que cette maîtrise est sur le point d'exploser. J'ai qu'une hâte : courir dans cette chambre pour m'enfermer à double tour jusqu'à lundi.

Avant d'effectuer son code sur la porte, Jad s'arrête sur le palier, s'adosse contre un mur, et m'attire dans ses bras.
Son regard sombre et son visage noué n'ont rien pour me rassurer.

—Je suis désolé Léna...Je suis désolé pour tout ça. Je n'aurais jamais dû te ramener ici...Je m'étais promis de plus retourner dans cette merde, mais j'ai paniqué...C'était une mauvaise idée. Une putain de mauvaise idée de t'emmener ici !

Ses yeux sont furieux et contrariés.

—Promets-moi qu'il ne m'arrivera rien de mal.

—Je te le promets.

D'un geste tendre, il pose sa main sur ma joue.
Même si ses mots m'apportent un certain soulagement, une sorte de panique commence à m'envahir.

—Embrasse-moi s'il te plaît, je souffle dans un élan vital.

Ses pupilles se dilatent.
Sa main glisse sur ma nuque et m'attire sur ses lèvres.

La saveur de son baiser m'enflamme et me calme en même temps. Sa langue douce qui s'accroche à la mienne me met dans tous mes états.
Je retrouve cette sensation chaude et apaisante dont je n'ai plus peur désormais.
Au contraire, j'en ai besoin pour affronter ce weekend qui s'annonce mouvementé.

Quand Jad s'écarte de mes lèvres, son regard s'est adouci. Il retrouve sa complicité avec le mien.

—Tout va bien se passer, Moon. Aies confiance en moi.

J'acquiesce de la tête avec un petit sourire aux lèvres, avant de lui avouer :

—C'est toi que je préfère, Jad. Pas Max.

Surpris, ses yeux s'illuminent comme si je venais de lui annoncer qu'il a gagné au loto.
Il prend mon visage dans ses mains, et presse ses lèvres contre les miennes avec ferveur.
Je ferme les yeux pour laisser mon coeur s'enivrer de ce baiser passionné.

Mais lorsqu'on pénètre dans l'appartement deux minutes plus tard avec des sourires aux lèvres, je déchante aussitôt.

                                         

Quitte moi si tu peux  [Terminé ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant