Chapitre 9 : Maladie

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Tate – Lundi 21 février

De nouveau, je me sentais vidé. J'avais passé la journée de la veille au fond de mon lit, le dos endolori et le cœur en berne. Cependant, je n'avais pas pleuré. Pas une larme. J'avais saisi le message dès le début, c'était un ultime adieu. Je ne le reverrais plus, il avait juste eu besoin de mettre un terme à tout ce qui nous unissait.

Dans un sens, cela me réconfortait d'avoir appris que secrètement il avait peut-être rêvé des mêmes choses que moi, d'un autre cela me rendait furieux. Pourquoi est-ce que le monde s'acharnait sur nous pour nous séparer ? Pourquoi l'avaient-ils laissé revenir exactement ? Pour qu'il pût se consacrer corps et âme à son métier ? C'était cruel, pour Paul comme pour moi.

Après avoir passé une partie de la soirée dans mes bras, il s'était habillé de nouveau pour m'abandonner définitivement. Il n'y avait plus la moindre trace de lui dans la chambre, il s'était volatilisé avec toutes les preuves de son existence avant même le retour d'Adonis et Weaston. Je n'avais plus que quelques vestiges de son odeur pour me réconforter.

Mon colocataire avait tenté plusieurs fois de me déloger la veille, en vain. Il s'était allongé près de moi, m'avait serré tendrement contre lui. Comprenant qu'il n'arriverait à rien, il était même allé chercher Harley qui s'était simplement couché à mes côtés sans un mot pendant plusieurs heures. Je m'étais finalement réfugié contre lui dans un ultime effort pour passer à autre chose.

Pour autant, ce matin-là, j'avais encore le cœur meurtri. Ma gorge était nouée par l'émotion et je n'avais rien avalé depuis le samedi à midi, ce qui me creusait également l'estomac. Je n'arrivais pas à envisager l'idée même de me lever, trop concentré à chercher naïvement des solutions pour le revoir. Changer de cursus était impossible, donc je n'avais pas cette possibilité. D'ailleurs, étant un testé, je n'avais aucun moyen d'accéder au bâtiment scientifique. Il devait y avoir bien trop de secrets gardés sur nous dans les locaux pour nous permettre de nous y rendre.

Plongé dans le noir toute la nuit, sans fermer l'œil, mon cerveau n'avait pas cessé de tourner. Il n'y avait désormais qu'un rai de lumière qui passait sous la porte de la salle de bain dans laquelle Adonis était enfermé. Cette semi-pénombre donnait un air inquiétant à la pièce en dessinant des ombres mortuaires au plafond.

Je mis la couverture sur mes yeux en m'enivrant de ce mélange de parfums témoin de notre étreinte. Je fermai les yeux et me remémorai tous ces souvenirs délicieux. L'empreinte de ses doigts sur mes hanches. La douceur de ses lèvres sur les miennes. La chaleur de son souffle sur ma peau.

« Debout la marmotte, » grogna une voix bourrue.

Cela me ramena à la réalité. Sortant un œil de ma couette, je fus surpris de trouver l'imposant Weaston face à moi. C'était un grand gaillard assez costaud avec une génétique favorable, semblait-il. En revanche, il n'avait pas une force équivalente à ce qu'il dégageait et n'aurait jamais obtenu de place en cursus sportif. Même Adonis et son allure de brindille saurait le plaquer au sol sans difficulté.

Voyant que je ne me levais pas, n'ayant de toute manière pas la force nécessaire pour me lever et marcher sans tomber, il soupira.

« Je te rappelle qu'hier soir, avec Ad, on t'a sauvé les miches quand un surveillant est venu te chercher pour t'emmener au réfectoire. Ils ont abandonné en voyant qu'on t'apportait à bouffer, mais ce ne sera pas pareil ce matin. Non seulement tu n'as rien mangé, espèce d'ingrat, mais en plus nous avons cours dans précisément trente minutes. C'est à peine si on a le temps d'aller chercher un fruit pour la route. Alors tu vas me faire plaisir et lever ton cul avant que je te soulève. »

Bluesfield [Boy x Boy - en réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant