Partie 6: Les années

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Quatrième arrondissement du cinquième sous-sol de New-Yordstreet

Six ans étaient passés, six années qui avaient fait d'Amy ce qu'elle était aujourd'hui, une fille des rues qui ne revenait que rarement chez elle, préférant l'activité grouillante de la rue au calme laconique de son foyer. Six ans qu'elle avait passés à courir dans les rues, poursuivie par des marchands furieux ou des soldats soucieux d'entretenir leur image et qui avaient tonifié son corps et raffermit son esprit. Elle était à présent capable de courir une heure entière sans s'arrêter, capable de traverser tous les obstacles qu'elle rencontrait et de chasser d'un mouvement de tête l'angoisse qui la guettait.

Elle était devenue une nouvelle Amy, plus forte, plus déterminée, mais toujours hantée par la mort de sa mère. Seulement, si elle n'avait à présent plus de doute sur le sort qui lui avait été réservé, elle gardait toujours l'espoir de revoir son frère un jour en vie, car elle était persuadée qu'il avait survécu, et il ne lui aurait fallu que peu de choses pour qu'elle parte à sa recherche dans les tréfonds de New-Yordstreet.

Alors que, comme chaque jour, Amy et Shinjy étaient partis en direction du marché central en vue d'y dérober quelques vivres pour la journée, celui-ci redressa la tête, comme s'il avait senti quelque chose d'inhabituel arriver. Son amie s'immobilisa et tendit l'oreille. Elle perçut des bruits de pas qui lui semblaient plus familiers que d'habitude. Puis, elle se revit dans un vide-ordure, attendant avec angoisse la venue de ses poursuivants. 

Elle savait de qui il s'agissait, mais cette fois-ci, elle ne se laisserait pas faire, elle se jeta précipitamment dans la première ruelle à sa portée de façon à se cacher dans un tas de déchets papier. Enfouie dans sa cachette, Amy vit arriver le groupe de malfaiteurs au détour d'une rue qu'elle empruntait quelques secondes plus tôt, elle ne put les reconnaître que vaguement, mais leur démarche, leur posture et leur attitude à se montrer autoritaires face à la foule qui baissait la tête et se recroquevillait en leur présence lui rappelait inexorablement les terribles évènements qu'elle avait vécus six ans  auparavant. 

Si leur allure était restée sensiblement la même, leur visage, eux, s'étaient ternis, leurs yeux étaient à présent soulignés par des cernes qui leur donnait un air effrayant, comme s'ils avaient perdu ce qui leur restait d'humanité en restant au service d'Orlan pendant les six années qui s'était écoulées. Leurs discussions elles-mêmes avait perdu leur entrain, et ils se contentaient de communiquer à l'aide de courtes phrases qui reflétaient malgré elles leurs états d'âmes:

"-Z'avez du feu?" 

Le Corbeau et le RenardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant