Chapitre 13

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" Levi, c'est une occasion en or pour te faire découvrir au monde. Je sais que tu as tes élèves et leurs cours, mais je suis sûr que tu as composé de nouveaux morceaux depuis le temps. Alors, vient s'il te plait. "

On n'entendit rien d'autre que la respiration lente et posée de Levi pendant de longues secondes, montrant qu'il réfléchissait sérieusement à la proposition, pesant le pour et le contre.

D'un côté, il avait envie de faire ce concert, pour ses nouveaux morceaux qu'il avait travaillé et peaufiné pendant des heures, jours et nuits. Mais il avait aussi ses obligations de professeur, ses élèves qui travaillaient sûrement aussi dur que lui pour le satisfaire. Et il y avait Eren, Eren et sa passion pour la musique classique, Eren et son sourire lumineux, Eren et ses yeux hypnotisants, Eren et sa maladie.

" J'en suis. Le déplacement ne prendra pas plus que quelques jours ?
- Non, 4 à 5 jours maximum. Tu t'absenteras moins d'une semaine ne t'en fais pas. C'est donc un oui ?
- Humm, acquiesça le Pianiste. Mais sache que c'est bien parce que c'est vous et que j'ai pas mal de nouveaux morceaux. Seulement il y en a un qui n'est pas terminé.
- C'est pas grave, on peut toujours rejouer les anciens ils sont tout aussi géniaux. Bon du coup, je te rappelle ce soir ou dans les prochains jours pour te donner les dates. on entendit un cri hystérique lointain et Erwin soupira. Hanji est excitée au possible. Elle a débarqué chez moi dès que le chef l'a appelée. Et maintenant elle hurle de joie sachant que tu viens aussi. Je crois qu'elle va me faire perdre mes tympans... un autre cri digne des plus grands films d'épouvantes hurla dans le combiné.
- Mais dit lui de se la fermer ! Je viens de perdre mon oreille droite ! J'm'appelle pas Mozart moi ! Tu sais quoi, c'te bigleuse me paiera mes appareils auditifs puisque ça l'amuse tant de péter les tympans des gens, en plus de leur casser les couilles.
- J'ai pas assez de sous pour nourrir ma famille Lili, tu peux pas me faire ça ! Mes enfants vont encore plus crever la dalle ! la voix exagérément larmoyante et chevrotante d'Hanji résonna en complainte. Si vous plait, donnez argent pour pouvoir manger, prenez pas argent à moi. on entendit un "t'es pas crédible espèce de morfale" et Hanji éclata d'un rire stridante et euphorique.
- Bon sale folle de mes deux repasse moi le moins débile que je puisse raccrocher et finir mon ménage tranquille.
- Ce fut un réel plaisir de t'avoir au téléphone Lili, pour une fois qu'on peut t'entendre. Nous nous excusons en nous courbant bien bas pour avoir déranger votre ménage quotidien. la voix moqueuse d'Hanji contrasta avec ses paroles alors qu'on entendait que le téléphone lui était arraché de force.
- Je crois que c'est la plus longue discution que nous ayons jamais eue Levi ! Merci d'avoir accepté la proposition du chef d'orchestre. Tu ne le regretteras pas."

Sur ces paroles ils se dirent au revoir et Erwin raccrocha. Levi reprit son ménage habituel, le cours de ses pensées altéré par une soudaine anxiété. Quels morceaux devrait-il jouer ? Combien de temps devait-il rester sur scène ? Serait-ce une grande salle ? Y aurait-il beaucoup de monde ? Et surtout, combien de temps partirait-il loin de chez lui ? Loin de ses élèves ?

Le sentiment qui l'envahit n'était ni de la tristesse ni du désarroi. Il ne savait ce qu'il ressentait. Il allait quitter ses habitudes pendant un temps indéterminé. Bien qu'Erwin lui ait dit que ça ne durerait pas plus de quelques jours, ces journées passées loin de tout ce qu'il connaissait l'angoissait. De plus, la simple pensée de devoir laisser seul Eren le rendait vide de toute envie.

Le Pianiste se laissa tomber sur le canapé du salon la serpillère à la main, le front reposant sur le manche. Il devrait laisser Eren seul avec sa famille, seul avec ses amis, seul avec ses problèmes, seul face à ses angoisses, seul face à sa maladie. Et s'il lui arrivait quelque chose ?

Non non, il ne devait pas penser au pire. Eren était suivi et entouré, tout irait bien. Levi n'avait aucune raison de s'inquiéter, ni de se sentir étrangement vide. Il devait, au contraire, être excité et stressé, de ce stresse grisant d'avant concert. Il devrait être comme un enfant et préparer sa valise, préparer ses morceaux, peaufiner certaines partitions, retravailler d'anciennes mélodies un peu oubliées. Et pourtant... Et pourtant Eren ne sortait pas de sa tête. À croire qu'un charme avait été jeté sur lui.

Le front toujours appuyé sur le manche en plastique de la serpillère, il inspira fortement et se redressa droit sur les coussins du canapé. Son front était marqué de rouge à l'endroit où sa tête avait reposé, et il ne s'en rendit compte qu'en passant devant le miroir accroché près de l'entrée. Une grimace d'agacement et un grognement sourd furent la seule réaction qu'il eut. Les réflexions et angoisses sans noms qui s'emparaient de lui l'agaçaient au plus au point en même temps que de l'inquiéter.

Il n'était qu'11h et, bien qu'habitué à ces matinées de ménages intensifs, l'homme était fatigué. Fatigué de tout et de rien. Fatigué de tout faire et de ne pas bouger. Fatigué de réfléchir et fatigué de penser.

" Eh ben, je crois que la fatigue se transmet maintenant... Le gamin me l'a refilé à ce que je vois... chuchota Levi en s'allongeant sur son lit "

Il hûma l'odeur imprégnée dans ses draps, souriant sous les effluves du parfum d'Eren qui persistait encore. Ce gamin était devenu son centre d'attention ces derniers temps, ça le bouffait mais ça lui plaisait. Levi se sentait vivre, vraiment vivre. Rien que de s'inquiéter en permanence ou bien de se demander ce que l'adolescent pouvait faire le rendait fou de joie. Il pourrait tout faire pour lui ; la preuve, il lui écrivait même une mélodie.

Sonate Pour DeuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant