Chapitre 23

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Les applaudissements ne cessaient pas, et son cœur battait en rythme avec eux. Les larmes aux yeux et le souffle court, il s'était laissé retomber de tout son poids dans son lit. Sa poitrine lui faisait mal, le discours du Pianiste l'avait ému, rendu heureux, triste mais aussi jaloux de cette personne inconnue pour qui cette magnifique mélodie avait été écrite.

Il était tard, très tard, et trop tard. Il ferma les yeux, se repassant en boucle le concert imaginaire, la scène et le public inventé. Seul le visage et le corps de Levi n'était pas une invention, seulement un mirage.

Il se l'était représenté concentré sur ses touches, dans son propre monde, le visage d'une neutralité effrayante, les yeux fermés pour empêcher ses sentiments d'être captés par les spectateurs. Aussi, peut-être se trompait-il et Levi avait eu une toute autre expression, une autre façon de s'exprimer sur ce morceau si particulier. Et Eren aurait donné tout l'or du monde pour assister à cette prestation, seulement celle-là, pour le voir lui, pour voir ses doigts courir sur le clavier et décrypter son visage. Pour regarder les mouvements de son corps et le frémissement de ses cheveux corbeaux, le tremblement de ses paupières closes.

La présentatrice conclue la soirée par toutes sortes de louanges et de commentaires à propos du concert et de la dernière prestation de Levi, mais Eren n'écoutait plus, il avait toujours la mélodie en tête, elle courrait dans ses veines comme un cheval au galop. Mais elle finit par disparaitre peu à peu. Il ouvrit les yeux en entendant des pas précipités arriver en direction de sa chambre, jeta un coup d'œil à l'horloge murale et éteignit bien vite le radio réveil.

Une infirmière ouvrit la porte de sa chambre, un petit air furieux sur le visage. Elle lui lança un regard qui voulait tout dire en lui chuchotant de se coucher et de ne plus faire de bruit, puis elle repartie d'un pas léger et énervé.

Soudain la fatigue l'assaillit. L'adolescent bailla à s'en décrocher la mâchoire puis plongea plus profondément sous les couvertures. Il s'endormit en un rien de temps, bercé par le reste des accords qui jouaient encore dans sa tête.

* * *

Il avait fait un rêve épouvantable, un de ces rêves qui vous hantent même après votre réveil. Un rêve ou il perdait tout, plus que la vie. Il y perdait ses amis, sa famille, son esprit et finalement sa vie. Dans ce rêve, il devenait fou, et son imagination lui avait fait rêver les pires choses. Mutilation, folie, bipolarité... Il avait désormais une peur infinie de perdre la tête ainsi que les êtres chers à son cœur. Tellement qu'il s'en rongeait les ongles jusqu'au sang.

Armin faisait ce même rêve tant de fois depuis le malaise de son meilleur ami qu'il en venait à craindre le moindre son, à être perdu quand il ne voyait plus Mikasa près de lui. Il avait l'impression de devenir fou, comme dans son cauchemar. Le soir, il avait peur de dormir, redoutant le simple fait de rêver. Son grand-père s'était inquiété de le voir dans cet état, fatigué et paranoïaque, mais le blondinet lui avait assuré que ce n'était rien, seulement un petit choc mental causé par la perte de connaissance de son ami d'enfance.

Cela ne faisait que quelques jours mais il avait l'impression qu'il rêvait de la même chose effrayante depuis des lustres. Le week-end avait été la pire des tortures, il n'avait vu personne à part ses feuilles de cours et n'avait quasiment pas articulé de mots si ce n'est pour parler à son grand-père. Alors en ce lundi matin, Armin était heureux, bien qu'épuisé par son manque de sommeil.

En le voyant descendre du bus tel un mort-vivant, Mikasa accourut vers lui et le soutint. Elle lui lança un regard des plus inquiet, et le serra contre elle pour éviter qu'il ne s'écroule.

Sonate Pour DeuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant