Nicky vient de se tromper dans les paroles de la dernière chanson et nous rions tous deux comme des demeurés. Quand j'y pense, ce n'est même pas drôle mais vu notre état psychiatrique actuel, le fait d'imaginer Mémé Girard courir en maillot de bain réussirait à tous nous faire rire un bon coup. Sauf peut-être Bradley.
Eh ouaip, on est tous en train de devenir complètement fous, sauf lui.
Nous ne contrôlons en rien la situation même si nous avons envie de faire tout comme. Même lui.
Nous sommes en panique constamment, nous ne savons pas ce qu'il se passe mais nous faisons semblant d'avoir une solution, semblant de savoir encore combien de temps nous allons tenir.
Nous vivons déjà comme si nous étions morts, nous vivons bercés d'illusions, d'espoir. Nous vivons dans un monde qui n'existe pas.
Nous ne nous battons pas contre Thompson ainsi que le Gouvernement. Nous nous battons contre la mort.
Bientôt, notre stock de provisions va être vide et nous allons mourir de faim.
Peut être même qu'avant cela, le Gouvernement va nous trouver, par ma faute - à cette pensée, je réajuste ma capuche sur mon crâne - et nous exécuter en direct, à la télé.
Mais qui, actuellement, regarde encore la télé?
Qui n'a pas conscience de ce qu'il se passe?
Tout le monde veut fuir ce monde devenu dingue, personne ne veut se faire attraper par les chiens ou le Gouvernement. Et personne ne passe son temps devant la télé.
Nous participons tous à une course perdue d'avance, nous sommes tous alliés même si on ne peut rien faire pour aider les autres, nous sommes trop éloignés pour leur tendre la main alors qu'en apparence, nous sommes si proches. Nous courons malgré tout, mais nous redoutons la ligne d'arrivée. Nous redoutons la mort.
Pourtant, actuellement, j'aurais presque envie d'avoir encore assez de forces pour accélérer pour la dernière fois et arriver à cette ligne d'arrivée, parce que une fois que tu as passé la ligne, tu n'as plus le stress de savoir quand tu vas arriver, tu n'as plus aucun adversaire, plus aucun besoin de courir de nouveau. Tu as la paix.
Mais ça, c'est la décision facile.
Moi, je veux me battre, garder mon rythme, garder un oeil sur l'arrivée qui est si proche de moi mais qui ne me laisse pas passer.
《 Continue de courir encore un peu. Tu as encore à faire.》 Me murmure-t-elle.
Me battre pour rester dans la course avec tout le monde.
Alors c'est ce que je vais faire.Nicky s'arrête de rire à la vue de mon expression faciale.
- Bah, Gab, ça va pas? m'interroge-t-elle.
Mais Nicky, comment as-tu encore le culot de demander avec étonnement si ça ne va pas? Bien sûr que non ça ne va pas. Comment peux-tu avoir la force de rire si sincèrement? Moi qui croyait que nous devenions fous. Non, nous sommes plus réalistes que jamais.
J'ignore Nicky, quelle que serait ma réponse, elle répondrait que la vie est belle mais qu'il y a des obstacles à surmonter, que ça arrive. Je lui hurlerais carrément à la face que je n'en ai rien a faire de ses phrases de philosophe, que ses belles paroles elle peut se les garder parce que là, elles ne nous servent à rien. Que c'est la fin du monde. La fin. Que je ne sais pas pourquoi j'ai eu cette idée, de former une équipe dont je ne dirige rien.
Que si quelqu'un sait comment nous aider, qu'il vienne.Non, au lieu de ça, j'économise ma salive et je hoche la tête. Je ne veux pas la blesser. Elle s'inquiète aussi vite qu'elle pleure. Nicky, c'est un rocher sur lequel on peut s'appuyer de toutes nos forces pour se relever mais si on frappe ce rocher, il va se briser et on aura bien du mal à le réparer, le reconstruire.
- Brad, je lance, on ne devais pas passer par l'office du tourisme? Où as-tu trouvé cette carte?
- L'auto de ton père, déclare-t-il tranquillement. C'est une sacré bagnole d'ailleurs. Et puis, tout est en miettes. L'office du tourisme fait maintenant une belle ruine, ha ha ha!Ha. Ha. Ha.
Exaspération. Je retire ce que j'ai pensé, nous devenons tous fous.Je me concentre sur mon rythme de marche, sur mes pieds. J'ai failli tomber, concentre-toi Gab.
Nous avons bientôt parcouru 20 kilomètres et il est environ 13 heures, nous informe le chef ( C'est Mémé qui le surnomme comme ça ).
Bon sang, nous avons parcouru quasi 20 kilomètres en 5 heures ! Ce soir nous y sommes, au parking souterrain, alors ?
Je calcule avec difficultés...
Oui! Ce soir, on y est! Yeah!
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Le Dernier Survivant
AdventureLe soir de Noël, les familles du monde entier reçoivent un colis de la part du gouvernement de leur pays. A l'intérieur : de la dinde, du foie gras, des desserts,... Les présidents sont clairs : Tout le monde doit manger ce que contient le colis pou...