Chapitre 17 : La fuite

43 5 2
                                    

Je me trouve assis sur une chaise vraiment inconfortable dans une salle aux murs d'un blanc aveuglant.
Devant moi, il est en train de lire un livre dépourvu de titre, assis derrière un bureau massif, le seul meuble de cette pièce avec les deux chaises sur lesquelles nous sommes assis... Thompson.
Je comprends immédiatement que je suis dans un rêve, bien que mes sensations me donnent l'impression de vivre quelque chose de réel.
Peut-être est-ce quelque chose entre les deux...
Je toussote, comme pour lui indiquer ma présence.
Après quelques secondes durant lesquelles je me demande s'il m'a entendu, il corne enfin sa page et ferme son livre en levant paresseusement les yeux vers moi.
- Gabriel, souffle-t-il seulement.
Voyant que je ne réagis pas, il reprend.
- Je suis heureux de te voir.
Je ricane sans me soucier de cacher la haine que cet homme m'inspire.
- Ça n'est pas réciproque, vous savez, lui dis-je la voix moqueuse.
- Je suis sincère, m'interrompt-il presque, aucunement blessé mais visiblement agacé. Enfin, le temps m'est compté alors je vais te demander de m'écouter attentivement. Sans m'interrompre.
Je me marre de nouveau.
- Pourquoi vous écouterais-je? je demande durement, en le regardant droit dans les yeux. Je me fous de ce que vous avez à me dire.
- C'est vrai que tu n'as aucune raison de me faire confiance, admet-il sans sourciller, mais je te recommanderais d'écouter l'histoire que je vais te raconter. Simple question de... survie.
Il s'autorise un sourire, comme pour signifier que la discussion est close, puis rouvre le livre à la page cornée.
J'en reste bouche-bée mais je suis prêt à l'écouter. Après tout, ça ne me coûte rien.
Au mieux, ça pourrait nous aider pour la suite - j'en doute fortement - et au pire, s'il me raconte quelque chose d'horrible, j'aurais une bonne raison de le descendre, là maintenant, sans personne pour m'en empêcher. Depuis le temps que j'en rêve, c'est une opportunité à saisir.
Il commence alors à lire l'histoire, j'écoute ses paroles sans les entendre. Ce sont plutôt des images s'imposent à moi :

Nous dormons tous et un bruit d'éboullis nous réveille.
Au début, nous nous regardons sans comprendre, paniqués, mais rapidement, Courtney et Brad prennent les choses en main, comprenant que tout est en train de tomber en ruines : ils forcent tout le monde à se lever, rassemblent avec une rapidité incroyable les affaires dont nous avons le plus besoin, confient des sacs à chacun d'entre nous et nous poussent à sortir de la pièce.
Hors du vestiaire, la voix de Thompson apparaît non pas dans les hauts parleurs mais dans ma tête, il semble crier désespérément.
J'ai du mal à comprendre ce qu'il me dit, avec ce grondement assourdissant accompagnant les tremblements du sol.
Je me concentre tout en courant et je pense comprendre.
《 S'il te plaît... Je vais t'aider... N165... N165...》
Je continue de courir en essayant de marquer ses paroles au fil rouge dans ma tête, histoire de ne rien oublier, car je sais que c'est important.
- Gab, écoute! me crie Anna en tendant un doigt en l'air, sans s'arrêter de courir.
En effet, de fortes détonnations se font entendre, des chocs sourds à intervalles irréguliers, imprévisibles, qui semblent être au dessus de nos têtes.
À chaque nouvelle explosion, nous sursautons tous et crions faiblement.

Nous courons à en perdre haleine, je commence à respirer bruyamment, tout comme les autres.
Décidément, je ne me souvenais pas que aller de l'avant dernier étage du parking au rez-de-chaussée était si long.
Tandis que nous descendons à toute vitesse vers la sortie, des pans de murs s'écroulent sur notre passage.
Quand je vois enfin la sortie au loin, une vague de soulagement s'en prend à moi, mais elle me dure pas.
Des gens, des gens qui travaillent pour le Gouvernement - je les reconnais à leur uniforme couleur bleu ciel avec un G doré brodé sur le torse et sur les épaules - ils sont là, juste devant la sortie, des armes à la main. Ils nous attendent.

À cette vue, nous râlons mais continuons d'avancer car le plafond s'écroule également. Et juste derrière nous.

Ma vision se trouble mais je réussis à distinguer que les silhouettes bleues tirent sur nous. Sur nous ?!
- ARRÊTEZ! crie Courtney. LAISSEZ-NOUS PASSER!
Michiel se prend une balle en pleine course et s'écroule lourdement sur le sol. Puis Nicky.
Puis Anna.

Et je sens une balle m'atterir entre les deux yeux avec une douleur lacinante.
Je me vois m'écrouler à ses côtés, je sens le sang couler de mon front.
Les autres essayent aussi de se battre contre les gens du Gouvernement mais ils n'ont aucune chance.

- C'est tout. dit Thompson en fermant son livre dans sa main, comme s'il venait de me lire les faits divers du journal.
Je cligne les yeux d'un air idiot - j'en suis conscient - tant ce récit me sonne.
- Comment suis-je sensé réagir? je demande après un long silence durant lequel je touche instictivement mon front resté manifestement intact. Toute cette mise en scène veut dire quoi?
- Oh... Suis ce que ton instinct te dira au bon moment. C'est tout.
- Mais je ne...
- Il est temps.
Ainsi, Thompson se lève avec peine de sa confortable chaise, il disparait comme par magie et ma vue se brouille.
Le rêve est terminé.
Ma nuit aussi, j'imagine.

Je sens la main gelée d'Anna dans la mienne et j'entends loin, très loin, des bruits de moteurs et comme des hélices qui tournent à toute vitesse.
Je ne sais pas s'il s'agit d'un effet de mon imagination ou si c'est en train de se passer...
En tout cas, tous les souvenirs de ce rêve étrange me reviennent. Dans les moindres détails.
Je sursaute et me lève, je commence à rassembler mes affaires sans même me soucier de savoir si je suis silencieux ou pas.
Au plus vite les autres se réveillent, au plus vite on se tire d'ici.
Car il le faut. On doit partir. Avant qu'il ne soit trop tard.

Oui, peut-être que ce rêve - je n'arrive pas à le considérer comme un rêve mais plutôt comme une vision - n'est en rien prémonitoire et que je me jette dans la gueule du loup, mais si c'était vrai, et apparemment c'est le cas, vu les bruits d'hélicos, je m'en voudrai d'avoir été au courant que ça allait se passer et ne rien avoir fait.
- Courtney, Brad, Nicky! Debout! Anna, Michiel, Suzan! Réveillez-vous, je leur lance paniqué sans même les regarder.
J'entends des gémissements et des plaintes mais je sais qu'ils ont compris qu'il se passait un truc et je crois les entendre se lever.
- Gab, ronchonne Courtney derrière moi la voix pâteuse, tu fous quoi?
- Faites vos affaires, on se tire! je rétorque seulement en sentant une bouffée d'adrénaline s'en prendre à moi.
- Explique, réclame-t-elle en se levant tout de même.
- C'est une longue histoire mais crois-moi il se passe des trucs pas nets ici. dis-je.
- Pourquoi on s'taille maintenant? réplique-t-elle sans masquer une certaine impatience. On avait encore environ deux voire même trois heures de sommeil alors dis-nous ce qu'il se passe.
- Parce que dans deux voire trois heures, si on reste ici, on est morts! je m'écrie. Le Gouvernement va tout faire sauter!
Elle n'en demande pas plus, réveille tous les autres et commence à rassembler les affaires à mes côtés.
- Merci de m'écouter, Courtney. dis-je timidement.
- C'est bon, mec, au pire si t'as tout inventé j'te casserai les deux genoux.
Je tourne les yeux vers elle en souriant mais elle n'a aucunement l'air de plaisanter.
- C'est quoi ton plan une fois qu'on sera sortis? me murmure-t-elle sérieusement.
- Justement... Est-ce qu'il y aurait un autre moyen de sortir que de sortir par l'entrée principale?
Elle me jette un regard sceptique, comme si ce que je venais de demander était complètement débile et qu'elle regrettait soudain de m'avoir fait confiance.
Brad, Suzan et Michiel nous aident à ranger les affaires tandis qu'Anna s'acharne à essayer de réveiller Kévin avec l'aide de Tristan.
- Il y a les souterrains, répond finalement Courtney. Mais c'est pourri. Et je crois que... Mouais ça craint.
Nous fermons les sacs et les premières détonnations se font entendre.
J'essaye de rejetter le sentiment d'angoisse qui m'étouffe en demandant :
- Comment ça "Ça craint" ? Où ils mènent ?
Mais la réponse de Courtney ne fait qu'attiser ma panique.
- Dans les locaux du Gouvernement. On a failli se faire prendre, l'autre fois avec Nicky.
- On va devoir tenter l'entrée principale, dis-je tristement.
- Bah ouais c'est plus logique. s'incruste Bradley.
Mais une idée s'allume à l'intérieur de mon cerveau. C'est complètement fou mais des trois façons de mourir, celle-là me semble la meilleure.

Tout le monde est enfin réveillé, nous mettons nos manteaux et nos sacs sur nos dos en vitesse, nous sortons des vestiaires en courant et les explosions semblent encore plus inquiétantes que dans mon souvenir.
Ça craint.

Hey hey hey!
Le dix-septième chapitre touche à sa fin!
J'espère que l'histoire continue de vous plaire!
Commentez, partagez, votez!
Bref, comme d'habitude! :3
À samedi ;)

Le Dernier Survivant Où les histoires vivent. Découvrez maintenant