Nocturnes

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Akihito s'assit sur le siège de sa voiture, furieux qu'un policier ait quémandé son aide pour renverser le règne d'Asami : une fois de plus, on pensait qu'il était l'homme de la situation, qu'il était le mieux qualifié pour faire tomber Asami, qu'on le prenne pour une truffe, qu'on l'utilise à des fins personnelles. D'autant plus que ce commandant avait des hommes sous sa main pour faire ce travail, et Akihito n'était certainement pas l'un d'entre eux, il était journaliste, pas policier, il ne fallait pas confondre. Bon, okay, il rêvait de justice, il s'intéressait beaucoup aux affaires criminelles, mais ça s'arrêtait là, il n'avait pas non plus envie d'intégrer les rangs de la police. Et certainement pas contre Asami.

Déjà, il savait d'expérience qu'affronter Asami serait vain, inutile, et ce serait plus une perte de temps qu'autre chose, il le savait, il l'avait testé. En plus de beaucoup de patience, de calme, et de prudence, qu'il n'avait pas vraiment à cette époque-là. Il leva les yeux quand il se rappelait de ses tentatives pour pénétrer dans le club Sion armé de sa seule carte de membre, tentant sans franc succès de s'approcher du parrain de la scène de crime. S'il avait été honnête avec lui, la fois-là, il avait été curieux de rencontrer cette personne, lui faire face à nouveau, simplement pour lui faire ravaler son orgueil et son sourire omniprésent.

Sur le coup, il aurait hésité à l'embrasser ou à lui balancer son poing dans la figure, un peu des deux, admettait-il, au plus profond de lui-même. Au final, ça avait été effectivement le prendre dans ses bras et le flinguer dans une certaine mesure, certes, le sexe dans cette pièce sombre avait été génial, pour ne pas dire embarrassant, c'était uniquement parce qu'il avait fallu sauver le policier des griffes des hommes d'Asami. C'était l'essentiel. Il avait effectivement été une bonne distraction, simplement pas dans le sens où le policier l'avait entendu, naturellement. Akihito sourit narquoisement dans son rétroviseur, qu'ils essayent encore une fois de le manipuler comme un pantin, ça allait barder pour eux.

Il avait quand même quelques alliés, et pas que les connaissances d'Asami, Shinotake pour commencer, quelques uns de ses collègues, quelques policiers, des juges qui avaient apprécié son travail à l'époque. A présent, sa liste s'était allongée, grâce au prix Pulitzer, qu'il brandissait comme une épée dans leur direction. Pour montrer qu'il était devenu aussi intouchable qu'Asami. D'accord, il faudrait qu'il écrive d'autres articles tout aussi excellents que ceux qu'il avait pondu pour le New York Times, afin de mieux appuyer ses dires, cela dit, il conserverait une certaine notoriété. Rares étaient ceux qui obtenaient ce prix, rares étaient ceux qui avaient la chance de rencontrer le président de l'université de Columbia, rares étaient ceux qui avaient eu sa chance à lui. Il avait pourtant conscience que s'il voulait garder sa place,  il lui faudrait se battre ! A la loyale !

- S'ils osent encore un coup pareil !

Et ses mains se crispèrent sur le volant à la seule pensée qu'Asami puisse tomber, bien malgré lui, il ne pourrait pas vivre sans lui, ne se sentirait pas le courage d'aller le voir dans une prison, d'être séparé de lui de quelques centimètres à cause d'une paroi de plexiglas, de ne plus le toucher comme la nuit dernière.

- Qu'ils me foutent un peu la paix, et ça ira un peu mieux pour moi. S'ils pensent comme avant que je suis la seule personne capable de faire face à Asami sans dommage, la situation sera encore pire qu'il y a dix ans. Et je n'ai plus envie de me retrouver dans un sac de noeuds. Mais alors là, plus du tout ! Je n'ai pas quitté ce pays pour encore avoir affaire aux ennemis d'Asami.

La colère d'Akihito était telle qu'il ne remarqua pas que le feu était passé au vert, il lui fallu un coup de klaxon, des passants interloqués, des gens qui sortaient de leurs voitures, et plusieurs agents de police pour se rendre compte qu'il devait avancer. Présentant ses excuses aux agents de police, il prétendit que la nuit précédente avait été agitée, et que le stress ne lui réussissait pas.

Dans la tourmenteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant