Je sais ce que vous voulez que je vous dise, chers lecteurices. Vous voulez que je vous annonce que Joël a repris ses esprits. Que Jasmin l'a retrouvé, s'est expliqué, et l'a consolé de l'horreur qu'il venait de subir. Vous voulez que je vous dise que Joël a mis à jour la perfidie de Iago, et que ce dernier à enfin écouté ses scrupules pour se retourner contre Jafar.
Ce n'est pas ce que je vais vous dire.
À la place, je vous parlerai de la façon dont Joël s'est introduit dans la chambre de Jasmin. Je vous dirais qu'il s'est glissé derrière la tête de lit, roulé en boule, et qu'il a attendu...
Oui, au risque de paraphraser l'un de mes très estimés collègues narrateurs, si vous voulez lire une histoire belle et douce où les protagonistes évoluent en paix, vous pouvez toujours quitter ce chapitre et retirer cette histoire de votre bibliothèque. Oui, peut-être que cela vaudrait mieux. Si vous n'avez pas envie de vivre l'angoisse de Joël, caché derrière ce lit, recroquevillé sur lui-même... Le cœur battant à tout rompre, assez fort pour masquer tous les autres bruits, toutes les autres pensées... Les mains crispées sur ses habits... La vision rendue floue par des larmes amères...
Il tremblait de tout son être, pauvre Joël. Il avait peur. Il avait peur du moindre courant d'air, du moindre bruit extérieur. Chaque ombre semblait receler un regard. Chaque mouvement semblait être l'amorce d'un coup. Il sentait encore les mains de la brute le plaquer au mur, le plaquer au lit, il sentait ses doigts s'enfoncer dans sa joue, sa veste se déchirer, et l'angoisse, l'horreur, le désespoir de sa propre impuissance.
Rapace est mort. Rapace est mort. Il ne peut plus m'attendre. Si j'attrape la lampe, personne ne pourra plus m'atteindre, répétait-il en son for intérieur, encore, et encore, comme pour graver les mots dans sa chair, comme pour s'en persuader. Il évitait de penser à Jasmin. Il évitait de penser à Aladdin. Il évitait lae génie. Il se concentrait sur ce qu'il devait faire pour s'en aller, pour fuir ce lieu qui lui était devenu odieux, et pour ne plus jamais revivre une chose pareille.
Un bruit ténu faillit le faire bondir de sa cachette.
La porte. La porte venait de s'ouvrir. Un cliquetis indiqua qu'elle s'était refermée. Joël s'enfonça un peu plus dans sa cachette, terrifié à l'idée d'être vu.
-Aladdin, lança la voix de Jasmin, avec cette intonation triste qui la caractérisait si bien ces derniers temps. Tu devrais le libérer.
Entendre cette voix fit un choc à Joël. L'envie de jaillir hors de sa cachette pour se précipiter dans les bras de son ami se fit soudain brûlante, si tentante qu'elle en était presque douloureuse. Il crispa les mains sur ses genoux, plaqués contre sa poitrine, et s'obligea à ne pas bouger. Il ne fallait pas se déconcentrer.
-Je ne sais pas, répondit Aladdin avec un soupir.
Joël entendit un craquement, et devina qu'il s'était assis sur le lit, tout près de lui.
-J'ai l'impression d'avoir mal agit avec lui, et je ne sais pas quoi lui dire...
Nouveau soupir.
-Je ne comprends pas ce qui m'arrive, reprit Aladdin. Mes pensées n'ont jamais été aussi complexes et embrouillées qu'à présent. D'habitude, la voie à suivre s'ouvre clairement. Je réfléchis au problème, et je suis la solution la plus logique...
-Mais les sentiments n'ont aucune logique, mon cher voleur, finit Jasmin avec douceur et, sembla-t-il à Joël, un sourire caché.
Le lit craqua de nouveau. Il y eut un tintement étouffé.
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Le Prince, le voleur, et la lampe merveilleuse (BxB)
FanfictionGagnant Wattys 2020 ! --------- Il était une fois une ville gigantesque, tout un royaume de misère et de dépravation. À l'intérieur se trouvait un prince vaniteux et égoïste. Un voleur au cœur pur, sans passé et sans mémoire. Un sorcier cupide aiman...