Le Maître Des Éléments

Chapitre 7 : Épreuve Du Feu

Après cet entrevue, je rejoignai mon père et Marcus qui marchaient en direction de la maison. Après leur avoir raconté ce qu’il venait de se passer, je demandai :

- Qu’entendait le roi par une faute impardonnable ?

- Un traité a été passé il y a des décennies de cela, commença mon père en regardant le ciel. Nous pouvons combattre ensemble, mais il est formellement interdit de s'attaquer entre nous tant qu’il y a un atout de confirmé. En revanche, un roi sans atout peut être attaqué et s’il est vaincu, il doit céder sa patrie au vainqueur.

- Je ne laisserais jamais faire cela, affirmais-je d’un ton ferme.

Je fermais mes poings qui commençaient à prendre feu, le reflet des flammes dansaient au creux de mes pupilles.

- Je protègerai mon pays et le peuple. Je le jure sur mon nom et mon honneur.

- Tu as raison mon garçon, dit Marcus en prenant mes mains pour étouffer les flammes. Ce sont de bonnes paroles, c’est pour ça que nous devons nous entraîner dur, je serai là avec toi pour ça.

- Pour notre roi, hurla mon père avec son épée pointant le ciel.

Nous le suivions mon maitre et moi en cœur, puis nous poussions un petit rire pour nous détendre. Nous étions joyeux et rentrions l'esprit léger.


Le lendemain, mon maître vint me chercher comme tous les matins, de bonne heure. Après avoir bu notre café matinal, nous partîmes au même endroit que d'habitude.

- Regarde bien petit, lança mon maitre avec un sourire en coin.

Il colla ses poignets, les mains ouvertes l'une en face de l’autre. Il en sortit une énorme boule de feu qu’il lança vers le ciel. Puis, il mit sa main en rond devant sa bouche pour lancer une bulle d'eau qui engloba la sphère de feu. Avec son index et son majeur, il lança deux éclairs qui contrôlaient ce magma d’énergie, puis créa une coquille de terre autour de ce déchaînement de puissance. Ce dernier s’écrasa avec fracas au sol encore chaud et fumant.

- Voilà, tu dois apprendre à manier tous les éléments pour les combiner. Tu as jusqu’à ce soir.
Il éclata de rire. Je le regardais l'air bête, avec des yeux vides.

- Ça va, ça va, je plaisante, reprit-il avec un sourire moqueur. Je ne peux pas t’en demander autant ce serait surhumain. Tout d'abord tu vas t'entrainer à contrôler le feu, bien qu’il ne te sera d'aucune utilité contre cette Aurora. 

- Mais… et l'entrainement au combat ? Nous arrêtons ? Demandais-je toujours les yeux exorbités.

- Bien sûr que non, répondit mon mentor avec un air décidé. Nous continuerons au fur et à mesure. Bien, essaie de te concentrer et créer une boule de feu que tu peux maitriser et ne pas te laisser dépasser, dit-il avec un rire légèrement forcé.

Je m'exécutai sans plus attendre, avec ma main gauche j’attrapai mon poignet droit, ma main était tournée vers le ciel. Une bille de feu en sortit, qui se dégonfla l'instant d’après. Je paraissais ridicule comparé à la colonne de la dernière fois.
- C’est bien, continue comme ça, lança mon maitre en regardant mes mains brûlantes.

- Marcus, je me ridiculise, je n'arrive pas à me concentrer, répondis-je en regardant le sol dépité.

- Hé, tu crois que j’ai commencé où quand j'avais ton âge. Tu ne peux pas être bon à tous les coups, tu es là pour apprendre, dit-il d'un ton autoritaire.


Les heures passaient, je réessayais après chaque échec. Plus le temps filait, plus les sphères grossissaient. Malgré leur taille, la durée était trop courte.

- On arrête la pour aujourd’hui, lança mon maître en se frottant les yeux, je commence à être fatigué.

- Pas de soucis Marcus, je vais rester ici et continuer seul pour prendre de l'avance sur demain.

- Il en est hors de question gamin, répondit-il en fronçant ses énormes sourcils. Imagine qu’il arrive quelque chose, qui te stoppera ? Hein ?

- D'accord, lâchais-je dans un profond soupir, je vais aller vois mon frère aîné, voilà fort longtemps que je ne lui ai pas rendu visite.

- En voilà une bonne idée, salue le de ma part, dit-il en se retournant. A demain, sois en forme, continua mon maitre en me faisant un signe de la main.

- A demain Marcus. Reposez-vous bien.


Je prenais donc le chemin de la ferme. En marchant, j'essayais de faire le vide dans mon esprit. Je faisais le point sur tous les événements passés. Une quinte de toux me pris et mettant ma main par réflexe, je remarquai que j’avais craché quelques flammes ce qui me fit sourire.

- Marcus est vraiment fort, me dis-je à moi-même. Il a raison, je dois faire abstraction de tout pour y arriver.

Je fermais les yeux, respirais un grand coup pour tout expirer par la suite. Tout ceci me valut de créer une boule de feu, mais en trébuchant sur une pierre elle vint légèrement enflammer l'herbe près de moi. Je me relevai rapide comme l’éclair, pour éteindre les quelques braises avec ma botte.

- Pfiou, il faut vraiment que je fasse plus d'exercices de concentration, pensais-je en  m'essuyant le front.

Une fois arrivé devant la ferme, je vis mon frangin dans la cuisine. Comme à son habitude, Tyron déboula pour aboyer, sauter sur la clôture et grogner.

- Nichols, entendais-je au loin.

Dans le soleil couchant, je mis ma main sur mon front, comme pour protéger mes yeux et saluer mon frère avec joie.

- Salut frangin, comment vas-tu ?

En arrivant à sa hauteur, je vis qu’il était torse nu et que tout son poitrail était bandé.

- Mais que t’es-t-il arrivé ? Demandais-je vraiment surpris.

- Entre plutôt, ne t’inquiète pas rien de grave.

Je fis ce qu’il me dit et en fermant la porte il continua :

- Je suis tombé sur un cheval récalcitrant il faut croire. Ses premiers fers ne devaient pas lui plaire et je me suis pris ses deux sabots dans les côtes.

- En effet, il ne t'a pas loupé, tu vas mieux maintenant ? Depuis combien de temps es-tu comme ça ?

- Une semaine, répondit-il du Tac-o-tac, mais rassure toi, cela ne m’empêche pas de bosser, ria-t-il. Que fais-tu là ? Cela fait un bail que je ne t'ai pas vu, papa m'a tout raconté alors que j’étais convié au château pour ferrer un nouveau cheval de la garde. Alors, comment ça se passe avec ton maitre ? Demanda-t-il en frottant deux morceaux de bois dans la cheminée.

Je m'approchais de lui, et formais un petite boule de feu, juste ce qu’il fallait pour embraser les bûches de bois.

- Comme tu peux le voir, ça se passe très bien, annonçais-je fier de moi.

- Woah, fit mon frère hébété et surpris. Alors ça, c’est la classe. Je suis vraiment content pour toi. Ça me fait tellement plaisir que tu sois venu me voir.

- Moi aussi, tu sais. Ces derniers temps, je suis tellement occupé, je n’ai de temps que pour l'entrainement et rien d'autre. Il faudrait que tu passes à l'occasion.

Alors que nous nous mettions à table, mon frère servit deux assiettes de ragoût fumant.

- Oui, tu as raison, mais j'ai tellement de boulot. Je n'ai même plus le temps pour passer voir maman, ni même Joshua.

- D’ailleurs, comment va-t-il, demandais-je inquiet de la réponse.

- Et bien… commença mon frère, comme je te le disais, quand j’ai l’occasion d'aller au château, je passe le voir. Il déprime toujours, il m'a demandé si tu lui en voulait encore pour la dernière fois.

- C’est pas vrai, lançais-je énervé, il faut qu’il arrête avec ça. Bien sur que je ne lui en veux pas. C’est du passé.

- Tu as bien raison, mais cela explique la baisse de son moral. Comme je te le disais, j’ai tellement de travail, je me tâte depuis quelques semaines à prendre un apprenti.

- Ho, mais quelle bonne idée, dis-je en acquiesçant de la tête, tu as bien raison. Mais d’ailleurs, ça ne te dirais pas de prendre Joshua avec toi ? Travailler entre frères ça pourrait être sympa.

- Hum…, fit-il entre ses dents. J'y ai bien pensé, tu t'en doutes. Tu le connais, avec sa fierté, laisser tomber son échoppe serait un échec pour lui. Et puis, il y a peut être un moyen de faire décoller son affaire.

- Ha bon ? Lequel ? Demandais-je en haussant les sourcils.

- Et bien, réfléchis deux secondes. Il va bien falloir que tu te forges un équipement n’est-ce pas ?

- Ha d’accord, je vois où tu veux en venir. Et bien dans ce cas, j'achèterai toutes les matières premières chez lui et en toucherai quelques mots au roi.

- Voilà qui pourrait lui faire plaisir, dit-il en avalant bruyamment la sauce.

- En tout cas, l’idée de l'apprenti est très bonne. Je pense même que ce serait bénéfique, continuais-je en essuyant mon assiette avec du bon pain bien chaud.

- Ne t’inquiètes pas, je te tiendrai au courant, ajouta-t-il. Bon il se fait tard, tu dois rester en forme pour bien t’entrainer.

- Oui en effet, merci encore pour ce délicieux repas, j'essaierai de repasser dans quelques temps.

- Ne t'en fais pas petit frère, me dit-il en posant sa main sur mon épaule, même si on ne se voit pas trop en ce moment rien ne nous empêche de penser l'un a l’autre n'est-ce pas ?

J'acquiesçais de la tête, et leva la main en guise de salut. Puis je repris la route du retour.
Le lendemain et les jours suivants, je m'entrainais d'arrache-pied. Je m'améliorais de jour en jour. Mon maître me montrait aussi comment absorber le feu. Il créait une boule et moi je mettais ma main au dessus pour apprendre à l'aspirer.

Quelques jours plus tard, je commençais à maitriser mon art, je vis au loin une petite silhouette qui nous observait. Je compris que c’était Aurora. Ses deux yeux jaunes sous sa capuche de cuir la trahissaient. Je ne comprenais pas la raison de son espionnage furtif. Au moment même où je la repérais, elle disparaissait dans une vision trouble.

- Qu’est-ce ce qui t’arrive fiston ? Demanda mon mentor en se grattant la barbe. Quelque chose ne va pas ?

- Aurora nous observe Marcus, répondis-je en chuchotant.

- Ha bon ? Et pourquoi parles-tu à voix basse ? Chuchota -t-il à son tour pour se moquer de moi.

- Très drôle, fis-je avec une grimace aux lèvres.

- Ne t'en fais pas, reprit-il, elle ne tentera rien sans l’ordre de son roi et ce n'est pas dans son intérêt, crois moi.

- Je voulais vous demander, me faudra-t-il une armure ? Lançais-je, l'air de rien.

- Bien sur, quelle question. Nous la commencerons dans peu de temps, répondit-il en me dévisageant.

- Très bien, alors reprenons tant qu’il fait encore jour.