Teach Me Love...

Chapitre 13 : April

Bon sang... Qu'est-ce qui m'as pris d'accepter ? Je suis vraiment bête... ! S'il a appelé mon père, alors il a dû apprendre qu'il n'a jamais refusé que je prenne ces cours particuliers et il risque de se poser des questions sur le pourquoi de mon mensonge. D'ailleurs, je suis presque sûre qu'il le sait. Lorsqu'il m'a parlé de cet appel téléphonique, il semblait attendre quelque chose... Sûrement une explication, la vérité... Je ne suis vraiment pas douée...
Alors que je me maudits d'être aussi idiote, une question s'offre soudainement à moi : pourquoi s'intéresse-t-il autant à moi ? Je ne suis rien de plus qu'une simple élève pour lui, non ? A ses yeux, je n'ai aucune quelconque espèce d'importance, non ? Alors... Pourquoi ai-je l'impression que je suis importante pour lui... ?
Je soupire. Mon imagination ne cessera donc jamais d'inventer de nouvelles choses idiotes, ridicules ou exaspérantes, hein ? Mais d'un autre côté, comment ne pas penser de telles choses lorsqu'il remarque des choses que personne d'autre ne remarque ? 4 mois. Ca fais 4 mois qu'on se connait et pourtant, il est le seul à avoir remarqué que je souffrais à cause de mon genou. Même mes meilleurs amis, Allie et Adam, n'ont rien vu alors comment a-t-il pu le remarquer ? Ce que je m'apprête à dire est très étrange, je le sais parfaitement, mais pourtant, je ne peux m'empêcher de le penser : il me connait déjà bien mieux que quiconque.
Une nouvelle fois, je soupire. Cette imagination si folle commence réellement à dépasser les limites du possible, du pensable ou même du réel et, me dirigeant vers l'infirmerie comme je l'ai promis à celui qui m'obsède bien trop, je ne trouve plus la force de bouger. Brusquement, je me sens plus misérable que n'importe qui. Une personne comme moi ne devrais rien avoir à faire ici et elle devrait encore moins causer du souci à des personnes comme lui...
J'ai toujours pensé que, dans la famille, c'était moi la plus forte. Après tout, c'est le rôle que tout le monde me donnais, sans jamais chercher à voir plus loin. J'y croyais, allez savoir pourquoi. Peut-être que ce jeu me donnais l'impression d'être vivante ou tout simplement importante aux yeux de tous mais maintenant, je réalise à quel point tout ça était débile. Me cacher dans cette maison abandonnée pour être « moi » était débile. D'ailleurs... Ai-je seulement une fois vraiment été moi ? A vrai dire, je ne suis même pas sûre de savoir ce que « moi » signifie. Ou alors je ne le sais plus... ? Bonne question... Depuis quelques temps, elle ne cesse de me hanter. J'aimerai tellement que quelqu'un me dise ce que cela signifie mais on me prendrait très certainement pour une folle. Enfin... C'est sûrement déjà le cas vu les regards qu'on me lance chaque jour...
Désormais dégoûtée de toutes les personnes qui m'entourent mais également de cette personne que je suis supposée être, j'oublie la promesse faite à mon professeur et sors du lycée, au milieu de tous les autres élèves qui ont réellement terminé les cours, pour retourner dans cette maison où je me suis blessée mais qui reste tout de même le seul endroit où je me sens vivante.
Sur le chemin, je ne fais attention à rien, plongée dans ma musique. Hug Me. Cette chanson est la seule qui parvienne à me rassurer. Je la passe en boucle, sans m'arrêter, jusqu'au moment où j'arrive enfin dans ma cabane pour m'y laisser tomber. Je retrouve immédiatement pégase et ne peux m'empêcher d'esquisser un petit sourire en le voyant. Le serrant fort dans mes bras, je décide de profiter du temps plutôt doux d'aujourd'hui et sors me coucher sur l'herbe fraîche déjà bien haute, et regarde le ciel sombre, reflet de mes pensées actuelles. J'aimerai qu'il pleuve... La pluie est quelque chose de magnifique selon moi, je ne comprends pas les personnes qui n'aiment pas ça, qui préfèrent le soleil, je les trouve ridicules. Le soleil n'a rien de particulier, je le trouve ridicule. C'est bête, je sais, mais c'est ce que je pense.
Posant pégase à mes côtés, j'attrape mon petit carnet et recommence à y écrire, sans vraiment faire attention à ce qu'il se passe autour de moi, la musique toujours dans mes oreilles.

« La vie n'est qu'un courant illimité d'instants critiquables et éphémères dont les souvenirs finiront tous oubliés. Dans l'incessant courant des âmes faibles et humaines, des règles irréfléchies sont insaturées pour nous ôter l'envie de vivre, pour nous réduire à moins que ce que nous sommes. Survivre ou vivre sont deux choses bien différentes mais pourtant, dans notre monde, ces deux termes ont la même signification aux yeux de tous. Nous cherchons tous ce petit quelque chose qui nous fera nous sentir vivants mais à quel prix ? Nous perdons nos âmes, nous perdons nos cœurs à chercher cette chose qui nous entoure depuis toujours. La vie n'est qu'un incessant courant d'évènements répétitifs qui nous font seulement vivre alors que nous sommes nés pour...»

Je m'arrête d'écrire, une goutte d'eau venant s'abattre sur mon cahier. En levant la tête, je sourie légèrement. Ca y est, il pleut.
Je range mon petit carnet dans mon sac et le lance dans la cabane alors que je m'allonge de nouveau sur l'herbe désormais mouillée pour fermer les yeux et me laisser recouvrir par la pluie. Bien vite, je sens l'eau s'immiscer jusque dans ma peau. Le vent vient souffler sur moi et, à ce moment-là, je devine que je vais tomber malade mais à vrai dire, je m'en moque éperdument. Je reste allongée, là, sans bouger, la même musique toujours dans mes oreilles et en quelques minutes, mes yeux se ferment pour me laisser porter par les bras de Morphée.

***

- Idiote, t'étais où ?

En arrivant au lycée, exténuée, je me fais de suite agresser par Allie qui me saute dessus, suivie de près par Adam qui semble de suite inquiété en me voyant. Il pousse Allie afin qu'elle s'éloigne de moi avant de poser ses mains sur mes épaules pour me faire le regarder dans les yeux.

- April ? Ça va ?
- Oui pourquoi ?, dis-je faiblement.
- T'es toute pâle.

Je rie légèrement, dans l'espoir de lui montrer que ce qu'il dit est ridicule, mais ma voix cassée ne m'aide pas du tout et, malgré mon intention de lui mentir, il s'inquiète encore plus.

- Viens avec moi, je vais t'emmener à l'infirmerie, dit-il en prenant ma main.
- Non... !
- Pourquoi ?

Alors qu'il s'apprêtait à m'entraîner de force à l'infirmerie, je le retiens.

- Parce que je préfère aller en cours...
- Tu veux nous faire un malaise ou quoi... ?
- Mais non idiot, fais-moi confiance, lui dis-je avec un petit sourire.

Il n'est toujours pas convaincu et me le fait parfaitement comprendre en me lançant un regard en biais mais je le rassure directement en lui faisant un léger bisou sur la joue qui le surprends au plus haut point. Pour seule réponse à cette action, Allie explose de rire. Je me tourne vers elle en riant pour lui demander ce qu'elle a mais, bien trop prise dans son fou rire, elle n'y fait même pas attention. Je me tourne donc vers Adam dans l'espoir qu'il comprenne ce qu'il arrive à cette folle tout d'un coup mais il détourne immédiatement son visage et ne me répond pas, faisant mine de soudainement s'intéresser au paysage qui nous entoure, j'ai nommé la cour.
Je suis complètement perdue entre ces deux idiots qui n'ont pas l'air décidés à tout m'expliquer de sitôt et je remercie alors le bon dieu de faire retentir la sonnerie à ce moment même afin de ne plus les entendre.
Je pars directement vers mon premier cours de la journée sans faire attention à ce qui m'entoure, la tête bien trop prise à tout faire pour masquer ma douleur au genou ainsi qu'à la poitrine causée par ma débilité de la veille.