Chapitre 28 : Mateo

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- Monsieur ?

Je relève faiblement la tête en grognant légèrement, quittant mon cahier du regard pour le poser sur Adam et Allie qui me fixent d'un regard que je qualifierai très certainement d'inquiet mais je n'y importe pas une grande attention, étant bien trop fatigué pour chercher un quelconque sens à ce regard qui m'importe peu.
Allie semble hésiter lorsque mon regard se pose sur elle et son ami mais, après avoir jeté un petit regard en coin à son ami qui le lui rends bien rapidement, ils hochent simultanément la tête avant de reposer en chœur leur regard sur moi, perdu par ce petit jeu qui se joue entre eux deux et auquel je ne comprends strictement rien, et de prendre la parole.

- Vous allez bien ?, me demande Allie.
- Oui. Pourquoi ?
- Et bien..., commence-t-elle, peu sûre d'elle.
- Vous n'en avez absolument pas l'air, termine rapidement Adam, d'un ton bien neutre. Presque trop sec pour que je puisse imaginer qu'il soit celui qui s'est rendu compte de mon état assez pitoyable récemment.
- Et pourquoi n'en aurais-je pas l'air ?, lui demandais-je sur le même ton que lui.
- Vous avez l'air... Euh... « Dépressif » ? Oui, voilà, dépressif, dit Allie, rapidement.

Moi ? Dépressif ? A ce point ? Peut-être, je n'en sais trop rien. A vrai dire, je ne suis pas sûr de savoir quoi que ce soit en ce moment-même mais ce n'est pas très important j'imagine alors à quoi cette conversation peut-elle bien servir ?
Rassemblant toutes mes feuilles ainsi que mes cahiers en un seul et même tas très rapidement, je leur fait remarquer qu'ils vont arriver en retard à leur prochain cours qui se trouve être philosophie et, d'après ce que j'ai cru comprendre, ces derniers temps, c'est assez compliqué entre Sabrina et ses élèves alors j'osais espérer que ça les encouragerai à me laisser seul le plus vite possible mais très vite, mes illusions tombent à l'eau puisqu'Adam prends la parole, comme pour m'empêcher de m'échapper.

- Madame Richard ne vient pas aujourd'hui mais c'est justement elle qui a confirmé nos inquiétudes en ce qui vous concerne.
- Comment ça ?
- Nous avons tous bien vu que vous n'aviez plus cette pointe de taquinerie que vous aviez tellement en début d'année, intervient Allie.
- Lorsqu'elle dit « tous », ça sous-entends nous deux tout comme madame Richard ou les autres de la classe, complète Adam.
- Si je peux me permettre, j'ai bien vu que tout ça avait commencé lorsque... Lorsqu'April est partie mais récemment, ça semble s'aggraver de jours en jours.

Mon regard se fait de plus en plus sombre alors qu'elle poursuit ses explications, de moins en moins sûre d'elle.

- Je sais que maintenant, nous n'avons plus aucun moyen de la contacter mais elle reviendra très certainement assez rapidement et... Et nous pourrons tous la revoir une fois qu'elle sera de retour alors... Alors vous devriez sûrement prendre plus soin de vous parce que... Parce que je ne pense pas qu'elle aimerai vous voir ainsi...
- Rien ne permet d'affirmer qu'elle reviendra si vite que ce que tu dis, Allie, et tu le sais aussi bien que moi alors ne dis pas quelque chose lorsque toi-même tu n'y crois pas, ce n'est absolument pas crédible, crois-moi. Et aussi, rien ne dit que je suis en mauvais état par la faute d'April alors pourquoi est-ce que tu viens me parler d'elle aujourd'hui ?

Elle semble prise de court par mes paroles plutôt sèches que, je dois bien avouer, je regrette immédiatement. Je sais bien qu'elle ne voulait pas être méchante ou blessante ou je ne sais quoi encore mais... Mais je n'y peux rien... Ça me blesse terriblement de savoir que, cette fois, je suis vraiment impuissant face à tout ce qui lui arrive et je n'arrive pas à m'y résoudre, ce qui, je le sais, est totalement idiot puisque je n'ai pas vraiment d'autre choix que d'accepter cette faiblesse qu'on m'incombe aujourd'hui mais c'est plus fort que moi, je n'arrive absolument pas à contrôler cette douleur qui prend chaque jour un peu plus part en moi.

- Je... Je suis désolée...

Elle semble comme choquée par mes paroles des plus franches alors qu'Adam me jette un regard froid. N'y prêtant cependant pas la moindre importance, je me contente de prendre mon sac d'un geste maladroit et rapide si bien que, en quelques secondes, il se retrouve par terre, laissant s'éparpiller le peu d'affaires qui s'y trouvaient sur le sol. Que ce soit Allie ou Adam, ils se baissent tous deux pour m'aider à ramasser mes affaires lorsque, relevant le regard pour les remercier, je vois Adam qui feuillette le carnet d'April avec un regard indescriptible. Sur le coup, je ne réalise pas vraiment ce que je fais et, en quelques secondes à peine, je lui reprends violemment ce carnet qui se trouve être la seule chose qui me relie encore à elle. Absorbé par ce carnet qu'il a très certainement reconnu dès qu'il l'a vu, il sursaute presque lorsque je lui reprends mais, reprenant bien vite ses esprits, il me regarde dans les yeux avant d'ouvrir la bouche pour parler, encore sous le choc, pointant faiblement le carnet qui se trouve désormais dans mes mains.

Teach Me Love...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant