Chapitre 31 :

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Mon cœur battait à tout rompre. Le sang dans mes veines parcourant l'entièreté de mon corps à la vitesse d'une formule 1 qui file sur la piste à vive allure. Les membres en toges ne m'avaient pas encore remarqué caché sur ma poutre. Cela ne durerait pas. Je me recroquevillais sur moi-même essayant de disparaître, mais je n'étais pas invisible. Je n'étais pas non plus un caméléon dont la capacité est de se dissimuler aux yeux du monde par d'habiles camouflages. Je tremblais de peur. Mes petits membres s'agitaient sans que je ne puisse les calmer. L'adrénaline s'accumulait dans mon corps de vison. Un corps qui réagissait à l'instinct. Il fallait que je bouge; là tout de suite : courir !

Mes yeux se posèrent sur une bouche d'aération de l'autre côté de la poutre sur laquelle j'étais perché. Mon échappatoire ! Je sprintais le long du morceau de bois poussé par une impulsion puissante. Le long corps parfaitement articulé filait rapidement sur la surface vernis. Cette fois-ci j'oubliais toute discrétion tandis que mes griffes crissaient sur le bois.

Je me voyais déjà tiré d'affaire lorsqu'une tasse en porcelaine immaculée se brisa contre la poutre, juste au niveau de mes hanches. Les membres de la Secte m'avaient repéré à présent. Si près du but ...

Pris de court, je basculai dans le vide accompagné par quelques débris de tasse. Les muscles de mes pattes antérieures se contractèrent afin de contrecarrer ce déséquilibre. La douleur qui venait de naitre dans mon articulation ne m'aidait pas à me stabiliser. Je grinçais des dents afin de résister. Mon postérieur continuait à basculer dans le vide, mes griffes cherchant les prises dans le bois clair. J'allais tomber !

-Un rat ! hurla une femme dans un cri hystérique.

C'était si difficile que ça de reconnaître un mustélidé ?!

Survivre ! Á cette pensée je repoussai le mal qui plantait ses crocs dans ma hanche pour me servir de mes postérieurs. Je serrai encore les dents tout en me hissant avec grands efforts sur la poutre. Ca chauffait dans la pièce. Les membres de la Secte dissimulaient tous leurs visages sous leurs capuches et se dispersaient. Plusieurs cherchaient à sortir des armes pour se lancer dans la traque. Mais tandis qu'en extérieur, ils étaient des as de la synchronisation et de la mécanique bien huilée, en intérieur personne ne savait quoi faire. Tirer, lancer une lame, fuir... Leur confusion me permettait de gagner du temps. Je poursuivais ma course sur la poutre, freinant à la dernière seconde pour m'arrêter le nez contre la grille blanche. Je n'avais pas de temps à perdre. Á l'aide de mes dents et mes griffes lames de rasoir je démontais le morceau de plastique qui me barrait la route vers la sortie. Je souffrais lorsque la zone touchée par la porcelaine brisée rencontra les parois serrées du trou étroit que mes crocs venaient de percer dans la bouche d'aération.

Je ne m'arrêtais pas dans ma course malgré le plastique tranchant qui m'arrachait des touffes de poil brunes. Les tuyaux constituaient un véritable labyrinthe et dans ma précipitation, il était impossible de distinguer le meilleur chemin à prendre. Je ne sentais aucune odeur m'indiquant l'extérieur. Seul de longues galeries en aluminium me faisaient face. Le brouhaha de la panique des membres résonnait dans les tuyaux, nouvelle source de désorientation.

Après ce qui me sembla être des heures à tourner en rond et revenir sur mes pas, qui ne devait être qu'une ou deux minutes plongé dans une panique absolue, je sentis une brise d'air frais agiter mes vibrisses. Impatient de me sortir de ce guêpier, je fonçais dans cette direction afin de trouver cette issue miraculeuse. Une nouvelle grille se dressa devant moi pour me barrer la route, et avec la même folie dévastatrice je la mettais hors d'état de nuire. Il me fallut quelques secondes pour me rendre compte que je venais d'atterrir sur le toit de la maison. Je prenais garde à ne pas glisser sur la surface lisse et humide des tuiles d'ardoises. La chute qui menaçait était impressionnante, peut-être pas mortelle à mon corps souple de mustélidé, mais les dommages seraient importants. Impossible de redescendre. Les membres de la Secte allaient me réduire en charpie à la moindre occasion même s'ils ne devaient pas avoir bien fait le lien entre le vison que j'étais et l'espion qui les menaçait.

MétamorphoseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant