Le temps a passé depuis la dernière fois. Boucle sans fin qui se ronge elle-même. Les digues en ont vu des eaux cloîtrées en leur sein. Des amours perdus, oiseaux de passages survolant le fleuve bloqué. Des journées gaspillées, gouttes de pluie tombées dans la flaque. Des entailles dans le mur qui retient tout ça. Une, deux, trois, plein. Ce ne sont que des jeux d'enfants, quel mal cela peut-il apporter à la grande structure grise et inerte ? Au pire, elle en sera légèrement amochée. Ce n'est qu'une plaisanterie. Rien qu'un amusement pour les matinées embuées de nos froids hivers.
Même le soleil ne réchauffe plus les cœurs. Il faut esquinter, briser, détruire. Fissurer les cœurs des autres puisque le sien est glacé. Espérer un peu de réconfort dans le désespoir des autres. On se dit que si la personne en face souffre comme nous auparavant, la douleur changera de victime. Jolie légende ou suppositions foireuses ?
Elle a mal, la grande muraille de béton qui retient toutes les gouttes d'eau lancées par la foule. Elle se fissure de part en part. Le jour où elle éclatera pour de bon, toutes les vagues retomberont sur les riverains.
Ce jour-là, leurs jeux d'enfants leur paraîtront guerre de grands. Ce jour-là, ils ne résisteront pas.
Pourtant, même ce jour-là, ils ne comprendront pas.
Non, ils ne comprendront pas,
A quel point,
ça fait
mal.