On était le 26 juin... Je sais, ça fait un moment. Je suis toujours au Canada, hébergée par mon frère et sa femme. Les gars ont commencé le Coupe du Monde, sans moi. Ils ont gagné deux matchs, sans moi. Aujourd'hui, il joue contre le Danemark, sans moi.
Ça me déprime de me réveiller tout les matins sans voir la petite bouille mal réveillée de Ben, les cheveux en bataille d'Antoine, la tête de tortue de Kylian, les danses de Sam et Paul...
- Ça va pas fort toi... dit mon frère en s'asseyant sur le canapé.
- Ils me manquent... dis-je en baissant la tête.
- Appelle Antoine ou Ben, suggéra-t-il
- Le match commence dans 1h, ils doivent être entrain de s'échauffer...
- Ça coûte rien d'essayer...
J'attrape mon téléphone, appelle Antoine, laisse les longues sonnerie s'écouler et raccroche.
- Pas de réponse... soupirais-je
- Essaye avec Ben.
Première sonnerie, deuxième sonnerie, troisième sonnerie :
- Bébé ?
- Ben, dis-je en entendant sa voix. Tu me manques...
- Et à moi alors ? Je comprends toujours pas comment ton père a pu te faire ça... Reviens mon amour... S'il te plait...
- Je ne peux pas Ben. Je voulais juste vous souhaiter bonne chance pour le match et te dire que tu me manques...
- Raccroche pas.
- Tu as un match de Coupe du Monde à jouer là !
- Je suis au téléphone avec ma copine, le monde attendra...
- Débile... rigolais-je.
- Bon... Le monde a pas l'air content que je sois au téléphone, je te laisse... Je t'appelle après le match ok ?
J'hoche la tête comme s'il pouvait m'entendre.
- Bye...
Il raccroche.
Mon frère me fait un sourire compatissant.
- T'as l'air heureuse avec lui, sourit-il.
- Il est gentil...
- T'as jamais beaucoup dévoilé tes sentiments...
- J'aimerais bien te parler de quelque chose... soupirais-je.
- La fameuse discussion... Putain, tu sais que je veux pas en parler, dit-il d'une voix dure.
- On doit en parler. Pourquoi t'es partie ? J'avais douze ans... Douze ans... Tu te rends compte ? J'ai perdu ma maman et mon frère.
- J'allais pas réussir à assumer... Je savais pour papa et elle... J'ai jamais rien fait... Quand elle est partie, je me suis sentie coupable...
- Tu savais ? Tu savais ? Tu te fous de ma gueule ?
- Non... dit-il en baissant la tête. J'ai pensé que c'était de ma faute... Ça l'est en partie... Si j'avais pas pris peur...
- C'est normal d'avoir peur Léo... T'aurais pu m'emmener avec toi !
- Non... Papa a refusé. Il a filé de la thune au notaire qui avait le testament de maman et il a pris ta garde...
- Tu sais quand même qu'il m'a emmenée voir un putain d'hypnotiseur ?
- Il l'a fait ? s'étonna-t-il.
- Ça aussi tu le savais ? m'exclamais-je.
- Je savais tout Emily... Je ne pensais pas qu'il allait le faire...
- Heureusement pour lui que son hypnotiseur devait être un arnaqueur et que je me souviens très bien de ma maman...
- Je suis désolé... J'aurais dû être là...
- Oui, t'aurais dû...
On parla encore un moment, histoire de tout éclairer. On a discuté longtemps, très longtemps... Deux heures peut-être... J'avais la télévision allumé mais je ne regardais pas vraiment... Les trois coups de sifflet final me font sourire. Ils sont en huitième...
Une petite demi-heure après, mon téléphone sonne : c'est Antoine.
- Allo ? dis-je.
- ON EST EN HUITIÈME BABY !!
- Tu me fais mal aux oreilles sale con ! C'est que le début hein ! Restez concentrés !
- Oui maman...
- Je te laisse baby, je vais appeler Ben !
- Reviens vite ! Je t'aime !
Il raccroche. Il dit "Je t'aime" aussi simplement qu'il enfilerait un caleçon. Ce mec il est un peu comme mon grand-frère... J'ai du mal à lui dire moi... Pareil avec Ben, pourtant personne ne sait à quel point je l'aime. Juste que je n'arrive pas à lui dire.
Léo m'interrompt dans ma rêverie :
- Papa t'as enlevé tout l'argent qu'il avait mis sur ton compte c'est ça ?
- Ouais... Et il a vendu mes meubles et mis en vente mon appartement, soupirais-je. Après, tout ça : c'était à lui. Maintenant, je suis pauvre mais libre...
- J'aimerais me faire pardonner...
- Tu m'héberges... C'est déjà ouf... Ben veut que je vienne vivre chez lui à Stuttgart après le mondial, Antoine m'a proposé que je vienne à Madrid dans sa maison le temps que je trouve une alternative.
- Emily... Garde ces personnes dans ta vie... Quoi qu'il arrive.
- Je compte bien ne pas les laisser tranquille...
- Donc pour me faire pardonner je...
- Je t'ai dit que t'étais pardonné Léo !
- Laisse-moi finir !
- Mais tu es pardonné, c'est bon !
- Ça veut dire que je dois annuler les billets d'avion que j'ai pris pour la Russie ainsi que les billets du match de l'équipe de France pour les huitièmes de final ?
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Beaucoup d'entre vous on dû se dire "Enfin"... Alors ce chapitre ?
A demain !
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Il disait "Toi et Moi" - Benjamin Pavard
FanficEntre une peur fatale de l'engagement et une surprenante attirance pour un des joueurs, saura-t-elle faire les bons choix pour être heureuse ? Une jeune photographe timide passionnée par la littérature se retrouve plongée dans un univers complètemen...