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Je me dirige vers le parking où Stell est déjà présente, tranquillement en train de fumer une cigarette. Son visage s'illumine lorsqu'elle me voit arriver.

- Brook, enfin ! Mais qu'est-ce que tu faisais ? Je t'attends depuis une demi-heure ! Elle a l'air sincèrement inquiète.

- J'étais en train de me disputer avec Aiden lorsque Cole nous a interrompus, lui expliqué-je. Elle esquisse un sourire en coin, comme si elle savait déjà ce qui s'était passé.

- Ah, je vois. Ce petit Cole ne te lâche pas, hein ? lance-t-elle, moqueuse. Je fronce les sourcils, elle n'a pas compris que ce n'est qu'un adolescent banal, pensant seulement à ses désirs et son ego.

- Il s'est moqué de moi devant ses amis en début de cours... je ne crois pas que ce soit très amical, précisais-je. Elle me répond d'un simple "mouais" avant de jeter sa cigarette et de monter dans sa voiture. En chemin, nous discutons de notre rentrée ennuyeuse à l'université. Elle monte un peu le son de la musique et se met à chanter, lorsque la sonnerie de mon portable retentit. "Maman" s'affiche sur l'écran.

- Baisse le son, s'il te plaît, lui demande-je. Elle obtempère, et je prends quelques secondes pour me décider à décrocher, certaine qu'Aiden a tout raconté.

- Salut maman, je suis contente de te parler, dis-je d'une voix plate. J'entends déjà le soupir d'exaspération de l'autre côté du téléphone.

- Bonjour Brook. Inutile de te demander comment tu vas, j'espère que tu n'as pas mal à la tête, ironise-t-elle. Je baisse les yeux, m'attendant à un sermon.

- Ne cherche pas à te justifier. Si cela se reproduit encore une seule fois, tu rentres immédiatement à la maison, m'avertit-elle. Je réponds faiblement  "D'accord" avant qu'elle ne raccroche. Elle n'a jamais été très affectueuse, préférant le ton ferme. C'est peut-être la distance avec mon père qui l'a rendue ainsi. Il a choisi de se battre dans les pays en guerre et sous-développés, sans savoir quand il rentrera. Quand j'étais petite, cela m'a beaucoup affectée, mais maintenant je sais que s'il rentre, ce sera pour se saouler avec ses boissons favorites.

- Brook, c'était qui? Ta mère? interroge-t-elle doucement, sachant pertinemment que notre relation est difficile.

- Oui, mais laisse tomber. Ça n'en vaut pas la peine, je réponds en esquissant un sourire forcé pour éviter de répondre à d'autres questions. Enfin, nous arrivons devant un grand centre commercial, où les gens se pressent en grand nombre.

- Un peu de shopping pour nous remonter le moral, Brook, viens ici ! s'écrie-t-elle, tout en me montrant une multitude de vêtements très chics dès notre arrivée.

- Essaie tout ça, il faut vraiment changer ta garde-robe. Je suis ta meilleure amie, je dois être sincère : ta garde-robe est trop... basique, me lance-t-elle avec assurance. Je la regarde, surprise. Elle a de bonnes idées, c'est indéniable, mais parfois ses habits mettent trop en valeur ses jambes fines, ce qui me laisse perplexe. Je ne suis pas grosse, mais je ne suis pas non plus très mince. Après de longues minutes passées à me tortiller dans la cabine, nous nous dirigeons vers la caisse. Stella m'a payé tout ce que j'ai choisi ! Il faut dire qu'elle a les moyens, même si ce geste me gêne énormément. Son père a beaucoup investi dans l'immobilier. Nous rentrons dans nos chambres respectives. Alors que je commence à ranger nos nouveaux habits, j'entends frapper à la porte.

- Brook, tu es ici ? Marmonne une petite voix. C'est Aiden. Je vois Stell me faire un signe pour nous laisser un peu d'intimité.

- Écoute, je suis vraiment désolé, mais c'est pour toi, tu comprends ? J'ai vraiment pas envie que ton avenir tombe à l'eau. Tu sais que je tiens énormément à toi, déclare-t-il avec un air attristé. Je sens qu'il exagère, mais je sais également qu'il est sincère.

- Ne parle plus jamais de ma mère, sinon mon avenir sera réellement détruit, s'il te plaît. Ce n'est pas une fête qui va gâcher ma vie, voyons, je lui rétorque, prenant sa main et le regardant droit dans les yeux.

- Je vais travailler dur, je te le promets. On pourra même réviser et étudier ensemble si tu le veux... Plus de fête. Un sourire ainsi qu'une certaine assurance se dessine doucement sur son visage, mais tout-à-coup, quelqu'un entre sans frapper. Je suis tellement surprise que je saute dans les bras d'Aiden. Je vois Cole, une bouteille à la main. Je passe ma main sur mon visage avant de voir la mine colérique et déçue d'Aiden qui part en trombe de la chambre.

- Non Aiden, attends ! Je comptais le suivre, dis-je alors que le jeune garçon à la bouteille me saisit la main pour me retenir. Nos visages se trouvent à proximité l'un de l'autre et le bleu de ses yeux m'attire irrésistiblement. Sa main en contact avec la mienne me réchauffe instantanément, dissipant toute la colère que j'avais en moi. Les mots acerbes que je m'apprêtais à lui adresser se transforment alors en une douce mélodie de silence.

- Je viens juste récupérer mes affaires. Il a l'air d'avoir beaucoup, beaucoup trop bu. Il perd l'équilibre et s'effondre sur mon lit , m'exclamai-je tandis que le jeune homme ricane.

-  En voilà des manières d'entrer ! poursuivis-je, contrariée.

- N'empêche, je t'ai à nouveau sauvé , rétorqua-t-il en levant les yeux vers moi. Je me sens intimidée par son regard et il m'attire pour que je vienne m'asseoir à côté de lui.

-  Me sauver de quoi ? demandai-je en fronçant les sourcils, nos yeux se plongeant à nouveau l'un dans l'autre comme deux océans.

- De ce pauvre type que tu appelles "petit copain".  s'emporta-t-il.

- Premièrement, je n'ai jamais dit que c'était mon petit copain, et deuxièmement, arrête de parler de lui comme ça. C'est plutôt lui qui aurait dû me sauver de ta manière d'entrer, ivre mort, dans ma chambre , répliquai-je, agacée.

Un sourire se dessina alors sur les lèvres du jeune homme qui enchaîna :

 - Tes mots te trahissent, je sais très bien que tu ne l'aimes pas, pas vrai ? 

Exaspérée, je lui ordonnai de quitter ma chambre immédiatement, mais il se mit à bafouiller, sa tête tournant dangereusement. 

- Ne crie pas, j'ai un mal de crâne affreux ! gémit-il en fermant les yeux. Je me rendis compte que j'étais face à un véritable phénomène, doté d'une audace incroyable.

- Si tu ne voulais pas avoir mal à la tête, tu n'avais qu'à éviter de boire autant en pleine soirée de semaine , lui lançai-je avant de remarquer qu'il fixait la fenêtre. La nuit était déjà tombée depuis une bonne demi-heure.

- Il... il fait déjà nuit ? marmonna-t-il, fasciné comme un enfant. Je le vis frissonner et le couvris de mon duvet.

- Oui Cole, il fait déjà nuit depuis un bon moment, répondis-je tandis qu'il continuait de fixer la pleine lune.

- C'était l'une de ces nuits-là, une nuit de pleine lune..., murmura-t-il soudain avant de baisser les yeux. 

La tension était palpable dans la chambre. Cole, manifestement perdu dans ses pensées, tourne son regard vers moi. Je plonge mes yeux dans les siens tout en le questionnant d'une voix douce:

- Que s'est-il passé l'une de ces nuits-là?

Son regard s'apaise alors qu'une main chaude vient se poser sur ma jambe. Une chaleur étrange se crée dans mon bas ventre et je ressens une sensation jamais ressentie auparavant. Cole semble lui aussi ressentir quelque chose de particulier, mais il détourne subitement le regard et pose la couverture sur mon lit, faisant mine de partir.

Je le rattrape alors en hâte, me doutant qu'il avait probablement trop bu :

- Attends, tu as bu, ça ne serait pas...

Mais il me coupe net :

- Bonne nuit.

Dans un long silence, il me quitte lentement, mais avec assurance. Je reste seule, troublée par cette interaction particulière avec Cole, et me demande ce qui s'est réellement passé lors de cette fameuse nuit de pleine lune.

The boy I met in CorkOù les histoires vivent. Découvrez maintenant