1er décembre 1991, à La Haye
Ma chère Lise,
J'ai vu quelque part que pour écrire à une fille, il fallait dire ''ma chère'' et Willem dit que tu seras contente si j'écris ça donc chère Lise, je ne t'ai pas menti !
Comme promis, c'est le 1er décembre et je t'écris une lettre. Maman a un peu râlé car les timbres, ça coûte cher mais tu vas bien recevoir 23 autres lettres pour attendre Noël ! Et puis, on se voit toujours pour la saint Nicolas et ça, c'est cool !
Tu vas voir comme Jaap a grandi !! Il dit des mots maintenant et il connaît mon prénom. Il m'appelle ''Kaas'' mais ça me dérange pas.
J'ai trop hâte de te revoir ! Ca fait 6 mois que je suis parti et tu me manques. Les filles, elles sont toutes nulles ici, même les garçons. Personne ne connaît tes jeux français bizarres et on me regarde avec de gros yeux quand je dis que plus tard, j'aimerai regarder les mouches voler, comme fait ton cousin. Tu t'en souviens ? C'est toi qui me l'a dit !
J'ai écrit cette lettre hier, mercredi. Le monsieur a dit que tu la recevrais samedi mais fais gaffe ! Tu dois bien l'ouvrir le 1er, pas avant !
Je t'ai fait un cadeau aussi mais je te le donnerai samedi prochain. Et je t'ai dit que tu me manquais ?
Voilà, c'est fait. La Haye, c'est trop nul mais Willem m'achète pleins de Lego pour pas que je m'ennuie. Amsterdam me manque. Va voir Petra pour lui dire que les zoute me manquent et qu'ici, ils n'ont que des zoete pas bons.
On va aller faire les courses avec maman et Jaap donc je dois te laisser. On va poster ta lettre aussi.
Bisous Lise et n'oublie pas d'aller chercher le courrier tous les jours du 1er au 24 décembre. Tu te souviens ? Je t'avais dit que tu aurais une lettre tous les jours. Ce serait cool qu'on le fasse pour toujours hein ? Que tu reçoives mes lettres toute ta vie !
Bisous Lise.
Nikolaas
(et les Zwarte Piet)
Maman et Willem te font des bisous. Et Jaap.
***
Erwin était plongé dans ses pensées alors que son père retira son uniforme de postier. Il interrogea son fils du regard mais Erwin était loin. C'était dimanche aujourd'hui et il refusait de laisser ses pensées se tourner vers son père et ce travail de facteur qu'il occupait à mi-temps, après ses cours. Ce n'était pas la vie dont il rêvait.
Lui, il voyait plus haut, plus grand, se croyant plus fort. Il étudiait depuis quatre ans à l'université. Après avoir essayé une année en psycho, une autre en philo, il s'était tourné vers l'histoire et si les grandes dates qui marquaient le pays ne l'intéressait guère, c'était un but plus grand qu'il visait. L'enseignement. A la fac, de préférence, car c'est là qu'il croyait que les élèves étaient plus intéressants. Parfois, il s'imaginait plutôt prof au lycée, à jongler entre les amourettes de certains, les règlements de compte d'autres et cette minorité qui le questionnerait sur les origines de la Seconde Guerre, la Troisième qui aurait lieu alors que les courbes du chômage était à la hausse – tout comme le prix du pétrole. Il s'imaginait aussi parfois, debout devant des dizaines de gamins ne dépassant pas dix ans. Il enseignerait à des mômes, à des enfants qui ne connaissaient rien de la vie et à qui il fallait tout apprendre. Il serait responsable de leur avenir. Cela le faisait rêver.

VOUS LISEZ
... et t'attendre à Noël
Romance25 chapitres, 25 jours, 25 lettres. C'est le temps qu'ont Klaas et Lise pour s'aimer. A moins que...